Histoire de Vendée

Histoire de la Vendée
du Bas Poitou en France

Chapitre Précédent Table des matières Chapitre Suivant

CHAPITRE XX
LES GUERRES DE RELIGION EN BAS-POITOU

 

Le Bas-Poitou depuis le traité des Pyrénées (1659) jusqu'à 1700

PROGRÈS CONSIDÉRABLE DES PROTESTANTS EN BAS-POITOU


EMPRUNT FORCÉ SUR L'ÉVÊCHÉ ET LE CHAPITRE DE LUÇON. - RÉCLAMATIONS DES SEIGNEURS DE LA BARONNE DE MONTAIGU. - SOULÈVEMENTS DIVERS. - PILLAGES DE LUÇON, LE LANGON, ETC


PREMIER SIÈGE DE FONTENAY. - LA VILLE EST MISE A SAC ET PILLÉE (1562). - L'EFFROI EST PARTOUT. - RASSEMBLEMENT DE TROUPES A FONTENAY, MOUILLERON, SAINTE-HERMINE, LUÇON. - PRISE DE POUZAUGES, MONTAIGU


PRISE DE L'HERMENAULT ET DU CHATEAU ÉPISCOPAL DES MOUTIERS-SUR-LE-LAY. - LE CULTE PROTESTANT AUTORISÉ DANS DIVERS LIEUX, FAIT DES PROSÉLYTES DANS PLUSIEURS PAROISSES DU BAS-POITOU OU LA MESSE EST ABOLIE


ÉTAT DES ESPRI'TS EN BAS-POITOU. - SYNODE DU PUYBELLIARD - PAIX D'AMBOISE (19 Mai 1563). - LE CALME NE DURE PAS LONGTEMPS. - DU LUDE FAIT CESSER LES PRÊCHES DE DU MOULIN. - ACTES D'INTOLÉRANCE RÉCIPROQUE. - DÉPOSITIONS DE DIVERS ECCLÉSIASTIQUES


CENSURE FAITE PAR DES MAGISTRATS ET DES PRÉLATS


REPRÉSAILLES A POUZAUGES. - RÉSISTANCE HÉROIQUE DU CHANOINE CHANTECLERC A LUÇON. - MEURTRES ET PILLAGES


LE COMTE DU LUDE S'AVANCE POUR SECOURIR LUÇON ET POURSUIVRE L'ARMÉE PROTESTANTE. - ENGAGEMENTS DE MARANS, SAINTE-GEMME-LA-PLAINE, ETC. - SACS DE DIVERSES ÉGLISES ET ABBAYES. - RÉSISTANCE HÉROIQUE DE HAUTECOMBE ET DE SEPT BOURGEOIS DE FONTENAY


SIÈGES DE TIFFAUGES (15 Mars 1569), DE MONTAIGU (24 Mars 1569). - LA GRÈVE. - L'ILE-D'ELLE. - VENTE DE BIENS ECCLÉSIASTIQUES. - BATAILLE DE JARNAC (13 Mars 1569). - PRISE DE BOURNEZEAU ET DE L'HERMENAULT. - SIÈGE DE NIORT (Juin 1569). - LA GARNISON DE FONTENAY SE RETIRE A MARANS


PRÉLUDES DE LA SAINT-BARTHÉLEMY. - BATAILLE DE MONTCONTOUR (3 Octobre 1569). - REPRISE DE NIORT ET DE LUSIGNAN. - FONTENAY ÉVACUÉ PAR LES PROTESTANTS (11 Octobre 1569). - MARANS PRIS ET REPRIS PAR LES DEUX PARTIS. - AFFAIRE DE L'ILE-D'ELLE. - GUÉ-DE-VELLUIRE, BEAUVOIR, ETC


SIÈGE ET PRISE DES SABLES-D'OLONNE PAR LA NOUE-BRAS-DE-FER (16 Mars 1570). - LUÇON ENLEVÉAUX PROTESTANTS. - BATAILLE DE SAINTE-GEMME-LA-PLAINE. - REPRISE DE FONTENAY PAR LES PROTESTANTS (21 Juin 1570). - DÉPRÉDATIONS DIVERSES


LA SAINT BARTHÉLEMY ET SES CONSÉQUENCES EN BAS-POITOU. - MISE A MORT DE PLUSIEURS GENTILSHOMMES BAS-POITEVINS. - ÉCHEC DU DUC D'ANJOU DEVANT LA ROCHELLE


REPRISE DE FONTENAY PAR LES PROTESTANTS (24 Février 1571.) - LES HERBIERS, MORTAGNE, MELLE ET TALMONT ONT LE MÊME SORT


PREMIER SIÈGE DE FONTENAY PAR LE DUC DE MONTPENSIER (7 Mai 1574). - NOUVEAU SIÈGE PAR MONTPENSIER, QUI S'EMPARE DE LA VILLE (18 Septembre 1574)


SEPTIÈME GUERRE CIVILE DITE DES AMOUREUX (1579-1580). - LES GRANDS JOURS A POITIERS. - PRISE ET SIÈGE DE MONTAIGU (Septembre 1580). - TRISTES RÉSULTATS DES GUERRES DE RELIGION EN BAS-POITOU A LA DATE DE 1580


LA SAINTE-UNION. - SCÈNES REGRETTABLES ENTRE CATHOLIQUES ET PROTESTANTS : DUEL, ENLÈVEMENT, MEURTRE. - MORTAGNE ET LA GARNACHE ENLEVÉS AUX CATHOLIQUES. - PLUSIEURS GENTILSHOMMES EMBRASSENT LE PARTI DE LA LIGUE


CONDÉ MARCHE SUR COULONGES, CHASSENON, FONTENAY. - PROTESTATIONS DE HENRI DE NAVARRE CONTRE SON EXCOMMUNICATION (6 Novembre 1585)


PRISE DE BROUAGE ET DE MARANS PAR HENRI DE NAVARRE. - CONFÉRENCE DE SAINT-BRIS. - MAILLEZAIS SE REND AUX PROTESTANTS. - LE DUC DE MONTPENSIER FAIT METTRE FONTENAY EN ÉTAT DE DÉFENSE (Février 1587)

 

EN BAS-POITOU LA RÉFORME. - SES CAUSES. - SON INTRODUCTION
EN POITOU. - PREMIÈRES PERSÉCUTIONS

 

Le commencement du XVIe siècle vit éclater en Europe une révolution qui eut dans le Bas-Poitou de longs et cruels retentissements.

L'invention de l'imprimerie donnait, depuis soixante ans, une grande impulsion aux esprits ; les hérésies, mal étouffées, fermentaient sourdement ; les progrès du commerce et des arts avaient fait naître mille besoins nouveaux, que l'organisation trop peu flexible de la société ne pouvait satisfaire. Ce fut alors qu'éclata la Réforme. Elle apira à devenir un nouveau système social ; elle clôtura le moyen âge, ouvrit la série des siècles modernes, fit des efforts pour déplacer le foyer de la civilisation, resté jusqu'alors dans l'Église, et faillit l'éteindre en prétendant l'épurer. Par l'esprit d'indépendance, elle changea la face du monde politique ; par l'esprit d'investigation, elle remua sans les ébranler les fondements du monde religieux.

L'origine de cette collision qu'avaient entrevue les grands docteurs de l'Église, Gerson, Clémengis, Pierre d'Ailly, Girolomo, Savonarola et beaucoup d'autres fut misérable. Les Jacobins avaient été chargés par Léon X de recueillir des fonds pour la construction de la basilique de Saint-Pierre de Rome : des indulgences y étaient affectées. Les Augustins auraient voulu aussi y participer. Un jeune religieux, Luther, venu en 1510 à Rome, pour les affaires de son ordre, composa contre l'abus des indulgences une thèse qu'il fit afficher sur les murs même du Vatican et qu'il soutint publiquement en chaire.

Les indulgences étaient alors un grand commerce d'argent. Luther en fit un grand scandale : la controverse s'anima. Luther, poussé dans cette voie, attaqua le pouvoir des papes, l'unité de l'Église, les dogmes, la discipline, la hiérarchie. Il fut excommunié. Il éleva autel contre autel, brûla la bulle du pape et se déclara chef d'une nouvelle Église. Il comparut devant Charles-Quint, défendit admirablement sa doctrine, et fut banni du territoire de l'empire. L'électeur de Saxe, Frédéric, lui donna asile au château de Warbourg, où il resta longtemps caché ; mais ses écrits soulevèrent les princes d'Allemagne contre Charles-Quint, les paysans contre les évêques et les seigneurs, et une foule d'Églises contre l'Église de Rome.

La Réforme pénétra, paraît-il, en Poitou, par les prédications de Calvin, à la suite d'un voyage qu'il fit en Saintonge chez Louis du Tillet, chanoine d'Angoulême et curé de Claix, qui partageait ses opinions et qui était frère de Jean du Tillet, greffier du Parlement de Paris (1).

Les passions religieuses y furent vite surexcitées. Dès 1531, les Grands jours, tenus à Poitiers, avaient condamné un habitant de Loudun a être brûlé vif à cause de ses opinions religieuses, et trois ans après un autre bûcher s'allumait également dans notre pays.

La victime, cette fois, était une pauvre femme du nom de Marie Beccaudelle, appelée aussi Gaborite, pauvre fille des Essarts, servante à La Rochelle, dans une maison où des marchands, revenus du Brabant avaient, paraît-il, fait pénétrer la doctrine nouvelle.

De retour aux Essarts, Marie ne craignit pas d'attaquer publiquement la doctrine d'un franciscain en lui citant divers passages bibliques qu'elle avait retenus. Mal lui en prit : accusée d'hérésie et conduite en prison, elle fut jugée à Fontenay et condamnée à être brûlée vive aux Essarts (1538).

Six ans plus tard, Charles Chabot, seigneur de Jarnac, ordonnait « au commissaire desparty » à Fontenay, de faire le procès à trois individus incarcérés et accusés d'hérésie (1542).

En 1557, Jean Buron, d'Apremont, supplicié en Anjou, subissait son jugement et sa peine clans un calme inaltérable.

Pierre Gabard, de Saint-Georges-de-Montaigu, était brûlé à petit feu, et Nicolas Ballon, de Breuil-Barret, exécuté en 1559, parce qu'il colportait la Bible clans le pays.

Ces sanglantes exécutions consternaient les protestants sans les abattre ; frémissant de rage et de colère, leurs chefs ne cessaient de réveiller en eux le désir de la vengeance, n'attendant plus qu'une occasion favorable pour lever ouvertement, dans le Bas-Poitou, l'étendard de la révolte.

 

Retour haut de page

NOTES:

(1) Des documents établissent que les Parthenay l'Archevêque professaient, au Parc de Mouchamps, la religion réformée dès 1515, et que de 1515 à 1528, Michelle de Saubonne, veuve de Jean l'Archevesque, et dame d'atours de la reine Anne de Bretagne, faisait prêcher dans les églises de Mouchamps, Rochetrejoux et Vendrennes, la doctrine de Calvin, qu'elle avait fait venir sous le nom de Charles d'Esfeuille, à la cour de Renée, femme du duc de Ferrare, et fille d'Anne de Bretagne et de Louis XII.

 

PROGRÈS CONSIDÉRABLE DES PROTESTANTS
EN BAS-POITOU

 

Breuil-Barret. - Fontenay. - La Châtaigneraie. - Mouchamps. - Chantonnay. - Pouzauges. - Les Herbiers. - Montaigu. - Mareuil. - Le Poiroux. - Talmont. - Saint-Cyr-en-Talmondais, etc.

 

L'édit inique rendu à Ecouen par Henri II, en 1555, en vue d'arrêter le progrès du protestantisme, n'avait jamais été exécuté, grâce à l'opposition du Parlement de Paris, et dans plusieurs régions du Bas-Poitou, l'hérésie, favorisée par l'insuffisance des récoltes, avait fait de rapides progrès.

Au Breuil-Barret, la religion prétendue réformée enseignée par Pierre Denfert, fils d'un marchand-tondeur, comptait de nombreux adeptes. Il en était ainsi à Fontenay, où les familles Rivaudeau, Collin, Bonnet, Misère, Imbert, Vernède, de Sallenvove, Frouard, Garipault, Gaudin, Robert, etc., faisaient publiquement montre des nouvelles croyances. Dès 1557, un ministre du nom de Josué, s'était discrètement établi dans cette ville, et en 1562, son successeur, Claude Du Moulin, prêchait dans une maison acquise par le Consistoire à l'angle de la rue Haute-du-Puits-Lavau.

Dans d'autres parties du Bas-Poitou, les deux Bouchet, les Parthenay-l'Archevêque, Lancelot de Sainte-Gemme-la-Plaine, son oncle Tanneguy, Claude de la Grulie, du Landreau, etc., faisaient faire le prêche dans tous les lieux qui relevaient de leurs seigneuries : Saint-Cyr-en-Talmondais, Le Poiroux, Saint-Fulgent, Mouchamps, Vendrennes, Rochetrejoux, Bournezeau. Il en était ainsi à Puybelliard, Chantonnay, Sigournais, Les Herbiers, Les Essarts, Talmont, Montsireigne, Mareuil, Mouilleron-en-Pareds, Cezais, Saint-Sulpice, etc.

A La Châtaigneraie, les puissants seigneurs de Vivonne, bien qu'ardents catholiques, ne purent non plus empêcher le protestantisme de pénétrer parmi leurs vassaux, nobles ou roturiers, et bientôt se forma autour de leur château, comme un cercle hostile qui, se resserrant de plus en plus dès le début du règne de Charles IX, les força de renoncer à cette résidence. - A Puyviault, de Saint-Sulpice-en-Pareds et à Honorat Prévost, du Chatellier-Portault, de Mouilleron-en-Pareds, se joignirent bientôt les Bastard de la Cressonnière, qui prirent une part très active aux troubles qui agitèrent le nord du pays, pendant que le fameux Tanneguy du Bouchet commettait toutes sortes d'exactions dans la région des Moutiers-les-Mauxfaits, Angles, le Poiroux, La Claye, Saint-Cyr-en-Talmondais, etc.

 

Retour haut de page

EMPRUNT FORCÉ SUR L'ÉVÊCHÉ ET LE CHAPITRE DE LUÇON. - RÉCLAMATIONS DES SEIGNEURS DE LA BARONNE DE MONTAIGU. - SOULÈVEMENTS DIVERS. - PILLAGES DE LUÇON, LE LANGON, ETC

 

En 1560, François II voulant anéantir la nouvelle religion en recouvrant aux armes, jugea bon de lever un emprunt forcé de 1.000 livres sur l'évêché de Luçon, et de 500 sur le chapître de cette ville, mais cette mesure violente ne produisit pas l'effet qu'on en attendait, - Peu de temps après, dix-huit gentilshommes de la baronnie deMontaigu réclamaient énergiquement au roi, par l'organe de Raymond de Castinayes, seigneur de la Preuille, en Saint-Hilaire-de-Loulaye, le libre exercice de la religion réformée.

Dans tout le Bas-Poitou, de soudaines explosions de colères, préludant à de sanglantes luttes, indiquaient clairement à l'observateur attentif que leur force d'expansion serait d'autant plus grande, qu'elle avait été plus longtemps comprimée.

A la fin du règne de François II, les consciences ne demandaient qu'à éclater. « Les cœurs » dit Dargaud (1) « avaient des pressentiments de martyre et d'héroïsme, les voix d'éloquence, les bras de batailles sacrés ! »

Le massacre de Vassy (1er mars 1562), vite connu en Bas-Poitou, mit le feu aux poudres dans ce milieu surchauffé par les passions religieuses. Tanneguy du Bouchet quitte le Puy-Greffier près Saint-Fulgent, et va, sur l'ordre de Condé, prendre l'importante charge de prévôt d'Orléans, première place de guerre du parti protestant. Soubise du Parc de Moucliamps va occuper Lyon, pendant que les catholiques mettent à feu et à sang Mouilleron-en-Pareds, où les protestants prendront deux ans après, une terrible revanche, ainsi qu'à Cheffois, où l'église devait être transformée en temple.

 

La Cathédrale de Luçon et les Cloîtes de l'Evêché. (Cliché Jules Robuchon).

 

Le ministre Claude du Moulin, envoyé de Genève à Fontenay en 1560, parcourait les campagnes, transformant en chaire le premier tertre venu, et jetant à ces hommes simples et crédules, un éloquent cri de guerre qu'ils interprétèrent comme un appel à la liberté. Peu de nobles prirent d'abord part à ce soulèvement qu'ils avaient pourtant préparé, et les premiers chefs de l'insurrection calviniste furent surtout des ministres et des paysans. Tout le pays compris entre l'Autise, La Châtaigneraie, Pouzauges, Les Herbiers, La Roche-sur-Yon, Le Poiroux, Talmont, Saint-Cyr, Luçon, Le Langon prit les armes, et des bandes munies de hâtons, de haches et de quelques arquebuses, se mirent à piller les églises, à massacrer les prêtres et ceux qui passaient pour de zélés catholiques.

Le 30 avril 1562, sous la conduite de plusieurs genthilshommes, au nombre desquels se fait remarquer Philippe de Harpedanne, seigneur de Cosnac, Puyhelliard et Chantonnay, les protestants de Fontenay, Luçon, La Châtaigneraie, Chantonnay, Le Puybelliard, Foussais, Montsireigne (2), Thiré, Pouillé et autres paroisses, pénétrèrent avec « épées, pistolets, arquebuses, hallebardes, armures et autres bâtons défendus » dans la cathédrale de Luçon, défendue par le chanoine Chanteclerc, la saccagèrent, brisèrent les statues, déchirèrent les tableaux, renversèrent les autels, mirent en pièces les livres des prières et les ornements d'une faible valeur, et s'approprièrent les autres. Ils en firent autant dans les églises de Saint-Mathurin, de Saint-Philbert et de Sainte-Madeleine. Ils pillèrent le palais épiscopal, les bâtiments du chapitre, les maisons des chanoines et placèrent ensuite garnison dans la cathédrale. - Le jour même où ce monument était saccagée, l'église de Nalliers, et le lendemain celle de Mouzeuil subissaient le même sort.

Poursuivant leur campagne de destruction, les protestants pillèrent également le Langon et se décidèrent à faire le siège de Fontenay où s'était déjà produite, le 24 juin précédent, une échauffourée sanglante provoquée par les questions religieuses.

 

Retour haut de page

NOTES:

(1) Histoire de la liberté religieuse.

(2) Ceux de Montsireigne se firent surtout remarquer parmi les plus intolérants.

 

PREMIER SIÈGE DE FONTENAY. - LA VILLE EST MISE A SAC ET PILLÉE (1562). - L'EFFROI EST PARTOUT. - RASSEMBLEMENT DE TROUPES A FONTENAY, MOUILLERON, SAINTE-HERMINE, LUÇON. - PRISE DE POUZAUGES, MONTAIGU

 

Le samedi 23 mai 1562, veille de la Trinité, des paysans et d'autres individus, tous protestants, déguisés en campagnards, arrivèrenet en grand nombre à Fontenay, sous le prétexte de vendre des denrées, et allèrent occuper le Marché aux Porches, aujourd'hui Place Belliard, tandis que leurs complices se dirigeaient sans bruit vers l'église et les portes.

A un signal convenu, le tocsin sonne, et les prétendus marchands, tirant des armes cachées sous leurs vêtements, se rendent facilement maître de la place.

Ce premier succès obtenu, ils dirigent quatre couleuvrines contre le château, qui capitule au premier coup de canon.

Dès lors, le pillage commence : Notre-Dame, Saint-Jean, Saint-Nicolas, les Jacobins, les Cordeliers sont saccagés ou brûlés, les ornements d'église sont détruits en partie ; les trésors que possédait la principale église de la ville, notamment un magnifique ciboire en or, sont pillés ; les images de saints descendues de leurs piédestaux, sont brisés ou disparaissent. Les tableaux ont le même sort, et les doctrines des iconoclastes, qu'on croyait à jamais éteintes, font de nouveau leur apparition dans les murs de la capitale du Bas-Poitou qui pendant plusieurs semaines, fut livrée à la folie de destruction qui soufflait sur les réformés. Les maisons des papistes furent visitées et mises à contribution, et les personnes durent au sieur de la Jousselinière, capitaine du château, et à du Moulin, de n'être pas massacrées.

Les paroisses voisines de Fontenay, notamment Le Langon, ne furent pas épargnées non plus par des maraudeurs, dangeureux auxiliaires qui, aux jours de crise, montent des couches inférieures de la société et s'attachent comme une plaie aux flans des partis.

Cet état de choses dura plus d'un mois : bientôt cet assemblage hideux de pillards et de vagabonds eut peur de du Lude, gouverneur du Poitou, qui était à Niort, afin de surveiller les progrès de la révolte, si bien que vers la fin de juin, la ville se trouva purgée, et que les plus hardis catholiques, dirigés par Nicolas Rapin, Pierre et Barnabé Brisson, Tiraqueau, Hilaire Goguet, Pierre Gâteau, André et Abraham Gallier, s'emparèrent des portes et du château.

Le triomphe des catholiques fut accueilli avec des transports de joie, non seulement par les Fontenaisiens, mais aussi par les habitants des régions de Sainte-Hermine, Luçon et l'Hermenault, où les transactions commerciales avaient presque complètement cessé ; l'insécurité des routes était telle que les gens n'osaient plus s'aventurer à une lieue de leur village.

Mais ce n'était qu'une éclaircie dans un nuage chargé d'orages : un hiver rigoureux (1) avait causé d'affreuses misères et les exaltés des deux partis en avaient profité pour faire appel aux plus mauvaises passions.

Pendant que des troupes de catholiques furieux, sous les ordres de Vitry et le Lys, battaient le pays aux environs de Fontenay et de Mouilleron, y commettant toutes sortes d'exactions et de violences, les protestants commençaient encore à s'agiter dans le Bas-poitou : des troupes venant d'Aunis se rassemblaient à Sainte-Hermine et vers Luçon.

Le 11 mars 1563, les réformés s'emparèrent de Pouzauges et l'occupèrent jusqu'au 15. Ils étaient commandés par « le seigneur de Sainte-Hermine, Lancelot du Bouchet et du Landreau, seigneur de Bournezeau (2), qui firent leurs montrées à Pouzauges et cherchèrent tout autour et vers la Châtaigneraie les gens d'églises pour leur faire outrages, dont aucuns de leurs gens faisaient maintes voleries. » En moins de deux mois, les églises éparses dans les campagnes furent pillées, et plusieurs réduites en cendres.

Dans quelques paroisses les prêtres n'osèrent pas célébrer la messe pendant la semaine sainte et le jour de Pâques.

L'église, la chapelle du Chapitre de Saint-Maurice (3) et le château de Montaigu étaient également mis au pillage le dimanche de la Passion, et le récit des atrocités commises est relaté dans un document du chartrier de Thouars, que nous regrettons de ne pouvoir reproduire ici (4).

 

Retour haut de page

NOTES:

(1) Au commencement de mars 1563, le boisseau de froment valait, à Fontenay, quarante-cinq sous, chiffre énorme pour l'époque et qui représenterait aujourd'hui une valeur quintuple.

(2) Il devint plus tard un fougueux catholique.

(3) Cette chapelle se trouvait alors située dans le château de Montaigu.

(4) Nous avons publié ce récit dans notre histoire des guerres de religion en Bas-Poitou, T.I, pages 78, 79, 80, 81.

 

PRISE DE L'HERMENAULT ET DU CHATEAU ÉPISCOPAL DES MOUTIERS-SUR-LE-LAY. - LE CULTE PROTESTANT AUTORISÉ DANS DIVERS LIEUX, FAIT DES PROSÉLYTES DANS PLUSIEURS PAROISSES DU BAS-POITOU OU LA MESSE EST ABOLIE

 

L'expédition projetée contre Fontenay par du Landreau et de Sainte-Gemme à la tête de leurs bandes, et qui se borna à la prise de l'Hermenault et du château épiscopal des Moutiers-sur-le-Lay, n'était point de nature à faire renaître la confiance, mais cette campagne tant annoncée ayant avorté, les craintes se calmèrent. Le besoin d'entente se faisant sentir, une sorte de compromis au moins tacite fut accepté par les partis, d'autant mieux qu'une déclaration royale du 7 avril de cette année, autorisait les réformés à s'assembler dans les faubourgs de Fontenay pour l'exercice de leur culte. Châtellerault, Montmorillon et Aunay eurent les mêmes privilèges. Mais ce nombre très insuffisant de lieux de culte n'était proportionné ni à celui des réformés, ni à l'étendue du pays.

Dans le Bas-Poitou la révolution religieuse à laquelle n'avait pas toujours présidé l'esprit de tolérance, avait fait des progrès immenses.

« Des paroisses nombreuses du diocèse de Luçon n'avaient plus de messe. Dans la partie occidentale qui longe la mer et forme aujourd'hui l'arrondissement des Sables-d'Olonne, elle avait été abolie : à Saint-Gervais, Sallertaine, Froidfond, Falleron, Saint-Paul-Mont-Penit, Saint-Révérend, Landevieille, Saint-Sornin, le Givre, Saint-Cyr-en-Talmondais et sur la limite de la province, au nord, à Saint-Etienne-de-Corcoué et dans quelques autres lieux...

Le protestantisme avait aussi conquis une grande partie de la population du pays compris entre Saint-Fulgent, Les Herbiers et Pouzauges au nord, et Mareuil, Luçon et Fontenay au midi. Les réformés étaient surtout agglomérés sur les bords du Lay et de ses nombreuses petites ramifications depuis Pouzauges et Mouchamps jusqu'à la mer. Le culte catholique ne se célébrait plus à Saint-Fulgent, Saint-Michel-Mont-Mercure, Pouzauges, le Boupère, Mouchamps, Montsireigne, Tillay, Chavagnes -les-Redoux, Sainte-Gemme-des-Bruyères, Le Talud, Saint-Germain, L'Aiguiller, Mouilleron, Le Puybelliard, La Jaudonnière, Puymaufrais, Saint-Martin-l'Ars, Bournezeau, Le Simon, Bessay, La Bretonnière, Nesmy, et dans beaucoup d'autres paroisses (1) ».

A la Copechagnière, petite commune du canton de Saint-Fulgent, et privée de tout moyen de communication facile, le protestantisme avait de très bonne heure fait son apparition. Des tanneurs de cette paroisse, en relation d'affaires avec La Rochelle y avaient apporté la nouvelle religion, embrassée aussitôt par les familles les plus influentes des environs. Les de La Fontenelle de la Violière, Durcot de Puytesson, Marchegay-Guyard et autres fervents adeptes des doctrines de Calvin, ne se distinguèrent malheureusement trop souvent que par leur intolérance, contre laquelle la cour de Poitiers dut plus d'une fois intervenir.

 

Retour haut de page

NOTES:

(1) Lièvre. - Histoire des Protestants et des Églises réformées du Poitou. T. 1, pp. 132, 135. - Ce fut vraisemblablement à cette époque que les protestants, pour se reconnaître, ainsi que les chrétiens de la primitive Église, firent usage de méreaux, sortes de jetons en métaux qui constituaient au moment de la Cène, surtout, des signes de ralliement donnés par les ministres.

 

ÉTAT DES ESPRI'TS EN BAS-POITOU. - SYNODE DU PUYBELLIARD - PAIX D'AMBOISE (19 Mai 1563). - LE CALME NE DURE PAS LONGTEMPS. - DU LUDE FAIT CESSER LES PRÊCHES DE DU MOULIN. - ACTES D'INTOLÉRANCE RÉCIPROQUE. - DÉPOSITIONS DE DIVERS ECCLÉSIASTIQUES

 

La Mort du duc de Guise (24 février 1563), le plus grand homme de guerre de France, à cette époque devenu chef de parti et tombé victime d'un guet-apens, consterna l'Europe, et l'angoisse fut, immense dans la catholicité. Guise mort, Condé et Montmorency captifs, la reine-mère, Catherine de.Médicis, restait maîtresse du gouvernement. Femme d'une intelligence supérieure, si au point de vue moral on ne peut la juger trop sévèrement, à travers tant de vices elle eût des mérites. Voyant ce qu'au fond voulaient ces ambitieux, le triomphe de leur croyance sans doute, mais aussi celui de leur pouvoir, elle s'empressa de profiter de la situation nouvelle qui lui était faite pour rendre au gouvernement un peu d'énergie et de force, d'autant mieux qu'elle voyait la guerre civile diminuer le respect pour l'autorité royale.

Tout le vieil édifice social était ébranlé, et de terribles commotions agitaient le pays. Le Bas-Poitou était toujours le champ de bataille ouvert à tous les partis, et là plus qu'ailleurs, on n'attendait qu'une occasion pour se soulever à nouveau.

Au commencement de 1563, un synode protestant où assistaient plus de soixante ministres ou gentilshommes s'était tenu à Puybelliard. Là, les mesures les plus propres à lever l'étendard de la révolte avaient été prises, des intrigues nouées, des visites échangées, des biens vendus pour achat d'armes et de chevaux.

Pour arréter cette agitation qui gagnait le Haut-Poitou, Catherine deMédicis se hâta de remplir par la paix le vide qu'avait causé la mort du vainqueur de Dreux. Elle la négocia avec Condé dans l'île aux Bœufs (charmante île de la Loire à peu

de distance d'Orléans) et dès le 13 mars, veille de la signature du traité, elle en informait du Lude, gouverneur du Poitou.

Enfin, le lendemain 14, était signé le traité de pacification publié le 19 sous la forme d'un édit royal et connu sous le nom de : Paix d'Amboise (1563). Cet édit accordait l'exercice de leur culte, dans leurs manoirs, à tous les barons, hauts justiciers et autres gentilshommes, y compris leurs familles et leurs vassaux. La bourgeoisie et le peuple furent réduits à une seule ville par bailliage, indépendamment des villes occupées par les huguenots avant la conclusion de la paix. Ordre fut également donné dès le 17 mars, de mettre en liberté tous les prisonniers détenus « tant pour le faict de relligion que pour avoir porté les armes. »

Le calme qu'on attendait de la paix d'Amboise ne fut pas de longue durée. Dans les villes où les catholiques avaient le dessus, ils refusaient d'observer l'édit à l'égard des protestants et les troublaient dans l'exercice de leur culte ; dans les villes au contraire où les protestants étaient restés les plus forts, ils gardaient les églises et continuaient les prêches dans les lieux où l'édit de pacification les interdisait. On n'aurait qu'à choisir parmi les nombreux exemples d'une intolérance égale des deux côtés. - Quelques exemples suffiront. A la faveur de la paix dit d'Amboise, le ministre du Moulin put recommencer à Fontenay, dans le temple du Puits de Lavau, ses prêches ordinaires jusqu'à Pâques 1564. A cette époque le comte du Lude, arrivant dans cette ville, les fit cesser malgré le traité d'Amboise et la déclaration de Rouen (14 septembre 1563), qui portait amnistie pour le passé, et confirmait aux protestants la liberté de conscience. A Nantes, nobles, bourgeois et manants suppliaient le roi de ne pas autoriser les prêches ni dans leur ville ni dans les faubourgs..

Au même moment deux prêtres étaient tués à Argenton par les protestants, et dans la région de Thouars, le service religieux était en fait interdit aux catholiques qu'on molestait à chaque instant.- Les prêtres étaient surtout l'objet de l'animadversion des réformés qui, il faut savoir le reconnaître, s'attaquaient néanmoins de préférence aux églises, aux vases sacrés, aux ornements sacerdotaux.

Résumons, d'après les manuscrits de Dom Fonteneau, les faits les plus saillants de ces débuts sinistres et lugubres, où sous prétexte de religion, se satisfaisaient souvent des vengeances particulières, où des bandits, sans croyances religieuses, ralliés pourtant à un drapeau quelconque, sentant le présent leur appartenir, en usaient largement.

Le 24 décembre 1563, le curé d'Angles est frappé à la tête par Tanneguy du Bouchet, seigneur du Poiroux et de Saint-Cyr-en-Talmondais.

Le 4 mai 1514, le curé de Saint-Germain-l'Aiguiller déclare qu'il ne peut dire la messe dans sa paroisse, parce que les habitants de Mouilleron-en-Pareds menacent de lui couper la gorge s'il le fait.

Le 14 octobre, l'église des Lucs est transformée en écurie par les hommes, de Jean Roux, seigneur de la Dangère, la porte brûlée ainsi que celle de la cure. - Quelques semaines auparavant, le tabernacle et les fonts baptismaux de Saint-Cyr-en-Talmondais avaient été brisés; l'église de Tillay détruite, et la cure de Redoux ruinée. - Des faits de même nature s'étaient produits au Petit-Bourg-sous-la-Roche, où les deux vicaires avaient été maltraités, à Saint-Michel-Mont-Mercure, Rocheservière, Longeville, Nieul-le-Dolent, Le Girouard, Saint-Vincent-Sterlange, Puybelliard, Bessay, Le Poiroux, Bournezeau, Puymaufrais. A Saint-Martin-Lars, le seigneur de Puythumer faisait faire le prêche dans l'église par un valet et jouissait des revenus de la cure. - A la Bretonnière et à Mouchamps, les églises où l'on ne célébrait plus le culte catholique étaient devenues des réceptacles d'ordures.

L'exercice du culte catholique n'avait plus lieu non plus au Givre, Saint-Sornin, Montsireigne, Saint-Fulgent, Saint-Révérend, Froidfond, Saint-Paul-Mont-Penit, Falleron, Laudevieille, Nesrny, Saint-Gervais, Chavagnes-en-Paillers, etc. ; le 1er juillet 1566 l'évêque de Luçon était obligé derequérir l'exercice du droit séculier pour pouvoir rétablir le service divin à La Bretonnière, Saint-Cyr-en-Talmondais, Bessay, Sainte-Gemme-la-Plaine, etc.

 

Retour haut de page

CENSURE FAITE PAR DES MAGISTRATS ET DES PRÉLATS

SITUATION TENDUE. - APPARITION DE LA PRESSE. -
ATTAQUE DU CHÂTEAU DE BEUGNÉ. -
LES PROTESTANTS REPOUSSÉS SUR MAREUIL, TALMONT ET MARANS

 

Il nous serait agréable de pouvoir déchirer ces pages sanglantes de notre histoire, si notre rôle ne devait pas être de dire toute la vérité pour l'instruction de l'avenir. Nous déplorons profondément ces atrocités sans nom, commises souvent sur des enfants et sur des femmes, et nous n'hésitons pas à les blâmer sévèrement, mais nous devons constater une fois de plus, que cette révolution politique et religieuse a eu pour cause des abus que les gouvernants n'avaient pas su prévoir.

Ecoutons à ce sujet. ce qu'en dit le grand historien de Thou. Le 5 juillet 1561 L'Hospital, accompagné de Charles de Marillac, archevêque de Vienne, déclarait devant le parlement assemblé, que la corruption s'était glissée dans tous les ordres de l'État, qu'il fallait d'abord « convenir que les vices des gens de l'Église avaient donné lieu a de grands scandales..., que la noblesse n'étant point payée par le roi, se croyait en droit de vexer le pauvre peuple..., qu'enfin le peuple, répandu dans les campagnes, avait des mœurs corrompues, vivant sans principes et sans instruction, parce que ceux à qui ils étaient soumis étaient plus occupés de la perception des dîmes et des offrandes que du salut des âmes. » Au mois de décembre de la même année, devant les États réunis à Orléans, le Grand Chancelier tenait le même langage.

Le 21 août suivant, devant la cour assemblée à Fontainebleau, l'évêque de Valence, Jean de Montluc, reconnaissait qu'une étrange confusion régnait dans les ordres de l'État, que « de là étoient nés de grands troubles qu'on ne pourroit calmer qu'après avoir donné la paix aux consciences. »

Laissons aussi la parole à l'un des plus remarquables et des plus saints prélats de France, Mgr de Beauregard, évêque d'Orléans, et vicaire général de Luçon au moment de la révolution de 1793 ; son témoignage du moins ne sera pas suspect. « Il faut l'avouer, dit-il, le désordre était grand parmi les gens d'Église. Il égalait son ignorance et l'inconduite des prêtres, la licence de leurs mœurs, justifiaient sinon les violences dont ils étaient les victimes, au moins un prétexte dont les novateurs se servaient contre le clergé pour justifier leurs plaintes. »

Celui du diocèse de Luçon n'était point non plus exempt des inculpations qui retentirent contre tous les ministres de l'Église catholique, et Monseigneur Thiercelin s'en plaignit lui-même au Chapitre dans une réunion générale du mois d'octobre 1568 (1). Pour être abbé il n'était pas nécessaire d'avoir fait des vœux monastiques ni même d'être prêtre. Il suffisait d'être bien apparenté. Dans les hautes sphères de l'Église, le cumul des bénéfices avait été à la hauteur d'un principe. Un évêque de Maillezais, Pierre d'Accolti, posséda tour à tour où à la fois onze évêchés.

La haine entre les catholiques et les protestants, avivée par la presse qui apparaissait pour la première fois dans nos luttes et s'insinuait partout comme la lumière, survivait aux désastres, aux trêves, aux traités de paix, et les deux partis cherchaient à se surprendre.

Dans un conciliabule tenu à Mouilleron-en-Pareds, les protestants ayant appris que le sieur de la Roussière, marié avec la

nièce du comte du Lude, avait fait arrêter et conduire à Poitiers un de leurs ministres, Jean Paillat, prêtre renégat, se décidèrent d'attaquer son château, sis dans les paroisses de Beugné-Saint-Maixent. - A cette nouvelle et pour faire diversion, le comte du Lude dirige, le 30 novembre 1567, des troupes sur Mareuil, occupé par le protestant Cacaudière, qui, obligé de battre en retraite, se retire sous les murs de Talmont, après avoir subi un premier échec devant Saint-Vincent-sur-Graon.

Harcelés par du Lude, les protestants purent néanmoins se réfugier dans Marans, d'où ils ne cessèrent de diriger des reconnaissances vers le Langon, le Gué-de-Velluire et le Poiré-deVelluire, où ils essuyèrent une cruelle défaite au mois de février 1568.

 

Retour haut de page

NOTES:

(1) Voir l'ordonnance rendue à ce sujet dans notre Histoire des guerres de religion, T. I, pages 125 et 126.

 

REPRÉSAILLES A POUZAUGES. - RÉSISTANCE HÉROIQUE DU CHANOINE CHANTECLERC A LUÇON. - MEURTRES ET PILLAGES

 

Pendant ce temps-là, les protestants du bocage ne demeuraient pas inactifs, et le 13 décembre 1567, les églises de Pouzauges et du vieux Pouzauges étaient dévastées par plusieurs gentilshommes en présence du pasteur Moreau.

En apprenant ce nouveau méfait, du Lude enjoint au capitaine du château de Sainte-Hermine et à ceux des baronnies et châtellenies de la Chaize-le-Vicomte, Luçon, Mareuil, Les Moutiers, Pouillé, Mouzeuil, Nalliers, Saint-Martin-sous-Mouzeuil de courir sus aux protestants qui infestaient la région du Langon, dont ils venaient de brûler en partie l'église mise préalablement au pillage ainsi que celle de Mouzeuil. - Après avoir, le 18 février 1568, pillé le Gué, Le Poiré, Velluire et l'Anglée, ils vinrent le lendemain, sous la conduite de Boisseau et de Sauvage, mettre le siège devant Luçon. Cette ville, dont les murs avaient été endommagés pendant la guerre de Cent ans, était presque sans défense ; la cathédrale et l'évêché avaient pourtant encore quelques fortifications. Là une résistance énergique les attendait.

Vainement le chapitre avait cherché un capitaine pour lui confier la garde de l'église. Salo de Beauregard et le sieur du Sableau ne s'étaient pas rendus à l'appel qui leur était fait.

Le péril était extrême : les chanoines prirent différents déguisements et se cachèrent.

Un seul resta, c'était le valeureux Chanteclerc. Renfermé avec quelques soldats de la garnison de Fontenay dans les fortifications qui protégeaient la cathédrale, il attendit bravement les assaillants commandés par Jean Boisseau et par Trousseau.

Chanteclerc ayant eu dès le début la main droite emportée, se mit à tirer de la main gauche avec tant d'adresse que tous ses coups atteignaient le but. Pleins de rage, les calvinistes entassent aux portes de l'église des matières inflammables et y jettent de la résine pour activer le feu. Les portes s'embrasent et tombent, mais un mur élevé à l'intérieur de l'église en défend encore l'entrée. Irrités d'une telle résistance, ils s'aident de piques et de pieux, et à la lueur des cierges, cent catholiques, parmi lesquels Pierre Maré, Germain Amand, Maurice Massiot sont passés au fil de l'épée. Mathurin Rond, choriste, et le brave Chanteclerc sont pendus. Sans respect pour la mort, le corps de ce dernier, pris pour cible, est criblé de balles.

Ils n'en restèrent pas là : les vitraux furent brisés, les serrures volées, les ornements, les livres brûlés, les six cloches de la cathédrale et les quatre de Saint-Mathurin brisées, emportées par fragments. L'évêché, l'église paroissiale de Saint-Philbert, la chapelle de l'Aumônerie et les maisons des chanoines furent aussi brûlées.

 

Retour haut de page

LE COMTE DU LUDE S'AVANCE POUR SECOURIR LUÇON ET POURSUIVRE L'ARMÉE PROTESTANTE. - ENGAGEMENTS DE MARANS, SAINTE-GEMME-LA-PLAINE, ETC. - SACS DE DIVERSES ÉGLISES ET ABBAYES. - RÉSISTANCE HÉROIQUE DE HAUTECOMBE ET DE SEPT BOURGEOIS DE FONTENAY

 

Cependant le comte du Lude, en apprenant ces sinistres événements, s'avançait pour secourir la ville, que les protestants se hâtèrent de quitter précipitamment. - Après avoir subi un échec devant Sainte-Hermine, ils purent néanmoins se réfugier dans Marans. - Des attaques, dirigées par du Lude, étant demeurées infructueuses, les protestants enhardis, se portèrent à de nouvelles exactions « et ne cessèrent de faire brûler églises, prieurés, cures et autres maisons bénéficiaires. »

Citons au hasard, Pouillé, Petosse, Bournezeau (8 avril 1568) ; les Moutiers-sur-le-Lay (28 février 1568) (1) ; Lairoux, La Chaize-le-Vicomte, Aubigny, La Boissière-des-Landes, Nesmy, Saint-André-d'Ornay, Saint-Florent-des-Bois, Sainte-Flaive-des-Loups, Les Moutiers-les-Mauxfaits, La Merlatière, Rocheservière, Les Lucs, Saint-Denis-la-Chevasse, La Grolle, Lerrière, Beaufou, Saint-Georges-de-Pointindoux, Chaillé-les-Ormeaux, Montaigu, Ardelay, etc.

 

L'église de Saint-Jean-de-Montaigu. (Cliché Aug. Douillard de Montaigu.)

 

La capitale du Bas-Poitou ne fut pas non plus épargnée : du 28 août au 5 septembre, l'héroïque commandant Hautecombe et sept bourgeois, qui s'étaient jetés dans le château, y résistèrent pendant plusieurs jours à toute une armée protestante, mais menacés de se voir incendiés, ils se rendirent à Puyviault, qui leur avait promis la vie sauve.

Les excès de tous genres, qui malheureusement avaient signalé la première entrée des protestants dans Fontenay devaient se renouveler et compléter la désolation de la malheureuse ville. Ses monuments religieux furent encore incendiés, et Notre-Dame, abattue en partie le jour de la prise du château (15 septembre 1568), après avoir vu disparaître ses dernières richesses, eut ses voûtes en pierre presque complètement démolies et ses piliers sapés. Les statues des rois qui ornaient les niches furent brisées. L'église Saint-Jean eut le même sort ainsi que la chapelle Sainte .Marguerite, située sur le champ de foire (l'emplacement actuel du Cheval-Blanc).

 

Refectoire de l'abbaye de Saint-Michel-en-l'Herm.

 

Après le sac de Fontenay, les protestants vainqueurs, poursuivirent leurs exploits sanguinaires, pillant et brûlant sans pitié les monuments religieux qui se trouvaient sur leur passage. La désolation régnait partout dans les villes comme dans les campagnes, et l'évêque de Luçon lui-même se voyait contraint d'abandonner son palais épiscopal en cendres, après avoir fait transporter quatre pipes, remplies de papiers et des objets les plus précieux dans l'abbaye de Saint-Michel-en-l'Herm. Ce monastère, qui était alors la place de sûreté des catholiques de cette région, et qui ,jusque-là semblait avoir échappé aux vandalisme des protestants, allait bientôt partager le sort commun et tomber lui aussi sous leurs coups. Malgré l'héroïque résistance du sacristain Chateaupers, l'abbaye fut, après un siège meurtrier, prise par les troupes de Pierre des Vilattes, seigneur de Champagné-les-Marais, gardé par un traître (3 et 8 janvier 1569.)

 

La Tour du Vidame. D'après un cliché de M. Arsolier.

 

Les abbayes de Lieu-Dieu en Jard, des Fontenelles, d'Angles, de Saint-Jean-d'Orbestier, de Bois-Grolland, de Sainte-Croix-de Talmont, furent dévastées et la plupart des chanoines massacrés. En même temps furent ruinées les églises du prieuré de Mareuil, de Sainte-Radégonde, de Jard, de Saint-Hilaire-de-Talmont, de Longeville, de Notre-Dame-des-Lucs, de Beaufou, de Saint-Christophe, de Grues, de Saint-Denis-du-Payré, de Moricq, de l'Hermenault, de Sainte-Hermine.

 

Retour haut de page

NOTES:

(1) Le château de la localité où résidait l'évêque, mis au pillage une première fois, fut de nouveau livré à feu et à sang dans la nuit du 7 au 8 avril 1568.

 

SIÈGES DE TIFFAUGES (15 Mars 1569), DE MONTAIGU (24 Mars 1569). - LA GRÈVE. - L'ILE-D'ELLE. - VENTE DE BIENS ECCLÉSIASTIQUES. - BATAILLE DE JARNAC (13 Mars 1569). - PRISE DE BOURNEZEAU ET DE L'HERMENAULT. - SIÈGE DE NIORT (Juin 1569). - LA GARNISON DE FONTENAY SE RETIRE A MARANS

 

En même temps, au nord, Rouhaud du Landreau, zélé catholique, après avoir été non moins fervent protestant, attaquait Tiffauges, qui appartenait au vidame de Chartres et s'en emparait. - Quelques jours plus tard, par ordre du duc d'Anjou et sur les pressantes sollicitations de du Landreau, un corps de trois mille hommes d'infanterie, sous le commandement de Puy-Gaillard et de Bouillé, gouverneurs de Nantes et d'Angers, vint assiéger Montaigu, défendu par du Plessis la Gayne. La garnison de la ville, qui n'était que de cinquante hommes, n'ayant pu être secourue à temps, abandonna la brèche et se sauva dans le château : la ville fut prise et saccagée. - Le château se rendit quelque temps après, à condition que chacun aurait la liberté d'emporter ses effets. Cette capitulation, bien qu'accordée, ne fut point exécutée ; on dépouilla la plupart des protestants, et on en arrêta plusieurs qui furent obligés de payer une rançon. Triste et misérable emploi de la force brutale, qui diminuait la force morale. du parti qui l'imposait.

Le 12 octobre de la même année, le château de la Grève en Saint-Martin-des-Noyers, qui appartenait aux Chabot de Rocheservière, était pris par les catholiques, qui sur ces entrefaites s'emparaient aussi de l'Ile-d'Elle.

Vers la même époque, les protestants, maîtres de Luçon, procédaient à la vente de plusieurs biens ecclésiastiques appartenant aux évêchés de Luçon et de Maillezais,- et commettaient à cet effet Jehan de la Valade, ministre à Fontenay, ainsi qu'il appert d'un acte du 19 mai 1569, que le feudiste Maugas fit insérer en 1787 dans les Affiches du Poitou.

Pendant que les protestants aliénaient les domaines ecclésiastiques et se concertaient avec les palatins d'Allemagne, le duc d'Anjou s'avançait vers la Charente afin d'assaillir les protestants avant qu'ils eussent reçu d'autres renforts qu'ils attendaient, l'un du Quercy, l'autre de l'Allemagne. Le 13 mars (1569), il livrait au prince de Condé, qui devait y trouver la mort, la sanglante bataille de Jarnac, où devait périr aussi l'élite des gentilshommes protestants et catholiques. - En même temps d'Andelot, frère de Coligny,.essayait vainement de s'emparer de Montaigu et de Clisson. - Moins heureux furent Bournezeau, où était détenu le huguenot Frouard, procureur du roi, homme d'une rare activité, et l'Hermenault, dont le château, résidence d'été des évêques de Maillezais, fut livré au pillage (30 avril 1569).

Coligny avait eu à peine le temps de donner quelques larmes au souvenir de son frère bien aimé d'Andelot, mort à Saintes, le 27 mai 1569, que déjà un nouvel appel aux armes se faisait entendre. Le comte du Lude, secondé par du Landreau et de Béjarry de La Roche-Louherie, se mit à la tête d'un corps de troupe de cinq mille hommes appuyés par huit pièces d'artillerie, et entreprit de faire le siège de Niort, qui fut levé après quatorze jours d'attaque (20 juin - 3 juillet 1569).

Cet insuccès de du Lude causa une si grande frayeur à la garnison de Fontenay, qu'elle crut prudent de se retirer sur Marans.

Aussitôt les réformés mirent de nouveau la capitale du Bas-Poitou en état de défense : ils réparèrent les murailles, recreusèrent les fossés et en chassèrent presque tous les catholiques.

 

Retour haut de page

PRÉLUDES DE LA SAINT-BARTHÉLEMY. - BATAILLE DE MONTCONTOUR (3 Octobre 1569). - REPRISE DE NIORT ET DE LUSIGNAN. - FONTENAY ÉVACUÉ PAR LES PROTESTANTS (11 Octobre 1569). - MARANS PRIS ET REPRIS PAR LES DEUX PARTIS. - AFFAIRE DE L'ILE-D'ELLE. - GUÉ-DE-VELLUIRE, BEAUVOIR, ETC

 

La guerre civile continuait à sévir non seulement en Bas-Poitou, mais aux confins de la province, en Aunis, où l'on se battait et s'assassinait. - A Orléans, le 21 août 1569, la plèbe fanatique avait forcé les prisons, où les protestants étaient entassés pêle-mêle, et en avait égorgé trois cents, parmis lesquels des femmes, des enfants, des vieillards, des pasteurs qui furent torturés jusqu'à la mort, avec des inventions, des variétés et des redoublements inouïs de férocité qui devaient, trois jours après, être dépassés à Pau par Montgommery. - Le 7 septembre, Coligny avait été obligé de lever le siège de Poitiers. - A Montcontour, 3 octobre 1569, le duc d'Anjou avait battu les protestants commandés par Henri de Navarre et Coligny. - La Brosse, lieutenant du calviniste de Mouy, lâchement assassiné par Maurevel, avait abandonné Niort, et le baron de Mirambeau avait rendu Lusignan à Lansac, son proche parent.

Le bruit de ces échecs retentit douloureusement dans l'âme des réformés de Fontenay qui, dans la nuit de la Saint-Venant (11 octobre), abandonnèrent en toute hâte la ville pour se retirer à Marans. - Le capitaine d'Asnières, qui commandait au Langon, se hâta de rentrer dès le lendemain à Fontenay, dont vint prendre possession, le soir même, au nom du roi, Puygaillard, son lieutenant, qui commandait le camp de la Châtaigneraie. Jehan de Montsoreau en ayant été nommé gouverneur, se hâta de piller la maison du ministre Claude du Moulin et de transformer le temple en écurie pour y loger ses chevaux.

Marans, où s'était réfugié Puyviault, devait avoir bientôt le même sort que Fontenay. L'Ile-d'Elle, le Gué-de-Velluire, Beauvoir-sur-Mer tombaient également aux mains des catholiques, pendant que du Lude, campant au passage du Braud, faisait des levées d'hommes à Champagné-les-Marais, Puyravault, Sainte-Radégonde-des-Noyers.

Au commencement de l'année 1570, les protestants ne possédaient pour ainsi dire plus aucune place dans la province du Poitou, que du Lude et du Puygaillard parcouraient en tous sens, et leur cause semblait bien compromise dans notre pays. Heureusement pour eux que La Noue, maître de la Rochelle, disposait de puissantes forces qui, bien dirigées, allaient ramener la victoire sous les plis des drapeaux des réformés.

La Noue, sur les conseils de Scipion Vergany, célèbre ingénieur qui avait fortifié La Rochelle et dirigé l'attaque de Saint-Michel-en-l'Herm, s'empare de Maillé et de Marans (27 février 1570). - La Grève, le Gué-de-Velluire, Le Langon, Luçon et Mareuil tombent aux mains des protestants, qui massacrent les garnisons et y exercent toutes sortes de représailles.

 

Retour haut de page

SIÈGE ET PRISE DES SABLES-D'OLONNE PAR LA NOUE-BRAS-DE-FER (16 Mars 1570). - LUÇON ENLEVÉ AUX PROTESTANTS. - BATAILLE DE SAINTE-GEMME-LA-PLAINE. - REPRISE DE FONTENAY PAR LES PROTESTANTS (21 Juin 1570). - DÉPRÉDATIONS DIVERSES

 

Encouragé par ces succès, Puyviault se décide à attaquer les Sables-d'Olonne, défendu par du Landreau, qui, à la tête de quatre vaisseaux bien équipés faisait continuellement des courses sur les Rochelais. - Le 15 mars 1570, les assiégeants attaquèrent les retranchements incomplets élevés à la hâte par les Sablais. Le combat fut terrible : les protestants, animés par l'espoir du butin, les catholiques par la crainte de perdre et leur vie et leurs biens. Du Landreau animait les Sablais par son courage et par son exemple ; mais le nombre devait l'emporter, et le jeudi 16 mars, après un assaut meurtrier, la ville fut prise et pillée par une soldatesque effrénée qui ne respecta rien. Quatre cents catholiques furent tués et beaucoup faits prisonniers.

Les protestants y trouvèrent trente canons, quarante navires ou barques et « tant d'or et d'argent qu'à peine purent-ils l'emporter. »

Landreau, qui avait pu se sauver, fut pris dans le marais où il était tombé de cheval, et il allait être mis à mort, sans la prière du roi, du maréchal de Montmorency, et surtout sans la menace qu'on fit de faire subir au marquis de Renty, gentilhomme protestant fait prisonnier à Bourges, le même sort qu'aurait du Landreau.

Les places du Bas-Poitou, de nouveau menacées, demandèrent du secours à Puygaillard, commandant sous le comte du Lude.

A la tête de quatre mille hommes il reprend Luçon, fait fortifier les principales levées du marais à Triaize, La Charrie, Moreilles : puis après avoir laissé dans Luçon quatre compagnies aux ordres de Mascaron, il divise son armée et inquiète Niort, Saint-Maixent et Bressuire.

La Noue, informé de ce qui se passait à Luçon, part de La Rochelle le 14 juin 1570 avec des forces imposantes qui, le 15 juin vinrent se heurter près de Sainte-Gemme-la-Plaine, aux catholiques commandés par Puygaillard.

Le combat fut acharné de part et d'autre ; quatre fois les troupes de Puygaillard furent repoussées, quatres fois elles furent ramenées au combat avec un nouvel acharnement ; mais ses escadrons devaient se briser sur le front de l'armée calviniste, qui fit 800 prisonniers ; 500 catholiques avaient péri dans la mêlée.

Enhardis parles succès remportés à Sainte-Gemme, les protestants vinrent, le samedi 17 juin 1570, mettre le siège devant Fontenay, défendu par une poignée de braves. Ces braves avaient pour chefs le commandant breton Bompas, à la tête de quatre compagnies de gens de pied, et le maire Nicolas Rapin, dont la compagnie protégeait le château.

Après une résistance énergique, la ville dut capituler le 24 juin et se rendre aux protestants (1).

Peu de jours après, le Gué-de-Velluire eut le même sort pendant que les protestants commettaient toutes sortes de déprédations et de violence au Langon, à Mouzeuil, Luron, Nalliers, l'Hermenault.

Retour haut de page

NOTES:

(1) C'est au cours de ce siège que l'intrépide capitaine protestant La Noue eut le bras gauche cassé par un coup d'arquebuse. - L'amputation de ce membre fut faite à La Rochelle, en présence de la reine de Navarre. - Un ouvrier fort adroit remplaça le membre absent par un membre en fer, d'où le surnom de La Noue Bras-de-Fer que lui avait conservé l'histoire et que porte une rue de Fontenay-le-Comte.

 

LA SAINT BARTHÉLEMY ET SES CONSÉQUENCES EN BAS-POITOU. - MISE A MORT DE PLUSIEURS GENTILSHOMMES BAS-POITEVINS. - ÉCHEC DU DUC D'ANJOU DEVANT LA ROCHELLE

 

La prise de Fontenay avait singulièrement irrité Charles IX. Le roi voyait avec peine la capitale du Bas-Poitou aux mains des protestants qui avaient, sur l'ordre du prince de Condé, transformé Notre-Dame en magasin à fourrages, et il n'attendait qu'une occasion favorable pour reprendre cette place qui commandait à un ressort immense, dont le produit s'élevait à deux cent mille livres. A cette époque où le manque de parole était trop souvent de règle, l'édit de pacification donné à Saint-Germain-en-Lay le 8 août 1570 ne devait guère gêner le roi, qui déjà songeait à la Saint-Barthelemy.

En effet, malgré le mariage d'Henri de Bourbon avec la belle Marguerite, sueur du roi, malgré la présence à la cour des principaux chefs protestants, la perte des réformés était imminente. La sécurité au milieu des fêtes, la haine de la maison de Lorraine contre Coligny, toute vivante dans le cœur d'Henri de Guise le Balafré, fils du dernier duc, l'animosité des partis, les craintes qu'on inspirait au roi sur sa sûreté, tout devait servir pour la consommer.

Dès le 22 août, c'est-à-dire quatre jours après le mariage de celui qui fut plus tard Henri IV, Paris s'était éveillé comme un lion, et secouait sa crinière. Les quais, les remparts, les ruelles, les impasses, les bouges, les écuries des seigneurs conversaient de meurtres comme le Louvre.

Enfin la nuit de la Saint-Barthélemy marquée pour la vengeance de Catherine est arrivée ; les assassins sont prêts, l'horloge du Louvre donne le signal et dans un instant, selon l'effroyable expression de Tavannes « la mort et le sang courent les rues de Paris. »

Plusieurs gentilshommes poitevins périrent dans cette affreuse boucherie. Le plus remarquable, Puyviault, dont nous avons déjà parlé (1) et qui avait risqué vingt fois sa vie ne devait pas trouver grâce devant les sicaires. Il fut jeté dans la Seine, et un ignoble pamphlet, lancé après l'exécution, mentionne sa mort de la sorte :


Comme les autres, Pluvyau,

A faulte de vin, beut de l'eau.

 

Soubise, jeune encore, et qui avait un procès avec Catherine de Parthenay (2) sa femme, qui réclamait le divorce pour cause d'impuissance de son mari, fut soustrait à l'ignominie de cette mesure par la Saint-Barthélemy. Lui à qui une femme immodeste disputait le titre et la qualité d'homme, se défendit comme un lion et tomba percé de coups de piques, de dards et de poignards.

De Mornay, plus heureux, put se sauver ainsi que Bastard de la Cressonnière et Agrippa d'Aubigné, réfugié pour cause de duel à Montargis. C'est là que s'était retirée Renée de Ferrare, la noble fille de Louis XII, une de ces douces figures sur lesquelles, dans ce désolé XVIe siècle, les regards aiment à se reporter, et qui ouvrit à deux battants toutes les maisons de son apanage aux proscrits et aux persécutés.

Le massacre, loin d'écraser le calvinisme, multiplia ses partisans et les rendit plus furieux. Ils se renferment dans la Rochelle, qu'allait bientôt investir à la tête d'une armée nombreuse le duc d'Anjou. Neuf assauts successifs, qui devaient coûter la vie à vingt quatre mille catholiques, ne purent avoir raison de l'héroïque cité. Honteux de cet échec, le duc d'Aujou partit précitamment pour la Pologne dont il venait d'être élu roi.

 

Retour haut de page

NOTES:

(1) Seigneur de Saint-Sulpice-en-Pareds, où il était né vers 1536. - Il avait épousé, au mois de juin 1570, son amie d'enfance, Madeleine Voussart de Brebaudet, paroisse de Saint-Cyr-des-Gâts. Les Archives de Fontenay possèdent deux testaments de Marie Voussart.

(2) Morte au parc de Mouchamps, le 26 octobre 1631, à l'àge de 77 ans. On lui attribue une apologie d'Henri IV dont elle était l'amie.

 

REPRISE DE FONTENAY PAR LES PROTESTANTS (24 Février 1571.) - LES HERBIERS, MORTAGNE, MELLE ET TALMONT ONT LE MÊME SORT

 

Moins heureux que La Rochelle, Fontenay devait voir encore les protestants dans ses murs. Dans la nuit du 24 février 1574 et à la faveur de l'obscurité, Giron de Bessay, Saint Etienne et Bastard de la Cressonnière s'approchent de l'enceinte avec précaution. Le capitaine La Ronde, qui commandait la garde de nuit, s'était pourtant attardé plus que de coutume, lorsque tout-à-coup il voit monter sur les remparts les premiers assaillants. Il n'hésite pas à se jeter du haut des murailles, se casse la jambe, et se met à crier de toutes ses forces pour signaler le danger. Tout le monde dormait ; la ville fut prise et pillée, beaucoup de maisons abattues, et l'argent du roi remis aux protestants.

Les Herbiers, Mortagne-sur-Sèvre, Melle et Talmont eurent le même sort.

 

Retour haut de page

PREMIER SIÈGE DE FONTENAY PAR LE DUC DE MONTPENSIER (7 Mai 1574). - NOUVEAU SIÈGE PAR MONTPENSIER, QUI S'EMPARE DE LA VILLE (18 Septembre 1574)

 

La prise de Fontenay avait irrité le duc de Montpensier, qui dès lors n'eut plus qu'un souci ; celui de l'enlever aux protestants. Le mercredi 12 mai 1574, le prince, avec six pièces de canon, sept mille cinq cents hommes de pied et trois mille chevaux, vint camper devant Charzais « laissant libre la porte et toute l'avenue de Saint-Michel, pour donner aux protestants quelque occasion de sortir et de se retirer à La Rochelle. »

Six pièces de canon braquées près des Jacobins tirèrent sans discontinuer contre les retranchements élevés dans le faubourg des Loges, les jeudi, vendredi, samedi et mardi. A la fin de cette dernière journée, le canon avait fait une brèche assez large pour que dix hommes pussent s'y présenter du côté des forts. Les dix premiers qui tentèrent de reconnaître le ravelin furent tués par les soldats de La Noue, dissimulés derrière une muraille de jardin percée d'un trou. Malgré cet insuccès, les catholiques ne se découragèrent pas, et de nouveau se préparèrent à donner aux Loges un assaut vigoureux. Cet assaut fut couronné de succès, et le 18, la reddition des Loges fut décidée.

Après s'être abondamment repue dans ce faubourg populeux où les vivres étaient abondants, l'armée de Montpensier s'approcha des murs de la ville et résolut d'en faire le siège.

Le dimanche 23 mai, au matin, quatre pièces de canon ouvrirent un feu meurtrier contre les portes des Loges et de la Fontaine. Les deux tours qui les protégeaient, et la courtine s'étant écroulées sur deux endroits, les assiégeants s'élancent à l'assaut des remparts, mais devant le feu nourri des assiégés ils se retirent, non sans avoir subi de grandes pertes. A la suite de cet insuccès, le duc de Montpensier lève précipitamment le siège de Fontenay dans la nuit du 26 au 27 mai, et se dirige avec son armée vers Niort, laissant aux portes de la ville cent cinquante des siens morts sans sépulture et trois cents blessés, dont plusieurs gentilshommes du pays.

La trève de Thairé, près La Rochelle, conclue pour deux mois, le 27 juin 1574, entre La Noue et l'abbé de Gardaigne, représentant la reine régente, venant de prendre fin, le duc de Montpensier, après avoir réuni son conseil à Vouillé, près de Poitiers, se résolut à venger son infructueuse tentative contre Fontenay.

Le 2 septembre 1574, huit pièces de canon commencèrent à battre sans désemparer les Loges en trois endroits. L'assaut, dirigé par Puygaillard fut couronné de succès ; mais, ce premier échec ne découragea point les réformés, qui firent deux ou trois sorties, tuant beaucoup de monde au régiment de Jacques Clermont, sieur de Bussy (1).

Pendant ce temps Montpensier, qui logeait dans la rue Sainte-Catherine (aujourd'hui Benjamin Fillon) faisait canonner la flèche de Notre-Dame, dont la flèche se rompit.

Malgré l'énergique défense des assiégés, les catholiques gagnaient du terrain. Le 9 septembre, du Landreau étant arrivé de Nantes avec de la cavalerie et de l'artillerie, on commença aussitôt à canonner la grosse tour du Café Helvétique, la muraille y attenant, celle qui montait au pont aux Chèvres et celle qui reliait le fort des Dames.

Le barrage de la rivière avait été détruit deux jours auparavant.

 

Le donjon du chateau de Fontenay-le-Comte. Dessiné par B. Fillon.

 

Le 15 septembre, sur les quatre heures du soir, l'armée catholique, sous un feu meurtrier s'élance bravement à l'assaut de château et du donjon, sans résultat appréciable, mais le 16 au matin, toute l'artillerie de l'armée royale, comprenant vingt pièces de canon et une couleuvrine agrandit les brèches de la grosse tour au point que cinquante hommes pouvaient y passer de front sans être inquiétés. Vers les dix heures du matin, les Fontenaisiens voyant que la lutte devenait impossible, agitèrent des mouchoirs blancs et demandèrent à capituler, mais le duc de Montpensier, irrité de son premier insuccès et de la ténacité des protestants qui s'étaient refusés à discuter toute proposition avant la remise d'otages, l'attaque fut continuée avec neuf pièces de canon contre le château. - Enfin, sur les deux heures de l'après-midi, Touvois, de Bessay et de la Musse, conduits au quartier du prince, engagèrent avec le duc de Montpensier des pourparlers qui ne purent aboutir. - Les assiégeants ayant de nouveau ouvert le feu le lendemain matin, la ville demanda une seconde fois à capituler, ce qui lui fut accordé à de dures conditions. - Le 18, le duc de Montpensier entrait dans Fontenay, devant lequel l'armée royale avait eu 250 hommes tués et un grand nombre de blessés. Philippe de Chateaubriant fut nommé gouverneur de la capitale du Bas-Poitou, et 500 hommes eurent mission de la défendre contre un retour possible de l'armée protestante - c'était la cinquième fois que Fontenay était pris.

 

Retour haut de page

NOTES:

(1) C'est dans la rue de la Tuée qu'eut lieu le plus fort de l'action.

 

LE CAPITAINE BIGOT ET LE PASTEUR CLAUDE DU MOULIN SONT PENDUS A BENET. - NOUVEAUX MASSACRES A LUÇON. - TRISTE SITUATION FINANCIÈRE DE L'ARMÉE. - RIXES ENTRE CATHOLIQUES ET PROTESTANTS. - ÉVASION DE HENRI DE NAVARRE. - BOMBARDEMENT DE LA CHAUME

 

Le dimanche 19, le duc de Montpensier se rendit à Benet, qu'il occupa pendant une dizaine de jours et où il se distingua tristement en faisant pendre devant le château le capitaine protestant Bigot et le pasteur Claude du Moulin.

 

Le Château de Benet d'après une vieille estampe découverte par M. H. Turpault.

 

Rassurés par le succès de Montpensier, la plupart des catholiques revinrent à Luçon, mais mal leur en prit. Des calvinistes

de La Rochelle, arrivés à l'improviste pendant la messe, massacrèrent au pied des autels prêtres et laïques, emmenèrent ceux que le fer avait épargnés, et se répandirent dans les campagnes comme des vautours.

D'un autre côté, le gouvernement du roi manquant d'argent, le 3 novembre, le duc de Montpensier imposait le diocèse de Luçon pour une somme de 5.220 livres, destinée à l'entretien de son armée ; mais sur les instantes supplications de l'évêque Tiercelin, cette somme ne fut pas versée au fisc.

L'année 1575 fut plus calme en Bas-Poitou : ce qui n'empêchait pas catholiques et protestants d'en venir de temps en temps aux mains, notamment à Marans. - La garnison catholique de Fontenay ayant été licenciée par ordre du roi le 30 juin 1575, Jehan de la Haye essaya de s'emparer de cette ville par surprise, mais il ne put y réussir. La trève conclue à Champigny le 21 novembre 1575 entre le roi, le duc d'Alençon et le prince de Condé avait un peu calmé les esprits, mais ce n'était qu'une éclaircie dans un ciel toujours chargé d'orages. Avec leur cortège habituel de misères, les guerres civiles ont surtout le grave malheur de développer les haines personnelles ou religieuses, et d'habituer les partis à faire bon compte de la vie de leurs adversaires.

Le 26 février 1576, un soldat de la grosse tour de Fontenay blesse d'un coup d'arquebuse sept personnes. Le même jour à Mouzeuil, à la suite d'une rixe entre catholiques et protestants, il y eut mort d'homme.

Le 12 avril Raoul Dubois, seigneur de la Tombe-Ortige, échevin et avocat, fut assassiné sur la route de Mareuil par le seigneur de Bessay et son bâtard. - La situation était tellement troublée au commencement de mars 1576, que des lettres patentes du roi à l'évêque de Luçon n'avait pu, depuis deux ans, recevoir leur exécution, et qu'il était impossible d'assembler le clergé pour voter trois millions destinés aux frais de la guerre.

Sur ces entrefaites (3 fevrier 1576), Henri de Navarre, marié avec une femme plutôt courtisane que reine, s'échappait de la cour et revenait à la religion réformée.

Henri III, sentant la nécessité de faire la paix, accordait par l'édit de Chantenoy ou de Moulin dit : « Paix de Monsieur » 14 mai 1576, les plus grands avantages aux protestants, mais cet édit révolta les catholiques, que nous verrons bientôt lever à leur tour l'étendard de la révolte contre leurs princes et les faire périr sous le fer des assassins. Mais n'anticipons pas sur les événements.

Le 25 mars 1577, une tentative des protestants pour reprendre Fontenay ayant échoué, ne les découragea point. Au mois d'avril, après s'être emparé de vingt-cinq vaisseaux portugais qui, chargés de blés pour l'Espagne se trouvaient dans le port des Sables, ils bombardèrent La Chaume, qui se rendit avec la ville, mais quelques jours après (mai 1577), les catholiques en redevinrent maîtres ainsi que de Marans et de Maillé.

 

Retour haut de page

SEPTIÈME GUERRE CIVILE DITE DES AMOUREUX (1579-1580). - LES GRANDS JOURS A POITIERS. - PRISE ET SIÈGE DE MONTAIGU (Septembre 1580). - TRISTES RÉSULTATS DES GUERRES DE RELIGION EN BAS-POITOU A LA DATE DE 1580

 

Malgré les trois traités de paix, le Poitou était toujours un champ de bataille ouvert à tous les partis ; la longue querelle des protestants et des catholiques survivait à tous les désastres.

En septembre 1579, le président de Harlay dut, avec quatorze conseillers suivis de l'élite du barreau de Paris, se transporter à Poitiers pour y tenir ce qu'on appelait les Grands Jours. Il s'agissait de mettre fin aux brigandages de la noblesse poitevine, à laquelle « les doctrines de Calvin avaient donné des habitudes de rébellion, » et les chefs des meilleures familles convaincus « de pilleries et d'assassinats, périrent de la main du bourreau. »

Un an plus tard, et après plusieurs tentatives infructueuses, Montaigu était, à l'aide d'un stratagème, surpris par les protestants, qui couraient de nouveau aux armes sous prétexte qu'on n'exécutait pas les édits de pacification. - Cette place resta longtemps aux mains des réformés malgré diverses tentatives, dont la plus célèbre fut celle dirigée par un gentilhomme nommé de Butterie, enseigne de Jarrie. Celui-ci, dit d'Aubigné « esperduement amoureux de la sœur de Pellisonnière, ne refusa point d'acheter sa maîtresse par la trahison de Montaigu, donna rendez-vous à toute la ligue de Bas-Poitou pour se trouver devant le chasteau deux heures après minuit, promettant avec l'aide de quatre soldats, de coupper la gorge au corps de garde du chasteau, demandant d'estre secouru quand il aurait à la veüe des entrepreneurs, jetté les morts par dessus les murailles et non plus tôt », mais le complot fut découvert par d'Aubigné, et les coupables exécutés (1).

Près de cinq années de tranquillité relative succédèrent à cette levée de boucliers. Avant d'entrer dans cette période, jetons, avec l'auteur de la remarquable histoire des protestants et des églises réformées du Poitou, le regretté M. Lièvre (2), un coup d'œil en arrière sur celle qui s'est écoulée depuis le commencement des troubles. Un huguenot contemporain a fait sur des documents officiels présentés aux Elats généraux le recensement pénible des misères de la France à cette époque. Ce relevé est approximatif. Il y reste d'ailleurs beaucoup de lacunes. L'état du diocèse de Maillezais manque entièrement : celui de Luçon est incomplet. Tel qu'il est cependant, ce recensement est assez curieux pour que nous en donnions l'analyse. Dans les deux diocèses de Poitiers et de Luçon, soixante-dix ecclésiastiques, prêtres ou moines avaient été tués dans cette guerre... On ne dit point le nombre des ministres qui périrent aussi dans des massacres où à la prise des villes. Dans ces mêmes diocèses, plus de trois cent vingt gentilshommes catholiques et quatre cents de la religion réformée, avec dix mille soldats catholiques et plus de seize mille huguenots avaient trouvé la mort au milieu de ces luttes intestines. Le nombre des viols est effrayant.

Trois mille maisons avaient été brûlées ou détruites. En outre, dans le seul diocèse de Poitiers, sept cents hommes ou femmes avaient été massacrés ou exécutés par voie de justice, seize cents étrangers y avaient péri clans les combats, ainsi que quarante mille Français nés hors du Poitou.

 

Retour haut de page

NOTES:

(1) Montaigu fut démantelé l'année suivante et remis au comte du Lude.

(2) T. I, page 208.

 

LA SAINTE-UNION. - SCÈNES REGRETTABLES ENTRE CATHOLIQUES ET PROTESTANTS : DUEL, ENLÈVEMENT, MEURTRE. - MORTAGNE ET LA GARNACHE ENLEVÉS AUX CATHOLIQUES. - PLUSIEURS GENTILSHOMMES EMBRASSENT LE PARTI DE LA LIGUE

 

Sous la pression du cardinal de Lorraine, venait de se créer en France un nouveau parti qui s'organisait sous le nom de Sainte-Union ou Sainte-Ligue. Le prétexte avoué était la défense de la religion, le prétexte vrai, un intérêt politique. L'esprit de révolte et l'espoir de recommencer avec succès les grandes luttes de la féodalité animaient secrètement les principaux chefs, notamment le Balafré. Ce dernier entrevoyait même le moment où se briserait le trône royal qui ne portait plus que deux branches, l'une épuisée de sève, l'autre infectée d'hérésie ; mais il semblait par sa foi de catholique zélé et la prétention qu'il affichait de descendre de Charlemagne par la maison de Lorraine, légitimer ses menées séditieuses qui, dans le BasPoitou, lui avaient concilié plus d'un partisan.

Au nombre des ardents, se trouvait Chateaubriant des Roches-Baritaud, auquel Henri III donnait, le 27 février 1582, l'ordre de démanteler le château de Fontenay et de licencier la garnison, mais cette mesure ne fut point exécutée, et les rivalités entre les protestants et les catholiques amenaient chaque jour des scènes regrettables.

Le 27 juin 1583, bien qu'on fut en pleine paix, un duel à cheval eut lieu à Fontenay sur le carrefour du Mouton, entre cinq gentilshommes catholiques et cinq gentilshommes protestants. Après un combat acharné, qui dura plus d'une heure, il ne resta

debout qu'un jeune homme de vingt et un ans, du parti calviniste.

Quelques jours auparavant, la jeune femme de Pierre Sauvestre, seigneur de la Fuie-Goujon, près Fontenay, avait été enlevée nuitamment pendant l'absence de son mari, baillonnée et conduite en croupe à Culdebraie, sur la lisière de la forêt de Mervent, où pendant plusieurs semaines elle resta au pouvoir du capitaine La Barre, adversaire de son mari dans un duel précédent.

Quelques jours plus tard, La Barre était tué par Sauvestre et sa femme, qui se vanta d'avoir arraché elle-même le coeur de celui qui lui avait fait violence.

Une rixe terrible avait eu lieu également à Fontenay, entre catholiques et protestants à l'occasion des processions, et pendant ce temps La Boulaye courait le pays, enlevant Mortagne, La Garnache, pillant et brûlant châteaux et églises. Il ne fallut rien moins que l'énergie de Nicolas Rapin pour rétablir momentanément un peu d'ordre dans notre pays.

En effet, malgré les trèves, malgré les édits, des troubles, précurseurs d'une nouvelle crise se faisaient sentir partout. Le célèbre Duplessis-Mornay, surnommé le pape des protestants, venait de signaler à Henri III le fameux ouvrage : Stemmata, Lotharingix et Bari ducum (Généalogies des ducs de Lorraine et de Bar), qui faisait descendre les princes lorrains, non plus seulement de la lignée de Charlemagne, mais de Pharamond et de Clodion le Chevelu, et laissait deviner des conclusions analogues à celle de l'avocat David contre la postérité de l'usurpateur Capet. Henri III fit amener l'auteur, l'archidiacre Rosière, de Toul à Paris et enfermer à la Bastille. La publication de ce livre qui fut lacéré, souleva de violentes polémiques, d'autant mieux que pour beaucoup de Français, et par suite de la mort prochaine et escomptée du duc d'Anjou, le roi de Navarre, qui déplaisait fort aux ligueurs, devenait l'héritier présomptif de la couronne.

En Poitou, la noblesse, mécontente et tourmentée du besoin de faire la guerre à laquelle elle trouvait tout profit se jeta dans

la Ligue. Philippe de Chateaubriant prit la tête du mouvement avec Briaudière.

L'Etang, petit castel fortifié de la paroisse de Chavagnes-en-Paillers reçut une garnison, ainsi que Mortagne. Niort, qui venait aussi d'embrasser le parti des Ligueurs après avoir failli être emporté par Saint Gelais, envoyait à Nantes demander du secours au duc de Mercœur.

 

Retour haut de page

CONDÉ MARCHE SUR COULONGES, CHASSENON, FONTENAY. - PROTESTATIONS DE HENRI DE NAVARRE CONTRE SON EXCOMMUNICATION (6 Novembre 1585)

 

D'un autre côté Condé franchit la Sèvre, occupe Saint-Maxire, entre dans Coulonges et s'avance jusqu'à Chassenon et à Fontenay, où il offre vainement le combat à Mercœur, retranché dans le clos des Jacobins. Enfin, le soir, Condé se retira du côté de Coulonges, pendant que le duc se sauvait durant la nuit vers Nantes, et fuyait si vite qu'il abandonnait en route ses fantassins et jetait ses drapeaux dans le lac de Saint-Philbert-de-GrandLieu (19 août 1585).

Malgré l'affaire de Fontenay, les calvinistes ne possédaient plus que Saint-Jean-d'Angély et La Rochelle, que La Ligue entreprit d'affamer, et c'en était fait de l'union catholique dans l'Ouest, si d'Aubigné d'abord, puis le roi de Navarre n'étaient venus relever les espérances.

Ce dernier qui, en apprenant que Henri III s'était rapproché de la Ligue, avait conçu. une telle appréhension des maux qu'il prévoyait « pour son parti qu'elle lui avait blanchi la moitié de la moustache » venait d'être excommunié par Sixte-Quint (9 septembre 1585). Mais fier de ses droits, il ne s'inquiète pas de la bulle, en appelle au Parlement et au Concile général, et fait afficher, le 6 novembre 1585, par un serviteur hardi, une énergique protestation jusqu'aux portes du Vatican, sur les portes des églises et même sur les célèbres statues de Pasquin et de Martorio.

Tout en revendiquant hautement ses droits, le Béarnais lève des troupes en France et en Allemagne, pendant qu'Henri de Guise manœuvre La Ligue, guerroie contre le duc de Bouillon, et qu'Henri de Valois dépense deux cent mille écus d'or par année en petits chiens, en perroquets, en singes ; joue gravement au bilboquet, et découpe, pour les coller aux parois de ses chapelles, les images des livres de prières.

 

Retour haut de page

PRISE DE BROUAGE ET DE MARANS PAR HENRI DE NAVARRE. - CONFÉRENCE DE SAINT-BRIS. - MAILLEZAIS SE REND AUX PROTESTANTS. - LE DUC DE MONTPENSIER FAIT METTRE FONTENAY EN ÉTAT DE DÉFENSE (Février 1587)

 

Secondé par Condé, le roi de Navarre s'empare de la forte place maritime de Brouage et de Marans, et négocie avec Catherine de Médicis, à Saint-Bris (13 décembre 1586), pendant que Maillezais se rend aux protestants.

L'année 1587 s'annonçait donc toute chargée d'orage, et Fontenay ne pouvait plus douter du sort qui l'attendait, d'autant mieux que Henri de Navarre avait été très affecté de la prise de Marans. - Néanmoins les protestants concentraient leurs forces en Poitou. Saint-Maixent et Talmont venaient de tomber en leur pouvoir, et tout annonçait une attaque prochaine de Fontenay. - Le 24 février 1587, Louis de Gonzague, duc de Nevers, vint dans la capitale du Bas-Poitou, et donna à la Roussière les ordres nécessaires pour mettre en état de défense une place que depuis longtemps déjà, se disputaient avec tant d'acharnement catholiques et protestants.

 

Retour haut de page

 

 

Histoire de Vendée
Chapitre Précédent Table des matières Chapitre Suivant
Page d'accueil - Organisation d'activités et de séjours - Photothèque - - Patrimoine Naturel - - Visites de Monuments - Produits Régionaux - - Loisirs - Sports - Hébergement - Contactez-nous - - Infos éditeur