Histoire de Vendée

Histoire de la Vendée
du Bas Poitou en France

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CHAPITRE XXXVI

Mort tragique des principaux chefs vendéens

Le Rochejaquelein et Stofflet, etc., errent sur la rive gauche de la Loire

Exploit de Charette nommé général en chef de la Basse-Vendée. - Sa rencontre avec Henri de La Rochejaquelein

Mésintelligence des chefs. - Nouveaux combats de Charette

Prise de Noirmoutier (3 Janvier 1794). - Exécution de d'Elbée (9 Janvier 1794). - Le combat de Mouchamps

Les colonnes infernales

Le refuge de Grala près Les Brouzils

Beau trait de David d'Angers

Retour de La Rochejaquelein dans le bocage. Sa mort (29 Janvier 1794)

Prise et reprise de Cholet (19 Février 1794). - Succès et revers de Stofflet. Il se réfugie dans la forêt de Vezins

Férocité de Joly, dit le « Brutus vendéen »

Arrivée du Général Haxo

Combat des Clouzeaux. - Mort de Haxo (21 Mars 1794)

Réorganisation de nouvelles bandes royalistes. - Prise de Mortagne-sur-Sèvre par Marigny

Evacuation de Cholet, Les Herbiers, Chantonnay, La Roche-sur-Yon. - Montaigu, quartier général. - Situation critique des troupes

Affaires de Challans et des environs. - Camps de Freligné et Saint-Christophe. - Maulévrier, Les Moutiers-Les-Mauxfaits repris, etc.

Mésintelligence entre les chefs. - Entrevue de la Boulaye. - Exécution de Marigny (10 Juillet 1794)

Insuccès des Vendéens devant Challans (6 Juin 1794)

Reprise des hostilités. - Nouvelle attaque de La Châtaigneraie (12 Juillet 1794). - Affaire de Legé (17), Chateau de Boulogne, Palluau (20 Juillet)

Incursions des généraux royalistes. - Enlèvements, par Charette, des camps retranchés de La Roullière, de Fréligné et des Moutiers-les-Mauxfaits

Préliminaires de la Pacification


 

LA TERREUR EN VENDÉE. - EXÉCUTIONS

CHARETTE GÉNÉRAL EN CHEF EN BAS POITOU

MORT DE D'ELBÉE, DE LA ROCHEJAQUELEIN, ETC. -
ÉVÉNEMENTS DIVERS JUSQU'AU TRAITÉ DE LA JAUNAIE (12-18 Février 1795).

 

 

MORT TRAGIQUE DES PRINCIPAUX CHEFS VENDÉENS

 

Beaupuy se flattait, : la Vendée n'était pas morte, et la guerre m'était point terminée : la République qui le 26 décembre offrait à Nantes des couronnes civiques aux vainqueurs de Savenay, avait encore à écraser des débris palpitants, et à vaincre deux géants dans toute leur force : Charette et la Chouannerie.

Suivons d'abord jusqu'à la tombe ou jusqu'à l'échafaud les derniers chefs de la Grande-Armée.

Le prétendu évêque d'Agra fut exécuté à Angers le 4 janvier 1794. - Desessarts père fut fusillé à Feygréac. - Pirot eut le même sort. - Vingt autres aussi.

Le prince de Talmont, surpris déguisé en paysan, était traîné de prison en prison jusqu'à Laval, où à l'âge de 28 ans il était décapité devant le château de ses pères.

A peu de semaines de là Beysser et Westermann, deux généraux républicains intrépides, tous deux Alsaciens et tous deux âgés de 40 ans, étaient aussi guillotinés comme conspirateurs, et allaient bravement au supplice bras dessus bras dessous.

 

LA ROCHEJAQUELEIN ET STOFFLET, ETC., ERRENT SUR LA RIVE GAUCHE DE LA LOIRE

 

Cependant La Rochejaquelein, Stofflet, Laugerie et La VilleBaugé, séparés de leurs soldats, comme on l'a vu, erraient au hasard sur la rive gauche de la Loire, faisant le coup de feu contre les patrouilles républicaines pour leur arracher un morceau de pain   Ils couchèrent une nuit sans le savoir avec des bleus, sur la même meule de paille. Henri arriva enfin près de sa sœur à la Durbelière, et médita dans ce court repos ses dernières batailles (1)...  

 

 

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(1) Extrait de Pitre-Chevalier.

 

EXPLOIT DE CHARETTE NOMMÉ GÉNÉRAL EN CHEF DE LA BASSE-VENDÉE

SA RENCONTRE AVEC HENRI DE LA ROCHEJAQUELEIN

 

La marche de l'armée vendéenne sur la rive droite avait suspendu les opérations du général Haxo clans la Basse-Vendée (1). Le 9 novembre il sort de Nantes avec 6.000 hommes, chasse les royalistes de Port-Saint-Père et de la forêt de Princé (15 novembre), le lendemain il est à Machecoul, où il installe des fours de campagne, donne quelques jours de repos à ses troupes, se dirige de là sur Challans, où, il trouve quelques détachements ennemis qui doivent se replier sur Beauvoir. Après avoir établi à Challans des fours de campagne comme à Machecoul et, fait remettre les moulins à vent en état de service, il donne au général Jordy l'ordre de s'emparer de Bouin. Le 6 décembre, à minuit, les trois colonnes républicaines s'ébranlent, arrivent sous les batteries de Bouin, chargent baïonnette au canon les Vendéens, qui après avoir perdu 800 des leurs, se sauvent avec Charette par la route de Bois-de-Céné.

A Chateauneuf ils rallient la division Pajot, tombent à l'improviste sur l'arrière-garde d'Haxo, la mettent en déroute après trois heures de combat et vont chanter, dans l'église de Saint-Étienne-de-Mer-Morte, un Te Deum d'action de grâces.

De Saint-Étienne-de-Mer-Morte, Charette se dirige vers le Haut-Bocage, capture en route six pièces d'artillerie, des vivres et des chaussures, et le 8 décembre, rejoint aux Quatre-Chemins-de-l'Oie le général Joly, qui lui ouvre un camp républicain de 2.000 hommes en arborant la cocarde tricolore et en égorgeant toutes les sentinelles. Cette affaire laissait aux mains de l'armée vendéenne d'abondantes munitions, 45 chevaux, 1.500 fusils, avec 11 voitures chargées de vivres, etc. Le lendemain il est aux Herbiers, où il est proclamé généralissime de l'armée catholique et royale de la Basse-Vendée. Investi du pouvoir suprême,. il organise ses forces, laisse à Couëtus, à Joly et à Savin leurs divisions, choisit Denis de Norois pour chef d'état-major, de la Roberie pour commandant en second, et dirige au cœur de la Vendée l'armée la plus aguerrie qu'on y eût encore vue, grossie de tous ceux qui pouvaient fuir les atrocités de Carrier à Nantes. « Charette, écrivaient en décembre 1793 Haxo et Dutruy, nous a fait un mal horrible. Ce brigand a trouvé le moyen de déjouer la sagacité des plus habiles manœuvriers. »

Le 15 décembre, la présence de l'ennemi aux environs des Herbiers ayant été signalée au général Vimeux, ordre est donné de fouiller le pays depuis le Luc jusqu'aux Épesses. Les généraux Dufour et Guillaume sont chargés de cette mission. Le 18, la colonne de ce dernier entre dans Montaigu pour y prendre des vivres et, dès le matin, met en trois endroits le feu à la ville. Charette, pressé du côté du Grand-Luc, se porte vers la haute-Vendée pour favoriser le passage de la Loire aux Vendéens échappés au désastre du Mans. Il surprend, dans la nuit du 18 au 19 décembre, le poste de Cerizais, parcourt et dévaste la Flocellière, la Pommeraye, le Boupère, Pouzauges et Châtillon, et traverse de nouveau, le 23 décembre, le poste des Quatre-Chemins. Le 29, le partisan devenu général rencontre à Maulévrier La Rochejaquelein, le général redevenu soldat. Celui-ci confirme à Charette la destruction de la Grande-Armée, et par sa seule présence lui enlève des milliers de soldats.

 

(1) Depuis le siège de Nantes, Charette avait poursuivi la guerre à sa façon, franchissant à la gaule les fossés des marais de Challans, de Bouin, de Machecoul, de Saint-Jean-de-Monts, et traînant à, bras ses canons et son matériel, empéchant les massacres lorsqu'il le pouvait, et fermant les yeux lorsqu'ils étaient inévitables, déployant en un mot une volonté surhumaine, dans une guerre de détail si bien faite pour lui.

 

MÉSINTELLIGENCE DES CHEFS. - NOUVEAUX COMBATS DE CHARETTE

 

Encore une fois il fallait s'unir : encore une fois l'intérêt commun fut oublié !... « Suivez-moi, monsieur, dit Charette à La Rochejaquelein. » - « Monsieur, répondit La Rochejaquelein, je ne suis pas habitué à suivre, mais à être suivi. » Et il lui tourna le dos.

Charette, affaibli, quitta le Bocage et regagna les Marais du Bas-Poitou. Le 31 décembre il s'empare de Machecoul, mais Carpentier l'en chasse après deux combats furieux, les 2 et 3 janvier 1794. Pendant que Charette, rendu incapable de secourir Noirmoutier, retourne à Légé, son quartier général, Carpentier occupe Challans pour observer les mouvements de son adversaire et l'empêcher de prendre à revers les troupes destinées à l'attaque de Noirmoutier, « cette île qu'on doit, », d'après l'ordre du Comité de Salut public du 21 octobre, « reprendre ou ensevelir ».

 

 

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PRISE DE NOIRMOUTIER (3 Janvier 1794). - EXÉCUTION DE D'ELBÉE (9 Janvier 1794). -- LE COMBAT DE MOUCHAMPS

 

Le 3 janvier, pendant que Turreau, accompagné de Bouchotte et de Prieur de la Marrie, établissait son quartier général à

Beauvoir, puis à la Barre-de-Monts, les généraux Haxo et Dutruy attaquèrent Noirmoutier occupé par dix-huit cents royalistes, dont huit cents bien armés, commandés par Pineau, de Légé, Antoine, Savin, Barreau, Noël, l'Irlandais O'Birn, etc. René de Tinguy, ancien sous-commissaire de la marine, était gouverneur de l'île au nom de Louis XVII.

Les côtes et la place Saint-Pierre étaient défendues par cinquante bouches à feu dont plusieurs de gros calibre, et par des marais salants qui en rendaient les avenues étroites et difficiles. Les républicains n'avaient que trois mille hommes d'élite, avec une flottille composée d'une frégate, La Nymphe, et de dix-neuf bâtiments de transport. Les assiégés pointent une pièce de trente-six sur la frégate et la font échouer ; mais tout l'équipage se sauve à marée basse. Le général Jordy est blessé, à la cuisse ; cent hommes sont tués sur le bâtiment de transport monté par cet officier... Haxo, de son côté, traverse le passage du Gua au pas de charge, s'empare de Barbâtre, et s'avance sur Noirmoutier où la terreur est à son comble. La ville capitule, et d'Elbée arrêté avec trente des principaux chefs (1).

Mourant depuis la bataille de Cholet, il dut, subir un long et pénible interrogatoire. - « Voici donc d'Elbée ? s'écria le représentant Bourbotte en l'apercevant ». - « Oui, reprit d'Elbée, voilà votre plus grand ennemi ! si j'avais pu me tenir debout, Noirmoutier ne serait pas en votre pouvoir, ou du moins vous l'eussiez chèrement acheté ! »

Le 9 janvier 1794 il était fusillé dans son fauteuil avec René de Tinguy, Duhoux d'Hauterive, de Boisy, et Wieland, ancien chef des bataillons les chasseurs de la Manche, qui avait rendu l'île à Charette le 12 octobre 1793.

Madame d'Elbée, qui avait noblement refusé de quitter son mari, périt le lendemain avec Mme Maurin, qui lui avait donné l'hospitalité dans sa maison et qui avait partagé son dévouément. Pineau, Antoine Savin et beaucoup d'autres eurent le même sort.

Le « rasoir national » décima enfin toute la population (2) de l'île de Noirmoutier, qu'on appela l'île de La Montagne.

Le 9 janvier, au moment où d'Elbée mourait à Noirmoutier, Charette, poursuivi par le général Dutruy, arrive aux Herbiers où 3.000 hommes l'attendent : avec ces renforts il marche sur Saint-Fulgent. La garnison se retire à Mouchamps, sur le Petit Lay ; son colonel, Joba, y bivouaquait avec son régiment et deux escadrons de cavalerie. On se battit avec acharnement, et la victoire fut si incertaine que les deux partis se retirèrent avec des pertes égales.

 

 

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(1) Ce jour-là, l'île de Noirmoutier changea son nom contre celui d'île de la Montagne et l'île de Bouin s'appela l'île Marat.

(2) Des documents très curieux sur ces faits existaient à Noirmoutier il y a quelques années encore ; ils furent brûlés, dit-on, par le maire, qui les trouvait beaucoup trop compromettants pour certaines familles de l'île. (Profils Vendéens, p. 151). - Voir aussi dans la Revue du Bas-Poitou, 11° année (1898), pp : 257-267, un remarquable article de d'Elbée, intitulé : La mort de d'Elbée. - La commission militaire. Le fauteuil dans lequel fut fusillé d'Elbée à figuré à l'exposition ethnographique de Niort en 1896. - Les historiens ne sont pas d'accord sur la date exacte de la mort de d'Elbée, non plus que sur le rôle de Dutruy.

 

LES COLONNES INFERNALES

 

La Convention, qui a changé le nom du département de la Vendée, en celui de Vengé, qui a supprimé le culte religieux dans tout le pays occupé par les troupes républicaines, qui a applaudi à l'envoi des lettres de « déprêtrisation » de plusieurs curés et à leur abjuration (1), organise alors, sur la proposition de Turreau, les fameuses Colonnes infernales (2). Douze camps retranchés, composés de soixante mille hommes occupent les meilleurs postes du Bocage, enveloppent et affament la Vendée entière, et lancent de toutes parts des troupes sans artillerie ni bagage, chargées littéralement de tout brûler et de tout massacrer.

Le général Grignon, l'ancien boucher, ouvre la marche en disant à ses soldats : - « Je sais bien qu'il peut y avoir des patriotes dans ce pays...! C'est égal, nous devons tout immoler ! Les commandants, où plutôt les bourreaux des onze autres colonnes étaient Huché, Du four, Caffin, Amey, Charlery, Beaufranchet, Chalbos, Gramont, ancien comédien, Cordelier, Commaire et Dalliac.

 

Turreau

 

La consigne infernale fut si bien remplie que Lequinio, qui l'avait conseillée ; Lequinio lui-même recula devant son œuvre : mais il était trop tard (3).

Pendant un mois entier, à partir du 20 janvier 1794, la Vendée ne fut qu'ut bûcher continuel et qu'un cimetière immense (4).

Au premier coup de fusil annonçant la Colonne infernale - « Entendez-vous l'horloge de mort ? » se disait-on de porte en porte. Et saisissant les provisions dans la mette, emportant les malades et les enfants, détachant les bestiaux de l'étable, on s'enfuyait aux gites à travers les genêts et les chemins creux.

 

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(1) Pour détails, voir La Vendée patriote, de Chassin, tome III, chap. XLII.

(2) Pour les Colonnes infernales, voir notamment la Revue du Bas-Poitou. (Année 1896), pages 424-432, etc., et la Vendée historique, 1er et 2e années.

(3) Ses révélations devant le Comité révolutionnaire de Fontenay sont tellement épouvantables que nous ne pouvons les reproduire ici. - Ce fut le 28 mars 1794, que la Société populaire et républicaine de Fontenay donna le signal d'une pro

testation généreuse contre les exactions des généraux incendiaires.

(4) Devaient, d'après l'ordre général donné à Doué, le 30 nivose, an II par Turreau, être exceptés de l'incendie : Saint-Florent, Luçon, Montaigu, La Châtaigneraie, Sainte-Hermine, Machecoul, Challans, Chantonnay, Saint-Vincent-Sterlanges, Cholet, Bressuire, Argenton et Fontenay-le-Peuple. (La Vendée patriote, tome IV, page 52).

 

LE REFUGE DE GRALA PRÈS LES BROUZILS

 

Sur quelques points touffus, des populations entières improvisèrent des villages à l'ombre des forêts. Il y a quarante ans, on voyait dans la forêt de Grala, près les Brouzils, les restes d'un de ces villages, - à l'endroit qui s'appelle toujours Le Refuge.

« De fortes branches attachées au tronc des arbres formaient la charpente des habitations. Les murailles étaient figurées par d'autres branches entrelacées de feuillage et tapissées de gazon. - Ces habitations étaient alignées à droite et à gauche d'une sorte de rue, pavée d'herbe épaisse. Le dôme élevé de la forêt garantissait le tout des intempéries de l'air.

Là, chacun avait transporté son ménage, son trésor, ses bestiaux et ses amours.. Les hommes y étaient rares et travaillaient pour les femmes ; les mères mettaient au monde et élevaient leurs enfants. Un prêtre réfractaire baptisait les nouveau-nés, bénissait les mariages, assistait les mourants et enterrait les morts. - Tels sont la vie et le cœur humain : les plaisirs même, les jeux et parfois les danses du pays revivaient dans cette colonie proscrite. Mais surtout on y priait pour les braves qui défendaient encore la Vendée... car à chaque coup de canon tiré dans le lointain, que de femmes et d'enfants tremblaient pour leurs époux, leurs fils et leurs pères ! On avait des courriers adroits et intrépides, des vieilles mendiantes ou des petits gars, qui, leurs sahots à la main, courbés dans les chemins creux, filant comme des lièvres dans les genêts, allaient savoir des nouvelles de l'armée et du village... Ils ramenaient souvent un soldat paysan fugitif ou blessé... Alors que de questions et de soins, et que de terreurs ou d'espérances dans tout le refuge !

Telle était la vie de ceux qu'épargnait la mort... Cependant les Colonnes infernales achèvent leur mission. Huché a tout brûlé et tout tué du Port-la-Claye à Sainte-Hermine. - Dufour au district de Montaigu (1). - Cordelier, de l'est à l'ouest. - Grignon, dans le sens contraire, d'Argenton-le-Château aux Herbiers... Il n'y a plus qu'un désert fumant de Clisson au Loroux, de Tiffauges à Vezins, dans tout le Haut-Poitou et dans une partie de l'Anjou. Plus d'un quart de la population est mort ; le reste est disparu. Deux cent mille bestiaux ont péri avec leurs maîtres. Ce qu'on a brûlé de fourrages, de bois et de blé est incalculable. Les chiens de fermes hurlent sur les décombres, attendant un Vendéen pour le caresser ou un Bleu pour lui sauter à la gorge.

Faut-il blâmer après cela les paysans qui se vengèrent sur les patriotes ? Mais il avait été donné à un seul homme, à Carrier, dont nous ne raconterons point les sinistres exploits, de dépasser les abominations commises par les Colonnes infernales (2).

 

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(1) Dans la commune de Chavagnes, dont l'église, le château de l'Ulière et une partie du bourg avaient été incendiés dans le mois d'octobre 1793, plus de cent personnes de tout âge et de tout sexe furent massacrées le dimanche 23 février 1794, après des atrocités sans nom. Ce lugubre événement est connu dans le pays sous le nom de « jour du grand massacre ». (Echos du Bocage Vendéen, IIIe année, pages 346 et 347.

(2) PitreChevalier, pages 508 et 509.

 

BEAU TRAIT DE DAVID D'ANGERS

 

Partout, il faut le dire, ces bourreaux de la Terreur trouvèrent des hommes assez généreux pour leur disputer des victimes ; partout les crimes et les dévouements se multiplièrent les uns par les autres. Nous citerons entre mille, un trait fort touchant de David, le père de Maxime David, l'excellent peintre en miniature.

Louis David, alors âgé dé vingt-trois ans, avait quitté le service militaire par un honorable scrupule. Il fut envoyé comme contremaître à l'arsenal d'Angers. Mieux valait encore, à ce temps-là, forger les armes que les manier. David recevait de la République un maigre salaire, à peine suffisant à sa laborieuse existence. Il logeait dans une toute petite chambre, au dernier étage d'une de ces vieilles maisons d'Angers, dont les portes sont si étroites et les couloirs si sombres. Un soir il rentrait chez lui : une charrette longeait la rue, portant des Brigands à la guillotine.... David s'arrête frappé de terreur et de pitié... Toup à coup un corps rapide le heurte, le pousse dans le corridor et y disparaît en le devançant.... David monte à sa suite jusqu'au dernier étage et trouve à la porte de sa chambre une jeune fille éperdue, les cheveux épars et les vêtements en désordre : - « Sauvez-moi, monsieur, lui dit-elle, au nom du Ciel, sauvez-moi ! ... » David avait déjà ouvert son modeste logement et mis en sûreté celle qui l'implorait. Elle lui dit alors : « Je suis mademoiselle de l'Epine. Cette charrette conduit toute ma famille à l'échafaud ; j'en suis tombée par miracle.... Un autre miracle m'a jeté chez un homme de cœur.... Partagez avec Dieu ma reconnaissance ». David s'enferme avec la victime, et attend en frissonnant pour elle et pour lui-même. Personne ne monte, et l'espérance succède à l'effroi.... Mais ces angoisses devaient se renouveler chaque jour.... Qu'un des mille Argus de Francastel eût le moindre soupçon, et c'en était fait de la vile Brigande et de son sauveur.... David garda ainsi mademoiselle de l'Épine pendant six semaines. Il la quittait le matin pour aller à l'arsenal, et revenait après son travail en partager le fruit avec elle.... Nous avons dit qu'il avait à peine de quoi vivre.... Quand le dîner ne suffisait pas pour deux, s'était lui qui s'imposait les privations. Le sacrifice qui lui coûta le plus fut celui de son lit. Huit jours durant, toutefois, il le céda à la jeune fille, et non moins respectueux que dévoué, il dormait près d'elle sur une chaise. Mais un tel repos, après les fatigues du jour, altéra sa santé.... Or, s'il fût tombé malade, lui et sa compagne étaient perdus !... « Mademoiselle, lui dit-il un soir, vous avez assez éprouvé ma discrétion ; accordez-moi une grâce d'où dépend notre salut commun. Permettez-moi de réparer ma force épuisée en reprenant la moitié de mon lit. »

Et désormais, le jeune homme et la jeune fille, sans reproche comme sans défiance, dormirent côte à côte et tout habillés sur

le même matelas.... Un jour enfin, ils sortirent ensemble : Mademoiselle de l'Epine, qui avait son projet, entraîna David dans la campagne, et se fit reconnaître d'une troupe de Vendéens. - « Voilà mon libérateur, leur dit-elle, il est digne de marcher sous votre drapeau ». Et elle supplia David de la suivre à l'armée royale... Mais le modeste employé de la République fut incorruptile. Il dit adieu à la jeune fille et regagna l'arsenal d'Angers.

Quand la paix ferma les plaies de la France, David, élevé en grade par une conduite exemplaire était à l'arsenal de Châlons-sur-Marne. Il y reçut une lettre dont voici la teneur: « Je n'ai point oublié que je vous dois l'honneur et la vie. Je viens m'acquitter en vous offrant ma fortune et ma main. Signé : Mademoiselle de l'Epine. »

David fut touché jusqu'aux larmes et vivement tenté ; mais Républicain jusqu'au bout il refusa discrètement. Le dénoûment n'est-il pas digne de l'aventure ? (1)

 

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(1) Pitre-Chevalier; pages 524-525.

 

RETOUR DE LA ROCHEJAQUELEIN DANS LE BOCAGE

SA MORT (29 Janvier 1794)

 

Turreau et les représentants avaient appris à Noirmoutier que La Rochejaquelein, de concert avec Stoffet et Bernard de Marigny, occupait le territoire de Châtillon, d'Airvault, de Thouars et de Cholet, et qu'il n'attendait que le retour du printemps pour attaquer les postes disséminés dans le centre de la Vendée. Le jour où ils avaient passé la Loire, Henri de la Rochejaquelein et ses compagnons, séparés de leurs troupes errèrent toute la journée, sur la rive droite sans avoir pu trouver un asile. Quelques jours après ils arrivèrent à Châtillon et de Châtillon à Saint-Aubin-de-Baubigné, où Mlle de la Rochejaquelein s'était réfugiée. Après avoir pris des informations sur l'état du pays et rassemblé les débris de l'ancienne armée, ils se rendirent à Maulévrier, auprès de Charette, qui fit au jeune généralissime de la Grande Armée l'accueil que l'on sait. Avec les soldats dont il dispose il se rend à Néry, où il opère un nouveau rassemblement, marche toute la nuit pour enlever un poste républicain, et les nuits suivantes pour faire des expéditions semblables, mais à de grandes distances, pour jeter l'incertitude sur sa marche et faire croire à l'ennemi qu'il y avait différentes troupes. Le 24 janvier il lance mille hommes sur Amey et Cordelier, emporte Chemillé, s'empare des subsistances amassées par la colonne républicaine qui venait de fuir, pille tous les fourgons de l'état-major, fait fuir Turreau, s'établit avec Stofflet dans la forêt de Vezins, et fait chaque nuit une sortie sur les Bleus. Jamais le héros n'avait joué sa vie avec une telle audace. Il la rencontra le 28 janvier 1794.

Henri était convenu avec MM. de Bruc, de Livernière et du Cléré de les joindre en Vallet pour arrêter les incendiaires de Turreau. Il s'élance chemin faisant sur une colonne qui brûlait Nouaillé. Il remporte sa dernière victoire et fait sa dernière .bonne action. Ses soldats allaient tuer deux gendarmes bleus surpris dans un champ. « Arrêtez ! leur crie-t-il, je veux interroger ces hommes ». Et il va droit à eux malgré Stofflet et Beaugé. « Rendez-vous, leur dit-il, je vous fais grâce ». Mais un de ces forcenés a entendu prononcer son nom ; il le couche en joue et le tue à dix pas. La balle avait frappé au front.

Stofflet reçoit au cœur le contre-coup ; il s'élance les yeux en larmes, - lui qui n'avait jamais pleuré ! - « Qui de vous, misérables, a tué notre général ? - Moi, répond le meurtrier. Et Stofflet lui ouvre le crâne d'un coup de sabre. Puis s'adressant, à son compagnon : « Toi, tu es libre ; M. Henri t'a fait grâce ». Avertis de l'approche d'une colonne ennemie, les compagnons de la Rochejaquelein lui creusent à la hâte une fosse et l'ensevelissent avec son meurtrier. - Les restes du héros furent exhumés en 1816, et le 7 mars 1817, transportés dans le caveau de famille à St-Aubin-de-Baubigné.

Ainsi mourut l'un des plus nobles et des plus dignes enfants de la Vendée. Sa carrière fut courte mais elle fut brillante, et aucune ombre ne ternit jamais l'auréole si radieuse et si pure de cet enfant de vingt ans.

« Ce héros ! le plus jeune et le plus brillant général qu'ait eu la Vendée, n'avait que vingt et un an, s'écrie Napoléon, qui sait ce qu'il fut devenu ? »

 

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PRISE ET REPRISE DE CHOLET (19 Février 1791)

SUCCÈS ET REVERS DE STOFFLET

IL SE RÉFUGIE DANS LA FORÊT DE VEZINS

 

Stofflet résolut de venger la mort de La Rochejaquelein. Dans la même journée il bat les Bleus à Gesté et à la Regrippière. Secondé par Pierre Cathelineau et Beauregard, il promène ses bandes à.Beaupréau, Chemillé, Vezins, Coron, enlève les. hauteurs du Coudray-Monbault à la brigade Carpentier, pousse jusqu'à Vihiers, d'où il revient dans la forêt du Vezins, qu'il quitte de nouveau le lendemain, 7 février, marchant sur Maulévrier, où il décide de faire le siège de Cholet. Le 9 février 1791, il attaque vigoureusement cette ville à la tête de cinq mille hommes et s'en empare. Le général Moulin, qui portait des culottes faites de la peau des Vendéens qu'il avait tués, est blessé et se brûle la cervelle de rage d'avoir été vaincu par ces paysans. Mais Cafin prend sa place et commence à rallier les fuyards. La division Cordelier arrive, et devant ces nouvelles forces les Vendéens reculent jusqu'à Chemillé (1).

Stofflet attaque le 11 février, avec sept mille hommes, la division de ce général, forte des héroïques débris de l'armée de Mayence, mais Cordelier le bat par son propre système à Beaupréau et à la Regrippière en égaillant aussi ses soldats. Puis il court arrêter le succès de Charette dans le Bas-Poitou. Stofflet se retranche dans la forêt de Vezins, d'où il repousse Huché et Grignon. Le 22 février (2), les royalistes de la Haute-Vendée s'emparent de Cerizay, le 21 de Bressuire, où ils trouvent des vivres en abondance ; le 26 d'Argenton-le-Château.

Dans le Bas-Poitou, Charette, traqué sans cesse par les Colonnes infernales, errant au milieu de l'hiver rigoureux de 1794, dans les bois et sur les landes couvertes de neige des paroisses des Lucs, de Saligny, de Saint-Sulpice et de la Copechagnière, échappe à force d'adresse et d'audace aux divisions républicaines qui sillonnent le pays. Souvent même, de peur d'être trahi par la fumée, il ne peut allumer de feu de bivouac pour se dégeler les membres.

Renseigné et secondé par des enfants et des femmes qui courent nu-pieds dans la boue et dans la neige, il. tient tête, pendant cette campagne admirée comme un chef-d'œuvre de tactique militaire, aux vainqueurs de l'Europe coalisée. Le 27 janvier il attaque avec Sapinaud Saint-Fulgent, et y bat les Bleus occupés à relever l'arbre de la liberté. Battu le lendemain aux Quatre-Chemins, il rentre dans la forêt de Grala et en sort le 31 janvier pour défendre les Brouzils contre la colonne du général Dufour. Il a le bras fracassé par une balle, mais n'en continue pas moins de se battre jusqu'à ce qu'il tombe évanoui. Le lendemain, il s'empare de Maché, où il trouve un convoi de vivres, et peut à peine se reposer quelques heures au Val de Morière, près Touvois.

Le jour de la Chandeleur (2 février), il met en fuite le général Joba, tue six cents hommes à Grignon, près de Saint-Fulgent et culbute le général La Chenaie près de Chauché(3), remportant ainsi trois victoires coup sur coup avec des troupes peu nombreuses et exténuées de fatigue, et qui se vengent par la mort des prisonniers, des incendies allumés sur leur route. - Le 8 février on se bat à Saint-Colombin, où La Roberie blesse ou tue de sa main trois dragons acharnés contre lui ; puis Charette apprenant que les Bleus mettaient tout à feu et à sang du côté de Légé, il s'avance avec Joly et Couëtus pour délivrer ce malheureux pays. Il bat Cordelier dans le bourg, puis au bord d'un torrent, où celui-ci laisse huit cents morts et toutes ses munitions.

 

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(1) Le lendemain, 22 pluviose, an II , le Comité de Salut public prescrivit de désarmer sur-le-champ toutes les communes vendéennes comprises dans le cercle forméé par les places de Saint-Gilles, Les Sables, Luçon, Niort, Airvault, Thouars, Saumur, et depuis Saumur jusqu'à Nantes, toute la rive gauche de la Loire, et depuis Nantes jusqu'à Saint-Gilles, tous les points de la circonférence exceptés. Dans toute l'étendue du pays soumis, il ne devait rester d'armes qu'aux soldats de la République (La Vendée patriote) T. II, page 255.

(2) NOUVEAUX NOMS DES COMMUNES DE LAVENDÉE

Les noms anciens des communes sont, croyons-nous, désignés officiellement pour la dernière fois durant la période révolutionnaire, dans une délibération du district des Sables, portant la date du 4 ventôse, an II (22 février 1794).

Le changement des noms, qui rappelaient « des idées de fanatisme et de féodalité », s'opéra successivement â dater du 24 pluviôse, an II (14 février 1794), où, sur le registre des délibérations municipales de Saint-Gilles, on trouva pour la première fois la désignation de Port-Fidèle. Le même mois, l'lle d'Yeu se dénommait île de la Réunion, Croix-de-Vie s'intitula Havre-de-Vie. Le 14 prairial (5 juin) ; furent reconnus par le district des Sables, en outre des précédents, les changements de noms suivants :

Château-d'Olonne, Beauséjour; Saint-Martin-de-Brem, Havre-Fidèle ; Saint-Nicolas-de-Brem, Bellevue ; Saint-Julien-des-Landes, Landes ; Chapelle-Achard, Belle-Chasse ; Sainte-Flaive, Louvetière ; Sainte-Foy, Le Désert ; Saint-Georges-dePointindoux, Carrière-Grison ; Le Bernard, Bonfond ; Longeville, Salerne ; SaintBenoît, Bon-Marais ; Chapelle-Hermier, Josnay ; Landeronde, Bonne-Lande ; Les Moutiers-les-Mauxfaits, Les Moutiers-les-Fidèles, Champ-Saint-Père, Champ-Perdu ; Saint-Avaugour, Les Palières ; Saint-Cyr, Haute-Plaine ; Saint-Sornin, le Bois ; Saint-Hilaire-de-Talmont. Le Tanès ; Saint-Hilaire-la-Forêt, La Vineuse-en-Plaine ; Saint-Vincent-sur-Jard, Le Goulet.

Chassin, T. IV. La Vendée patriote (1793-1800). Voir aussi La Vendée historique, IIIe année, 559-60 et 61.

(3) Dans les premiers jours de mars de cette année 1794, une partie de la commune de Chauché fut brûlée par les Colonnes infernales, notamment le village de la Brejonnière ; une seule maison fut épargnée : celle d'un nommé Mandin, qui, le 2 février précédent, avait donné l'hospitalité au chef qui commandait la colonne incendiaire. (Alexis des Nouhes, Échos du Bocage) année 1885, n° III.

 

FÉROCITÉ DE JOLY, dit le « BRUTUS VENDÉEN »

 

Le féroce Joly vit tomber là deux de ses fils, dont l'un mortellement. Il pleurait comme une mère sur le corps de l'aîné, lorsqu'on amène les prisonniers bleus. Un d'eux se jette aux pieds du vieillard en criant : « Grâce, mon père ! Vous savez que je n'ai fait que céder à la force ! » - C'était en effet le troisième fils de Joly qui servait la République.... Le Brutus vendéen le repousse et le fait fusiller avec tous ses compagnons. Les Vendéens ne pardonnèrent jamais cette barbarie au général.

 

ARRIVÉE DU GÉNÉRAL HAXO (1)

 

Encore une fois Charette était maître du pays, mais il ne put rester, à Légé, infecté par les retranchements de cadavres. Haxo fut alors lancé contre lui. Le 28 février il est à Machecoul, le 1er mars à Légé, le 2 à La Mothe-Achard. - « Dans six semaines, écrivait-il au Comité de Salut public, j'aurai la tête de ce brigand ou il aura la mienne ! »

Cette parole superbe était connue dans la Vendée : partout on ne parlait que du général Haxo. Alsacien comme tant d'illustres généraux de la République, faisant la guerre en soldat, mais non pas en bourreau : ce qui le rendait d'autant plus redoutable. Tout le monde s'entretenait de la lutte qui allait s'ouvrir entre ces deux hommes.

Charette, cantonné dans la forêt de Rocheservière, ne fut point épouvanté de l'orage qui l'allait menacer.

Avec des soldats manquant de tout, il laisse la forêt, s'ouvre un passage à travers les Bleus, les culbute près Saint-André-Treize-Voies ; le 5 mars, secondé par Guérin, son intrépide lieutenant (2), il bat Haxo à la Vivantière, mais bientôt Haxo triomphe à son tour à Saint-Sulpice (7 mars), et enfonce les Blancs dans la forêt de Touvois.

 

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(1) Haxo, né à Étival (Vosges) le 7 juin 1749, avait servi dans le régiment de Touraine, infanterie, de 1768 à 1777 ; il en avait été congédié fourrier. Conseiller au bailliage de Saint-Dié en 1789, puis administrateur du département des Vosges et major-général des gardes nationales en 1790, il avait répondu à l'appel des volontaires en 1791, et avait été élu lieutenant-colonel du troisième bataillon de son département le 29 août. Promu chef de brigade pendant le siège de Mayence, il obtint le grade de général de brigade le 17 août 1793. Il prit une belle part aux deux campagnes des Mayençais en Vendée, et fut gardé sur la rive gauche de la Loire pour combattre Charette pendant l'expédition d'Outre-Loire, puis dirigea ensuite les opérations qui aboutirent le 3 janvier 1794 à la reprise de Noirmoutier, et se fit tuer bravement au combat des Clouzeaux (20 mars). La Convention décréta le 28 avril 1794 que son nom serait inscrit sur une colonne de marbre au Panthéon. La ville de La Roche-sur-Yon a donné le nom de ce vaillant général à une de ses principales rues. - Disons aussi que par ordre de Haxo, et malgré des injonctions réitérées, la Contrie, maison de Charette, près la Garnache, resta debout.

(2) Guérin commandait les Paydrets, c'est-à-dire les habitants des paroisses situées entre Nantes et Machecoul, pays de Retz ! Il avait remplacé La Cathelinière, fusillé à Nantes.

 

COMBAT DES CLOUZEAUX. - MORT DE HAXO
(21 Mars 1794)

 

Après avoir séjourné pendant quelques jours au milieu des bois et rallié les fameux gâs du pays de Retz, les Paydretz, Charette, avec Joly, qui est venu à son secours, s'avance sur Chauché pour surprendre La Roche-sur-Yon par un mouvement tournant et attirer l'ennemi dans un piège. Les Vendéens étaient aux Clouzeaux (1) se dirigeant sur La Molhe-Achard, lorsqu'on vint leur annoncer l'approche du général Haxo. Charette donne aussitôt le commandement de la gauche à Joly, celui du centre à Guérin et garde l'aile droite pour lui : La cavalerie, placée sur les coteaux environnants devait protéger la retraite en cas de revers.

Haxo, impatient d'en finir, et se figurant qu'il ne va faire qu'unebouchée des Vendéens, se précipite à la baïonnette sur l'avant-garde de Joly qui soutient bravement le choc : au même moment, la cavalerie accourt aux cris de : Mort aux Bleus ! et la mêlée devient affreuse.

En vain Haxo, toujours repoussé, revient six fois à la charge, il ne peut entamer les Vendéens et il tombe bientôt de cheval (2) atteint d'une balle à la cuisse. Alors il s'adosse à un arbre, donne ses derniers ordres, et, le sabre en main, brave toute l'armée Vendéenne ! - « Rendez-vous ! » lui crie un paysan ; et pour toute réponse il l'étend à ses pieds. Il pare de même les coups d'un autre, et cinq hommes reculent devant cette tête blanche inondée de sang, cette taille gigantesque et ce sabre « inévitable. » - Enfin Arnaud de la Mouzinière de Mormaison, blessé par le général, l'achève de trois balles presque à bout portant. Charette, triomphant sur tous les points, accourait pour lui sauver la vie.

 

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(1) Lire dans La Revue du Bas-Poitou (5e année, pages 128 à 139), un article fort intéressant intitulé : La mort du général Haxo et le combat des Clouzeaux.

(2) Son cheval fut saisi par des Tesson de Belleville, qui s'emparèrent de sa valise contenant, disait-on, une forte somme d'argent; en tout cas ce n'était un mystère pour personne après 1814, que l'aisance de ces métayers misérables, lors de l'affaire des Clouzeaux, avait eu ce point de départ. (Rouillé. Le Messager de la Vendée 13-27 mars et 17 avril 1892). - Chassin. La Vendée patriote. Tome IV, page 381.

Haxo, d'après Aubertin, aimait à citer cette maxime de la Pharsale : « Unica belli proemia civilis, victis donare salutem ». Dans une guerre civile, le seul gain de la victoire, c'est de sauver les vaincus.

 


RÉORGANISATION DE NOUVELLES BANDES ROYALISTES

PRISE DE MORTAGNE-SUR-SÈVRE PAR MARIGNY (25 Mars 1794)

 

Tandis que Charette, pendant une admirable campagne d'hiver de trois mois, reprend son ancien territoire, Marigny, après avoir, déguisé en marchand de volailles, bravé Carrier jusqu'au cœur de Nantes, se met à la tête des gars de Bressuire, de Mortagne et des environs, et la Vendée a désormais trois généraux : Charette, Stofflet et Marigny.

D'un autre côté, Sapinaud de la Rairie, aussi revenu d'Outre-Loire, avait réorganisé une armée dans la Vendée centrale, et Fleuriot, nommé généralissime à Savenay, tenait toujours à la tête de sa division.

Marigny débute par un grand coup. Vêtu de l'habit de paysan, comme ses soldats, sans autre distinction que sa croix de Saint-Louis, il s'empare de Mortagne le 25 mars, à la tête de 5.000 rebelles et établit son quartier général à Cerizay, pendant que la garnison de Mortagne, forte d'environ mille hommes, s'enfuit à Tiffauges, Clisson, Le Pallet et Nantes, où elle arrive après 26 heures de marche forcée.

Cet événement eut une portée immense. Le Normand, accusé d'avoir rendu la ville, éclaira la Convention sur ses maladresses. Dès lors elle changea diamétralement de système, déclara les femmes, les vieillards, les enfants inviolables, et rendit à la guerre le caractère qu'elle n'eût jamais dû perdre. Mais les soldats de Charette, de Stofflet et de Marigny, se défiant des promesses de la Convention, poursuivirent encore avec acharnement la guerre des broussailles.

 

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ÉVACUATION DE CHOLET, LES HERBIERS, CHANTONNAY,

LA ROCHE-SUR-YON. - MONTAIGU, QUARTIER GÉNÉRAL.

SITUATION CRITIQUE DES TROUPES

 

Pour conjurer le défaut d'ensemble entre les chefs qui prennent le commandement de la division après la mort de Haxo, la Convention ordonne que Cholet sera évacué et que tous les habitants quitteront le pays sous peine d'être traités comme rebelles.

Le général Turreau évacue les Herbiers, Chantonnay, La Roche-sur-Yon et, se fixe à Montaigu, où il établit son quartier général (2 avril) ; dès le lendemain le pain manque pour nourrir ses troupes et deux mille réfugiés.

Les troupes étaient réduites à un quart de ration de pain dans les districts de Challans et de Machecoul, bien que le général Haxo eût donné l'ordre d'excepter provisoirement de l'incendie Challans, la Garnache, Sallertaine et Soullans, comme postes militaires. Elles n'avaient qu'un pas à faire pour se procurer des vivres en abondance : c'était de pénétrer dans le marais, que le sanguinaire lieutenant de Charette, Pajot, occupait avec quinze cents hommes.

 

AFFAIRES DE CHALLANS ET DES ENVIRONS. - CAMPS DE FRELIGNÉ ET SAINT- CHRISTOPHE . - MAULÉVRIER, LES MOUTIERS-LES-MAUXFAITS REPRIS, ETC

 

Instruit des desseins de Turreau, Charette essaie de s'ouvrir un passage à travers les bataillons républicains et de réunir ses forces à celles de Pajot. Le 8 avril il attaque avec huit mille hommes Challans, défendu par puits cents hommes aux ordres de Boussard. Malgré la disproportion du nombre et l'héroïsme de Charette, qui combattit le dernier avec une poignée de braves, les républicains repoussèrent trois fois l'ennemi et le mirent en déroute. Dutruy poursuit Charette et Savin jusqu'au-près d'Aizenay, brûlant tout sur son passage ; le 23 et le 26 avril il fouille les forêts de Princé, de Touvois et de Grand'Lande ; le 4 mai il s'empare du Périer « affreux et superbe repaire au milieu d'une nappe d'eau. » Le marais fut cerné par des colonnes volantes, qui ne purent néanmoins empêcher Pajot d'aller rejoindre Charette dans le Bocage, en emmenant dans sa fuite un grand nombre de chevaux et de bêtes à cornes ; mais cette expédition longue et pénible procura d'immenses ressources aux troupes de la République. Le 17 juin Boussard annonçait qu'il avait emporté les quatre moulins autour desquels se tenaient les débris de l'armée de Pajot ; qu'il s'était emparé d'au moins 30.000 sacs de farine et d'un très grand nombre de bœufs et de chevaux. Le 23 juin, il formait à Fréligné et à Saint-Christophe du-Ligneron deux camps de 5.000 hommes pour assurer la pacification du marais.

Sur ces entrefaites, Stofflet et Marigny avaient dirigé une expédition infructueuse sur La Châtaigneraie, défendue par l'adjudant-général Lapierre, mais ils allaient bientôt venger cet échec. Le vendredi saint, 18 avril, Marigny attaque les républicains dans les allées du château de Clisson et les met en fuite. Ils évacuent Bressuire et se renferment dans le camp de Chiché. Stofflet de son côté se fortifie à Maulévrier, dont il fait un camp, un refuge et une imprimerie.

Ls 19 avril, Charette s'empare des Moutiers-les-Mauxfaits, où il trouve des vivres et des munitions en abondance et vole au secours de Sapinaud, qui avait formé une nouvelle armée avec les anciens soldats de Royrand et de Beaurepaire. L'arrivée de Charette et de Guérin sauve Sapinaud, qui se trouvait cerné vers Pouzauges par des forces supérieures (28 avril 1794) (1).

 

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(1) Tous les hommes valides de la Gaubretière avaient suivi Sapinaud.

 

MÉSINTELLIGENCE ENTRE LES CHEFS. - ENTREVUE DE LA BOULAYE. - EXÉCUTION DE MARIGNY (10 Juillet 1794)

 

Les succès de Marigny avaient porté ombrage à Stofflet et à Charette. Ils lui firent proposer une entrevue pour règler de

concert un plan de campagne. Sapinaud, Marigny, Stofflet et Charette se réunirent à La Boulaye, près Mallièvre. Ils avaient entre eux quarante mille hommes, dont il s'agissait de faire une puissante armée. L'abbé Bernier arrive et brouille les rivaux, déjà aigris. Ne pouvant dominer Charette, il l'empêche de dominer les autres en fascinant Stofflet. On ne nomme donc point de généralissime; mais on signe une confédération vendéenne, et l'on convient d'agir de concert, sous peine de mort (toujours l'impossible) (1).

Marigny doit ouvrir la campagne et attaquer des postes républicains sur la rive gauche de la Loire. Il se présente au jour convenu, mais il n'obtient pas assez de vivres pour ses troupes qui l'abandonnent... Il manque alors forcément à sa promesse et échoue le 25 avril et le 2 mai devant La Châtaigneraie. Jaloux de lui depuis longtemps, Charette et Stofflet l'accusent d'avoir poussé ses soldats à la révolte, et le traduisent le 29 avril, à la Jallais (2), devant un conseil composé de vingt-trois généraux et officiers. Charette fait le rapport et conclut à la peine capitale. Il vote en conséquence avec Stofflet qui se charge de l'exécution. En vain Sapinaud, La Bouère et Beaurepaire, etc., refusent de signer : l'arrêt fatal est rendu par 18 voix sur 20. Marigny l'apprend et ne veut pas le croire   « C'est pour m'effrayer », dit-il en souriant.

Charette se repentit, assure-t-on, et voulut sauver sa victime ; mais excité par l'abbé Bernier, Stofflet arrêta Marigny, malade à la Girardière, et le fit fusiller, le 10 juillet 1794, par des soldats allemands. On refusa un prêtre au condamné, qui commanda le feu avec un héroïque courage. - « De tous les chefs de la Vendée militaire, dit Mme de la Rochejaquelein, aucun n'a péri d'une mort plus déplorable et plus révoltante. »

 

Marigny

 

Charette et Stofflet, qui s'étaient entendus pour le mal, ne purent s'accorder pour la bonne direction de leurs opérations, et cependant la République, triomphante naguère, se résignait à la défense, et les Bleus, que le nom seul des Brigands terrifiait, s'abritaient derrière neuf camps retranchés placés sous le commandement supérieur du général Vineux (3).

Stofflet, de son côté, partage son théâtre militaire en huit divisions. Charette en crée onze, et de plus organise des tribunaux. Des mesures imitées de la Convention fournissent des munitions, des vivres et de l'argent, pendant que la Convention, pressentant Bonaparte, tremblait de voir un dictateur surgir de l'armée.

Une chance inattendue s'offrait en même temps aux généraux vendéens. La Convention retournait une partie de ses troupes vers les frontières du Nord. Charrette convoque aussitôt ses collègues le 1er juin, à son camp de la Bézelière. Après un combat acharné et malgré l'énergique résistance des troupes régulières, aux ordres du général Brière, il écrase deux mille républicains dans les landes de Bois-Jarry, et couvre la route de leur sang jusqu'à Moutaigu. Il était irrévocablement convenu qu'on ne ferait plus de prisonniers.

 

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(1) Voir pour détails, Chassin. - La Vendée patriote. T. IV, pages 492-93 et 94.

(2) Chassin dit que c'est à Belleville que fut rendu l'arrêt de mort.

(3) Ces camps étaient ainsi disposés : Le général Ferrand à Fontenay, siège de l'état-major, avec 3.500 hommes. - Grignon à Thouars, avec 3.600 hommes. - Dutruy en avant des Sables-d'Olonne, avec 3.000 hommes. - Travot à Courson, avec 4.291 hommes. - Crouzat et bientôt le général Jacob à la Houillère, avec 4.500 hommes. -- Bonnaire à La Châtaigneraie, avec 5.000 hommes. - Guillaume entre la Vie et le Lay, avec 3.600 hommes. - Legros à Chauché, avec 1.960 hommes, et Dusirat à Montaigu (A), avec 1.400 hommes, soit 30.850 hommes.

(A) Dusirat avait momentanément établi son camp entre les Quatre-Chemins et Saint-Vincent-Sterlanges, puis à la Chardière et .à Saint-Georges-de-Montaigu.

 

INSUCCÈS DES VENDÉENS DEVANT CHALLANS
(6 Juin 1791)

 

Le 6 juin, Charette, avec dix mille fantassins et neuf cents cavaliers, suivi de Stofflet, qui dispose de quatre à cinq mille hommes, attaque Challans (1). Louis Guérin, toujours à l'avant-garde avec ses Paydrets, enlève les premiers postes, et Charette survenant avec Sapinaud, l'affaire s'engage sérieusement et devient des plus chaudes. Tour à tour vainqueurs et repoussés sur quelques points, les Bas-Poitevins, mal secondés par Stofflet qui reste l'arme au bras au plus fort de la bataille, font des efforts inouïs pour enfoncer les Bleus, commandés par Dutruy. En vain le drapeau blanc est planté deux fois sur les retranchements, il est abattu deux fois ; en vain Joly, grièvement blessé, combat toujours et fait des prodiges de valeur avec Guérin, il fallut céder et abandonner l'entreprise. Stofflet se décida enfin à se mettre en ligne, mais il ne put que couvrir la retraite avec la cavalerie de Rostaing.

Cet insuccès mit le comble à la mésintelligence qui existait toujours entre Charette et Stofflet, et chefs et soldats se séparèrent vivement irrités. Charette se retira à Belleville avec 1.500 hommes, et Stofflet se dirigea vers le Haut-Bocage par les Quatre-Chemins et les Herbiers.

Charette alla se consoler avec son sérail à Belleville, et Stofflet, reprit, à La Marozière, le joug sacré de l'abbé Bernier, ce génie ambitieux qui s'employait encore à raviver la guerre, en attendant qu'il entreprît de l'éteindre avec tant d'habileté.

 

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(1) La veille l'armée avait campé à St-Christophe-du-Ligneron.

 

REPRISE DES HOSTILITÉS

NOUVELLE ATTAQUE DE LA CHÂTAIGNERAIE (12 Juillet 1791)

AFFAIRES DE LEGÉ (17), CHATEAU DE BOULOGNE, PALLUAU (20 Juillet)

 

En ce moment Robespierre allait de l'autel de l'Être suprême à la guillotine, et si quelques généraux républicains, comme Vimeux, Beaupuy et Dumas, se montraient pleins d'humanité, d'autres, tels que l'ignoble Huché, continuaient à promener la mort et l'incendie sur la malheureuse Vendée qui, malgré ses revers, était toujours frémissante.

Le 12 juillet, Stofflet, Bérard et la Bouère battent les Bleus à La Châtaigneraie, qu'ils ne peuvent conserver; mais le 17, Legé tombe entre les mains de l'ennemi, malgré Lecouvreur, commandant de la division qui, avec les quinze cents hommes qu'il avait avec lui, se défendit vaillamment. - Le 19, les républicains s'emparent du château de Boulogne, dans la forêt de Dompierre, où l'on trouve des provisions considérables, de l'eau-de-vie et du vin en barriques, 1.500 bouteilles de vin de Bordeaux et d'Espagne, des vêtements, matelas, etc. Le 20, nouveau succès, où la colonne du hideux Huché se livre encore à des massacres épouvantables.

Battu à l'attaque du camp de Millé, en Anjou, Stofflet, qui faillit être fait prisonnier, est vengé par Cadi qui, an bourg de Faye, détruit complètement deux bataillons qui y étaient campés.

Après le 9 thermidor (27 juillet 1794), la Convention, bien décidée pourtant à recourir aux voies de la douceur, rappelait tous les représentants et tous les généraux impitoyables. Elle engageait en même temps, sous mains, les Vendéens à livrer leurs chefs ; mais ces trahisons furent rares.

 

INCURSIONS DES GÉNÉRAUX ROYALISTES. - ENLÈVEMENT, PAR CHARETTE, DES CAMPS RETRANCHÉS DE LA ROULLIÈRE, DE FRÉLIGNÉ ET DES MOUTIERS-LES-MAUXFAITS.

 

Sûrs encore de leurs soldats, Charette et Stofflet appelèrent au contraire les Républicains sous le drapeau blanc, et poursuivirent chacun sa pointe d'accord avec leurs collègues. Stofflet à Maulévrier, Richard. à Cerizay, Sapinaud à Beaurepaire ou à Saint-Paul-en-Pareds, Charette dans les environs de Legé et de Challans, ne cessent d'inquiéter les moissonneurs pendant les mois de juillet et d'août, et il fallut l'intervention vers Pouzauges, du chef d'état-major républicain Beaupuy, pour arrêter vers ce côté l'offensive de Stofflet, de Richard et de Sapinaud, qui perdirent 1.500 hommes.

Plus heureux que ses collègues, Charette, après une tentative infructueuse le 2 septembre, enlève, le 6 septembre, le camp retranché de la Roullière (1) au général Jacob qui, en compagnie de charmantes dames fuit jusqu'à Nantes.

 

Château de Bois-Lambert

 

Le 14 du même mois, il enlève au général Guillaume celui de Fréligné, établi par le général Boussard, pour couvrir les marais reconquis. Les républicains se défendirent vaillamment, se replièrent d'abord sur le camp de Saint-Christophe-du-Ligneron qu'ils durent évacuer, et enfin se concentrèrent à Challans.

Les moulins à poudre de Cparente ayant été détruits dans la forêt de Princé et dans le marais de Périer, le chef royaliste se rue, le 24 septembre, sur les républicains, près de Bois-Lambert, commune du Bernard, et de là sur le camp retranché des Moutiers-les-Mauxfaits, s'en empare de nouveau, et menace Luçon et les Sables-d'Olonne.

C'est pendant l'affaire de Fréligné que le jeune bleu Mermet se fit tuer sur le corps de son père.

De son côté Stofflet gagnait du terrain et empiétait sur l'autorité du chef du Poitou qui, le 6 décembre, â Beaurepaire, quartier général de Sapinaud, faisait prendre par le Conseil un arrêté annulant la Conférence de la Jallais. En même temps le vieux Joly, devenu odieux aux soldats de Charette par ses rigueurs, et traqué dans les bois comme un sanglier, perissait sous les coups des gars de M. de la Barbinière de Saint-Laurent-sur-Sèvre, qui un dimanche, â l'issue de la grand'messe, le prirent pour un espion, dirent-ils, et ne le reconnurent qu'après sa mort.

 

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(1) Situé dans les landes de Saint-Philbert-de-Bouaine, prés le village de la Sauvagére.

 

PRÉLIMINAIRES DE LA PACIFICATION

 

La discorde régnait parmi les chefs des armées vendéennes, lorsque la République résolut de donner à la Vendée un nouveau gage de paix : c'était l'amnistie du 2 décembre 1794, - la tête de Carrier, son infâme persécuteur (16 décembre 1794), et la mise en jugeaient des principaux généraux incendiaires. - Pour garantie de leur bonne foi, les républicains, sur les conseils du général Canclaux, ouvrirent partout les portes des prisons aux royalistes, et les proscrits cachés en Bretagne, après la défaite de Savenay, purent rentrer librement dans la Vendée.

Une jolie femme de Nantes, Mme Garnier-Chambon créole née à Saint-Domingue, célèbre par son dévouement aux proscrits, donne le coup de grâce au parti guerroyant, en se faisant le ministre pacifique de Ruelle, successeur de Carrier (1). Elle se rend auprès de Mademoiselle de Charette et près de Charette lui-même, avec M. Bureau de la Batardière et Bertrand-Geslin, aide-de-camp du général Canclaux. Ils portent un décret de la Convention qui donne aux représentants carte blanche pour pacifier la Vendée.

Grâce à Mlle de Charette, l'ambassade parvient jusqu'au général, au château de La Roche-Boulogne. Le 28 décembre, pendant que de Bruc et Amédée de Béjarry avaient à Nantes une entrevue avec les onze représentants en mission près l'armée de l'Ouest, Madame Garnier-Chambon l'aborde la première en lui rendant sa sœur. Les grâces et la bonté de cette femme le touchent tellement, qu'il accepte une entrevue, sur un terrain neutre, avec Canclaux et Ruelle. Disposé à la paix, faute de pouvoir continuer la guerre, il consulte ses officiers à Vieillevigne. Tous opinent pour un traité honorable, excepté Savin, Le Moëlle et Delaunay. Le comte de Bruc du Cléré et Amédée de Béjarry, deux hommes d'esprit et de cœur, sont envoyés aux Conventionnels ; Bertrand-Geslin répond de leurs têtes sur la sienne. Ils s'abouchent avec les représentants, traitent avec eux de puissance à puissance.

Le 6 janvier 1796, des patriotes célèbrent la fète des Rois avec les Vendéens. Le 16 janvier, Ruelle déclare à la tribune de la Convention que le décret d'amnistie a été accueilli avec transport par les rebelles, qui ont rendu les prisonniers faits depuis le 2 novembre. Deux jours après, le jugement de la Commission militaire qui condamnait la veuve de Bonchamps à

mort était annulé par un décret de la Convention. Le vent était à la paix.

En vain Stofflet et Bernier s'unirent de nouveau pour arrêter l'élan pacifique donné par Charette ; en vain à toutes les propositions de la Convention ils répondirent énergiquement :. « Un roi ou la mort ! » Il fallait répondre aussi par des victoires, et ils ne trouvèrent que des soldats découragés (2).

 

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(1) Elle se mit en rapport avec Prieur de la Marne par l'entremise du cuisinier de ce dernier, un de ses obligés de St-Domingue.
(2) Pitre-Chevalier.

 

 

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