Histoire de Vendée

Histoire de la Vendée
du Bas Poitou en France

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CHAPITRE XVII
POTERIES FABRIQUEES EN BAS-POITOU DEPUIS SAINS LOUIS JUSQU'A LOUIS XII

 

Le vernis / Belleville, Triaize, Saint-Hilaire-des-Loges, Le Champ-Saint-Père, Le Chemin des Potiers, Luçon, Mareuil, Mallièvre, Maillezais.


Poteries transitoires entre le moyen âge et la renaissance.

 

POTERIES FABRIQUEES EN
BAS-POITOU DEPUIS SAINT LOUIS
JUSQU'A LOUIS XII

Le vernis

 

Le vernis vert proprement dit n'a, d'après M. Fillon, fait son apparition en Poitou que sous Philippe-Auguste ou Louis VII. Sous Saint Louis, l'emploi de la vaisselle de terre prit de l'extension, et l'on se mit à fabriquer des pièces d'une certaine dimension, couvertes d'ornements en creux.

Les réparations exécutées sous la monarchie de juillet à l'église de Belleville, ont amené la découverte d'un très beau vase et des débris d'un plat que Fillon estime être de la seconde moitié du XIIIe siècle, mais que MM. Riocreux et Milet croient d'une date un peu moins ancienne. Le vase, haut de 0 m 37, est revêtu d'un vernis vert foncé, d'inégale épaisseur sur ses diverses parties. Les courants, les fleurs de lis et les quadrillés dont il est décoré, ont été tracés à la pointe avant la cuisson et ont été remplis par le vernis, ce qui les fait presque trancher en noir sur le fond. La plupart des ornements du plat ont, au contraire, été imprimés en creux avec un moule ou poinçon, et reliés entre eux par des linéaments faits à la pointe. Les armes, autant qu'on peut en juger par les fragments qui subsistent, sont celles de la maison de Lusignan : burelé d'argent et d'azur (1).

Dans son entier, ce plat avait 0 m 42 de diamètre. Il est pareillement enduit d'un vernis vert assez foncé. La terre des deux pièces est rouge et très bien cuite (2).

Vers la même époque apparaissent des vases funéraires en forme de pin ou d'artichaut, qu'on continua à fabriquer durant une partie du XIVe siècle. Les plus anciens sont façonnés à la main au moyen d'appliques en relief ou avec un instrument . tranchant. Plus tard on se contenta de les mouler.

Ces diverses poteries, dont le système décoratif se rattache par un côté, à celui employé du Ve au IXe siècle, n'a jamais été tout à fait abandonné, quoique les traces laissées par la période intermédiaire soient fort peu apparentès. Ce système décoratif contenait en germe celui des faïences sigillées de la Renaissance... Il y a en ceci, de même .qu'entant d'autres choses, filiation non interrompue depuis l'époque romaine jusqu'à nos jours.

Le plus curieux vase du XIVe siècle trouvé en Bas-Poitou, est sans contredit une très grande bouteille de terre blanche semée de points rouges et de cailloux, dont la partie inférieure de la panse est revête d'un vernis vert, tandis que la partie supérieure et le col sont lamés de la même couleur. Retirée intacte d'un canal voisin du bourg de Triaize dans le marais de Luçon, elle a été brisée par son inventeur qui, en ayant fait sortir un blanc de Charles V, crut qu'un trésor y était caché et n'eut rien de plus pressé que de le mettre en pièces. Elle ne devait pas avoir plus de 0 m 45 de hauteur.

On a extrait également un pot vert de l'ancien cimetière de Saint-Hilaire-des-Loges. Il contenait du charbon, une bague d'argent et trois ou quatre doubles deniers du roi Jean. Plusieurs autres vases semblables de forme, mais ayant parfois un petit broc pour verser le liquide et de simples lames vertes sur leurs surfaces, ont été exhumés du même cimetière. Tous étaient dé terre blanche mal préparée.

Indépendamment de ces pièces de dates certaines, nous avons un document à peu près contemporain, où il est question de vases de terre. Le 1er juin 1378, un nommé Jourdain Bégaud., du village de la Poterie, paroisse de Champ-Saint-Père, faisant déclaration, à Jacques Freslon, chevalier de la Vieille-Mothe, de ses fours, maison et dépendances, se dit tenu, par chacun an, de porter à la résidence de son dit -seigneur une buye verde godronnée et une ponne de buée (lessive). J'ai déjà fait remarquer ailleurs la persistance du type dans ce dernier ustensile de ménage qui, depuis le Bas-Empire n'a pas changé chez, nous de forme.

La contrée qu'habitait au XIVe siècle Jourdain Bégaud, possède encore d'assez nombreux fours de potiers. Ç'a été même depuis des centaines d'années l'industrie de ce coin de terre. Au moyen âge une route qui, de là, conduisait au port de Saint-Benoît et de Moricq s'appelait le Chemin des Potiers.

Du territoire de Champ-Saint-Père elle remontait vers le nord et rencontrait plusieurs autres fabriques, après s'être séparée en deux branches dont l'une gagnait Beauvoir-sur-Mer, et l'autre allait au -Pas-Boschet, dans le pays de Retz, où la vaisselle de terre commune se fait aussi depuis très longtemps.

L'existence de ces voies de communication semblerait indiquer que le commerce de la poterie s'est fait en Bas-Poitou sur une assez grande échelle et qu'il y eut une sorte d'association, qui devait remonter par tradition à l'époque romaine, où les figuli formaient une corporation indépendante (3). Dans les villes ils avaient leur quartier particulier. A Luçon il y avait la rue et la place de la Poterie (4). Il en était ainsi dans plusieurs autres localités du Bas-Poitou.

Avant de passer à la période suivante il me reste à dire quel ques mots de carreaux et dallage en terre cuite des temps antérieurs au règne de Louis XI. Il y en a peut-être de beaucoup plus anciens que le XIIe siècle, mais l'échantillon qui se place en tête de ceux venus à la connaissance de M. Fillon est au plus contemporain d'Aliénor d'Aquitaine. Il a été trouvé à Mareuil, est de terre couleur blanc-rose, sans vernis, et porte en. creux un. fleuron pur roman. Les spécimens des XIIIe et XIVe siècles sont moins rares. Poitiers, Melle, Vouvent, la chapelle du cloîtré de Maillezais, le prieuré de Saint-Hilaire de Grues, etc., nous ont fourni une quantité de variétés qui la plupart sont de terre rouge et décorées d'ornements peints en jaune sur fond brun-rouegeâtre. Un seul carreau, du XIIIe siècle, venant de Melle, a un griffon jaune sur fond noir.

Mallièvre possédait, vers la fin du XIVe siècle, une fabrique de ces pavés vernissés, comme l'indique l'inscription d'un carreau découvert dans l'ancienne abbaye de l'Absie-en-Gâtine :


GARNER BREVET DE MALA LEPORE
ME FECIT

Sur un second carreau se voit un chasseur â pied, sonnant de la trompe et armé d'un épieu très aigu. Un chien l'accompagne. Au-dessous est écrit :


COME GIRAR. AL (comme Girard al)

inscription tronquée, qui prouve que chaque pavé faisait partie d'un tout figurant des scènes historiques ou de fantaisie ; peut-être les divers tableaux d'une légende pieuse. Le costume du personnage qui ne porte pas l'épée dénote la fin du règne de Charles VII ou le commencement de celui de Louis XI, et rappelle quelque peu l'accoutrement de valets de certains jeux de carte (5).

On a trouvé dans un carreau très ancien, portant cisconscrit dans la rosace centrale, les noms de Marie et de Jésus, ainsi que ceux des mages IASPAR et BALTASAR. On attribuait à ces noms, introduits dans une formule convenue, une puissance magique, et ce carreau était spécialement destiné, selon toute vraisemblance, à protéger le monastère de l'Absie de quelque danger (6).

Une autre fabrique du même genre existait à la Teblerie des Grangès-Bourèches de Maillezais. Les travaux exécutés il y a environ quarante-cinq ans pour faire la chaussée du chemin de Maillezais à Liez ont amené la découverte de son four et d'une quantité considérable de carreaux de terre rouge, incrustés de figures diverses en terre blanche; et couverts d'un vernis jaune très transparent. On y voit des hommes d'armes dans l'attitude du combat, ou se donnant la main, des oiseaux, des aigles à deux têtes, des chiens poursuivant des lièvres. Plusieurs spécimens bien conservés ont été déposés au musée archéologique de Poitiers par les soins de M. Cardin. Benjamin Fillon en possédait un, représentant un chien à l'arrêt. Tous ces carreaux lui paraissaient être du XIVe siècle et avoir été faits pour paver l'église abbatiale de Saint-Pierre de Maillezais, reconstruite en grande partie en 1328, après qu'elle eut été érigée, onze années auparavant, en cathédrale, par Jean XXII. Les carreaux émaillés, d'une date moins ancienne, trouvés par F. Poëy-d'Avant, dans l'enceinte de l'ancien évêché de Maillezais, viennent indubitablement de la mème fabrique (7).

 

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NOTES:

(1) Les Belleville s'étaient alliés dans le courant du mur, siècle aux Lusignans, par le mariage de l'un d'eux avec Isabelle, fille de Hugues XI, comte de la Marche et d'Angouléme.

(2) Fillon. - L'art de terre chez les Poitevins, page 47.

(3) Loi de l'an 337, dans le Cod. Théod., L. XIII, titre IV, et Cod. Justin, XC. L, XIV.

(4) La poterie de Luçon devait à l'église Saint-Filbert, la plus ancienne du lieu, un plat pour recevoir l'offerte le jour de la fête du saint Patron, qui fut l'un des apôtres de la contrée. (Notes manuscrites de Mgr Brumauld de Beauregard, possédées par M. Merland, médecin à Luçon)

(5) Fillon. - L'art de terre chez les Poitevins, page 51

(6) Fillon. - L'art de terre chez les Poitevins, page 51.

(7) Fillon. - L'art de terre, chez les Poitevins, pages 53 et 55.

 

POTERIES TRANSITOIRES ENTRE LE MOYEN AGE
ET LA RENAISSANCE.

 

La période comprise entre l'époque de la mort de Charles VII et l'avènement de Louis XII (1461-1498), a cela de particulier dans l'art, qu'elle est comme un pont jeté entre deux mondes différents l'un de l'autre, mais rattachés entre eux par des liens d'intime parenté.

Le caractère le plus saillant de la plupart des ouvrages de terre de ce temps, est l'emploi continuel du relief sur les pièces qui sortent du commun (1)

 

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NOTES:

(1) Fillon. - L'art de terre, chez les Poitevins, pages 53 et 55.

(N. B.) Voir la planche hors texte du chapitre VI

 

 

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