Histoire de Vendée

Histoire de la Vendée
du Bas Poitou en France

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CHAPITRE XXI
DEPUIS LE SIÈGE DE FONTENAY (1587) JUSQU'A CELUI DE LA ROCHELLE (1628)

 

Siège et prise de Fontenay par Henri de Navarre (1er juin 1587). - Il s'empare aussi de Maillezais

Continuation de la Lutte après la prise de Fontenay

Anarchie à Fontenay

Prise des Herbiers par Mercœur. - Nouvelle attaque de Montaigu et sièges de la Garnache et de Beauvoir. - Maladie du Roi

Prise de Niort par Saint-Gelais (28 Décembre 1588)

Réclamations de Fontenaisiens contre les impôts. - Talmont fortifié

La Garnache, Tiffauges, Pouzauges et La Flocellière se rendent au Roi. - Mariage de la fille du Duc de Mercœur avec le Duc de Vendôme

Division de la province en sept cantons. - Exploits du fameux Guilleri. - Edit de Nantes (13 avirl 1598)

Voyage de Sully à Fontenay (1604). - Consistoire. - Des troupes de malandrins infectent le pays. - Entrée de Richelieu à Fontenay (21 Décembre 1608)

Assassinat d'Henri IV (14 Mai 1610). - Le premier roi en Poitou. - Les Etats Généraux de 1614. - Entrée de Condé en campagne (161). - Sully lui livre ses places de sureté du Poitou

Paix de Loundun. - Condé arrêté (1616). - Assemblée générale de La Rochelle. - Vente du Doignon et de Maillezais au Duc de Rohan par d'Aubigné (1619)

Plan d'une république fédérative. - Le roi marche contre les révoltés. - Duplessis perd son gouvernement de Saumur. - Louis XIII acclamé à Thouars, Parthenay, Chatellerault

Maillezais et Marans se rendent à lui. - Siège et prise de Saint-Jean-d'Angély par Louis XIII. - Son retour à Paris. - Le clergé de nouveau molesté

Siège des Sables d'Olonne et sac de la ville par Soubise. - Le comte de la Rochefoucauld poursuit Soubise qui, le 31 Mars 1622, prend Luçon et le livre au pillage. - Les échecs de Soubise à Saint-Gilles, Talmont et Noirmoutier

Arrivée de LOUIS XIII en BAS-POITOU.

Attaque de Soubise (16 Avril). - Sa fuite . - De nombreux prisonniers. - Horrible spectacle après la bataille

Le roi se dirige d'Apremont sur Fontenay, par Aizenay, La Roche, La Chaize-le-Vicomte, Sainte-Hermine. - Son départ pour Niort. - Marie de Médicis séjourne à Fontenay-le-Comte (16 Mai 1622)

La Rochelle se révolte de nouveau

Guitton et Soubise se retirent sur les cotes d'Angleterre

Richelieu offre la paix aux Rochelais et aux réformés

Démantèlement de Niort, Les Herbiers, Mortagne, Montaigu, Tiffauges, Parthenay, Saint-Maixent, Fontenay

Maladie du Roi

Déclaration royale. - Investissement de La Rochelle

Richelieu demande de l'Argent au clergé. - Assemblée générale de Fontenay (27 Avril - 14 Mai 1628). - Reddition de La Rochelle (28 Octobre 1628)

 

 

 

SIÈGE ET PRISE DE FONTENAY PAR HENRI DE NAVARRE (1er Juin 1587). - IL S'EMPARE AUSSI DE MAILLEZAIS

 

Trois mois après, Henri de Navarre était devant Fontenay. Dès que la nouvelle de son arrivée se répandit dans la ville, la terreur fut à son comble. Une grande partie de la population prit la fuite : le corps de ville et le maire donnèrent l'exemple de la défection. Onze échevins et conseillers restèrent seuls à leur poste. Parmi eux, le vieil Hilaire Goguet, beau-père de Julien Collardeau, assura en partie la lourde tâche de la défense. Il prit le commandement de la milice bourgeoise, composée d'environ quatre cents hommes, emprunta diverses sommes pour payer les soldats du capitaine Morinière, et donna à tous l'exemple de la fermeté et de l'abnégation. Secondé dans son énergique résolution par La Roussière-Culdebraye, gouverneur qui occupait la ville avec le régiment de Verluisant, il mit les Loges en état de défense et attendit l'ennemi.

Dans la .nuit du 23 au 24 mai, le comte de La Rochefoucauld, sous les ordres du roi, occupa Charzais à la tête des compagnies d'arquebusiers et de quelques autres tirées de l'infanterie qu'il divisa en cinq colonnes. Le lendemain, Maximilien de Béthune, plus connu sous le nom de Sully, arriva avec quarante gentilshommes, et l'attaque commença aussitôt du côté des Horts. - Grâce à Démosthène Jamoneau, neveu de Nicolas Rapin, qui, avec Feuquière, Puy-Vidal et La Barre, jeta un madrier sur le fossé des jardins, le roi de Navarre pénétra dans les Loges, et vint, d'après la tradition populaire, s'installer dans la maison connue aujourd'hui sous le nom de Mille-Pertuis (n° 85 de la rues des Loges).

Tandis que cela se passait, les assiégés luttaient vaillamment au pont Bareil, et après deux heures d'un combat acharné, Sully, Dangeau et d'autres ayant voulu franchir la barricade, furent repoussés à coups de piques. - En apprenant l'entrée du roi à l'extrémité des Loges, les catholiques épouvantés se retirèrent derrière les autres barricades du faubourg qu'ils abandonnèrent peu à peu. - Mais Henri de Navarre avait commis la même faute que le duc de Montpensier en 1574 ; l'artillerie manquait. On s'aperçut bien vite que la place ne pouvait être forcée qu'avec des pièces de fort calibre que l'on s'empressa d'aller chercher à La Rochelle et à Saint-Jean-d'Angély. - En attendant les canons, on se livrait à une série d'escarmouches qui tenaient constamment en haleine les assiégés. Bientôt cinq pièces de canon dirigées sur la Grosse Tour, attaquée par Condé, une sur le Marchoux qu'entourait le régiment de Borie, et quatre autres sur le fort des Dames, où Sully se révéla un tacticien et un ingénieur militaire, de premier ordre, avant de devenir un grand ministre, firent pleuvoir une grêle de boulets sur la malheureuse ville.

Les 30 et 31 mai, une canonnade épouvantable annonça aux Fontenaisiens que les protestants allaient donner l'assaut général à leur ville. Despevilles s'empare du fort des Dames, pendant que le capitaine des Littres et Lhomeau attaquent bravement le fort Saint-Michel.

Le 1er juin, les travaux d'attaque étaient tellement avancés que l'on entendait la voix des assiégés. Alors la Roussière voyant qu'il ne pouvait songer à se défendre plus longtemps, envoya son lieutenant vers Henri, qu'il trouva dans les approches des murs dirigeant lui-même les travaux et payant bravement de sa personne. Les propositions du gouverneur furent acceptées et les conditions immédiatement réglées : à midi la capitulation était signée ; La Boulaye en était nommé gouverneur et trois jours après le roi s'emparait de Maillezais, dont l'abbaye, malheureusement, fut mise à sac ainsi que la cathédrale.

 

Ruines de la Cathédrale de Maillezais. (Cliché Ducourt.)

 

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CONTINUATION DE LA LUTTE APRÈS LA PRISE DE FONTENAY.
- LE ROI DE NAVARRE SE RETIRE A LUÇON, PUIS A LA ROCHELLE. - DÉMANTÈLEMENT DE PLUSIEURS PLACES.
- BATAILLE DE COUTRAS (20 Octobre 1587).
- LA PESTE SÉVIT A FONTENAY.
- LES MAGISTRATS ABANDONNENT LA VILLE ET SE RÉFUGIENT A NIORT.
- PRISE DE MAILLEZAIS ET DE MARANS.
- INCENDIE DE L'ÉGLISE DE BOIS-DE-CINÉ ET DE L'ABBAYE DE L'ILE CHAUVET (16 Mars 1588)

 

Henri de Navarre, après avoir licencié presque toute sa cavalerie aussitôt la prise de Fontenay, s'était retiré pendant quelques jours à Luçon. Il cantonna çà et là, avec ses compagnies de pied, dont une bonne partie, pour se reposer de ses fatigues resta devant la ville prise d'assaut, en attendant une occasion favorable pour reprendre les hostilités. Il fit ensuite démanteler plusieurs villes, ne conservant dans la région que Fontenay, Talmont, Maillezais et Saint-Maixent, et se retira à La Rochelle pour y goûter un peu de repos. Ce repos ne devait pas être de longue durée.

Le duc de Joyeuse, parti de Paris le 30 juin, menaçait Fontenay, mais pendant les mois de juillet, d'août et de septembre tout se borna à des escarmouches sans importance et à des cruautés sans nombre, commises par l'armée royale devant Fontenay. - Pendant ce temps, le roi de Navarre ne restait pas inactif. Renforcé par Condé et par tout ce que les huguenots avaient de gens de guerre disponibles dans la Guyenne, l'Aunis et le Poitou, le Navarrois marcha à la rencontre de Joyeuse(1) et lui offrit la bataille dans la plaine de Coutras.

Le matin, à la première heure, au moment où l'armée catholique s'ébranlait, les ministres protestants Chandieu et d'Amours, entonnèrent devant le front de l'armée protestante le verset XII du ps.118 :

La voici, l'heureuse journée

Qui répond à notre désir.

 

A la vue des réformés agenouillés, la folle ,jeunesse qui entourait Joyeuse poussa des clameurs insultantes

« Par la mort ! ils tremblent, les poltrons, ils se confessent ! »

- « Vous vous trompez, répondit un capitaine plus expérimenté, quand les huguenots font cette mine, ils sont résolus de vaincre ou de mourir. »

Ils devaient vaincre en effet : quatre cents gentilshommes et deux mille soldats de Joyeuse passés au fil de l'épée, de nombreux morts, un butin immense qu'on évalue à six cent mille écus, des étendards déposés à Marans, aux pieds de la maîtresse du roi, donnant, comme dit d'Aubigné « sa victoire à l'amour», tel fut le bilan de cette journée où les protestants ne perdirent pas quarante hommes.

Pendant ce temps, la peste sévissait avec une extrême violence à Fontenay, où depuis trente ans, les complots et les massacres avaient familiarisé la plupart des esprits avec le meurtre. - Au milieu de ce bouleversement, les magistrats de Fontenay reçurent des lettres secrètes de Henri III, qui leur mandait de sortir de la ville avec tous les catholiques et sujets fidèles. Les conseils furent suivis et les malheureux exilés se retirèrent à Niort, où l'on établit le siège de l'administration judiciaire. Aussitôt leur départ effectué, les maisons des magistrats furent pillées et saccagées par le reste des troupes protestantes demeurées à Fontenay sous le commandement de la Boulaye.

Après la bataille de Coutras, le Bas-Poitou avait été pendant quelque temps relativement tranquille. Les derniers mois de l'année 1587, et les premiers mois de l'année suivante n'avaient guère été marqués que par la prise de Marans et de Maillezais, tombés aux mains des catholiques, et par l'incendie de l'église de Bois-de-Céné et de l'abbaye de l'Ile Chauvet (16 mars 1588).

 

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NOTES:

(1) Sa cornette blanche était portée par Claude de Maillé de Brezé, seigneur de Cerizay, de la famille des seigneurs de la Flocellière.

 

ANARCHIE A FONTENAY.
- LE FORT DU BRAULT ET MARANS SE RENDENT AU ROI DE NAVARRE (27 Juin 4588). - LA GUERRE CONTINUE A LA LIMITE DU BAS-POITOU ET DE LA BRETAGNE, MONTAIGU, SAINT-GEORGES, CLISSON, VERTOU, NANTES,

 

Néanmoins la victoire de Coutras, en rendant courage aux réformés, malgré quelques échecs partiels, avait fait que beaucoup de Fontenaisiens protestants étaient rentrés dans la ville accompagnés d'un certain nombre de catholiques. - Le maire Frouard signalait son administration par des mesures propres à inspirer confiance, et bientôt les conséquences de cette sage conduite ne tardèrent pas à se manifester, mais les événements qui se passaient à Paris, la journée des barricades (11 mai 1588) les prédications fanatiques, les félicitations de la cour d'Espagne, les bénédictions papales, etc., avaient eu leur contre-coup à Fontenay, et l'anarchie commençait à y régner de nouveau lorsqu'on apprit qu'en vertu d'un des articles secrets de l'Union, Henri III s'engageait à envoyer une armée en Poitou.

Dans cette province, les Ligueurs avaient partout levé l'étendard de la révolte ainsi que les protestants. La Boulaye, aidé de Claude de la Trémouille, avait échoué dans un coup de main contre Vouvent ; le roi de Navarre, après avoir repris les forts du Brault et de Charron, s'était emparé de Marans (27 juin 1588).

D'un autre côté, le duc de Nevers s'avançait pour venger la défaite de Coutras ; son passage était signalé par toutes sortes d'excès, et la désolation était à son comble en Bas-Poitou.

En même temps, le duc de Mercœur dirigeait des troupes nombreuses sur Montaigu, qui appartenait à la famille de la Trémouille, et René Bourré, sieur de Gersac, un de ses plus braves officiers, était déjà rendu à Saint-Georges-de-Montaigu avec un régiment, lorsque le roi de Navarre apprit la situation critique de cette place qui tenait pour lui.

Les fortifications, rasées par Albert de Gondy, duc de Retz, seigneur de Dompierre-sur-Yon, n'avaient pu qu'être incomplètement refaites par de Colombières qui y commandait, et tout faisait présager la chute prochaine de Monlaigu si la garnison ne recevait de prompts secours.

Le roi de Navarre se hâta de sortir de La Rochelle avec seulement cent chevaux et quelques arquebusiers. Le 9 avril il était à Luçon, le 10 à Bournezau, où La Boulaye et Pidoux lui amenèrent quelques renforts, et le 11 aux Essarts, où il apprit que le duc de Mercœur, après avoir assiégé vainement le faubourg Saint-Jacques, s'était retiré à Clisson. - Le roi n'en continua pas moins ses poursuites. Accompagné de Sully et de la Trémouille qui vint le rejoindre à la tête de troupes levées dans ses terres, il se dirigea vers Montaigu, dont il confia la défense à la Luzernec, frère de Colombières. - Avec le renfort que lui procura la garnison de Montaigu, Henri de Navarre infligea près de Mousnières une sanglante défaite à Gersay et revint aussitôt à Saint-Georges-de-Montaigu pour y faire reposer ses troupes. Il mit Montaigu en état de défense et résolut le siège de Beauvoir dont nous parlerons plus loin.

 

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PRISE DES HERBIERS PAR MERCŒUR. - NOUVELLE ATTAQUE DE MONTAIGU ET SIÈGES DE LA GARNACHE ET DE BEAUVOIR. - MALADIE DU ROI

 

Mercœur ne devait pas tarder à reprendre l'offensive, et les Herbiers, qui avaient victorieusement résisté à une première attaque du duc, ne purent tenir contre une seconde. Devant les ravages causés par une puissante artillerie, le château capitula.

Pendant ce temps, Henri de Navarre se prodiguait partout, visitait les villes du Bas-Poitou qui lui étaient demeurées fidèles, et les engageait à la résistance, d'autant mieux que tout faisait prévoir de nouvelles attaques des Ligueurs.

En effet, le duc de Nevers venait d'entrer en Bas-Poitou et Mauléon, défendue par Joachim du Bouchet, traitée en ville prise d'assaut, bien qu'elle se fut rendue à la vue du canon.

L'armée royale alla ensuite investir la petite ville de Montaigu, qui appartenait alors à Condé, et qui était défendue par trois cents hommes de pied, cent arquebusiers à cheval et soixante gens d'armes. Le château, bien que remis en assez bon état sur les ordres du roi de Navarre, ne put tenir contre les douze pièces d'artillerie qui le foudroyaient, et le 8 décembre 1588 la garnison capitulait.

Après la prise de Montaigu l'armée royale se porta sur la Garnache, dont le château était occupé par une garnison de l'armée du roi de Navarre, qui venait d'obtenir de nombreux succès sur le littoral de la Saintonge et du Poitou. Mathurin Brunetière, seigneur du Plessis-Gesté commandait la place : il avait avec lui une compagnie de chevau-légers et deux compagnies d'infanterie, qui se virent bientôt renforcées par de nouvelles troupes et de l'artillerie amenée à la hâte par le baron de Vignole, d'Aubigné et Robinière. - Le gouverneur se hâta de mettre à profit les quelques jours qui lui restaient pour multiplier les moyens de défense ; il occupa ses hommes à fortifier le château, fit garantir par un éperon la porte qui existait près la chaussée de l'étang, et fit raser les maisons des faubourgs, ainsi que la chapelle du Saint-Esprit.

Les postes les plus dangereux ayant été confiés à d'Aubigné, Robinière, Beauregard, Ferrière et Forestière, on travailla avec ardeur à les rendre tenables, et on chercha dans la campagne des hommes pour aider aux travaux.

Le 15 décembre 1588, les éclaireurs de l'armée royale s'avancèrent sur les hauteurs des Poirières pour reconnaître la Garnache. Le lendemain 16, un gros de cavalerie se présenta au même endroit, et malgré l'énergique résistance de la Perrine, lieutenant du Plessis-Gesté, l'ennemi put le soir loger dans les ruines de Saint-Léonard. - Malgré ce succès des Ligueurs, le reste du mois se passa en escarmouches, au cours desquelles la cavalerie de la garnison fit de fréquentes sorties et des prisonniers, dont les uns furent employés aux fortifications, les autres rançonnés, d'autres même durent être renvoyés sur parole, tant on en fit.

Cependant le 30 décembre l'artillerie, consistant en six canons de batterie, quatre couleuvrines royales et deux moyennes, saluèrent la ville d'une volée de boulets, mais ce n'était qu'une fausse attaque. Les pièces furent bientôt transportées du côté des Justices, pendant que le duc de Nevers sommait la garnison de se rendre. Le gouverneur refusa, déclarant qu'il ne reconnaissait d'autre lieutenant général que le roi de Navarre.

Un froid terrible incommodait fort les assiégés, qui ne pouvaient continuer les travaux de défense, et l'abaissement de température fut tel qu'une épidémie se déclara presque instantanément parmi les assiégés. Néanmoins le premier jour de l'an 1589 (jour de dimanche), chaque parti sembla plus occupé des fêtes qui ont lieu ordinairement en cette occasion que d'agir contre l'ennemi, et ce ne fut guère que le mercredi 4 janvier, que plus de « huit-cents coups de canon tirés » ouvrirent une large brèche à droite et à gauche de la porte d'entrée. Mais le jour était trop avancé pour que l'assaut fut livré.

Le lendemain matin, les assiégeants, rangés en bataille, s'avancèrent rapidement contre les brèches qui étaient larges de seize pas ; ils franchirent les premiers ouvrages démolis, essuyèrent la décharge des deux fort qui flanquaient les brèches et perdirent quelques hommes, car les soldats qui gardaient la porte avaient, quoi qu'inférieurs en nombre, lutté héroïquement.

La Ferrière, de son côté, luttait désespérément ; voyant que la glace pouvait porter ses hommes, il les rallia et sur ce point la résistance fut tellement énergique que les ligueurs furent obligés de rétrograder, laissant sur le terrain trois-cents tués ou blessés. La lutte allait continuer encore si Henri de Navarre ne fut pas tombé malade à la Mothe-Frelon, près le Champ-Saint-Père : ce que voyant les assiégés sortirent de la place le 14 janvier et furent conduits à l'abbaye de Breuil-Herbault, d'où ils rejoignirent facilement l'armée du roi de Navarre. Robert de Joyeuse resta au château de la Garnache avec son régiment.

Quelques mois avant la reddition de la Garnache, Henri de Navarre était venu faire le siège de Beauvoir. Le 5 octobre, pendant une reconnaissance devant la place, le Navarrois faillit être tué par les arquebusiers de Villeserein. Grâce au dévouement de d'Angeunes, qui couvrit le roi de son corps, Henri n'eut aucun mal. Irrités par ce qui avait failli arriver à leur chef, les gentilshommes protestants, au nombre d'une quarantaine, s'élancèrent, l'épée à la main, sur la troupe de Villeserein qui se retira avec précipitation vers la forteresse.

Duplessis-Mornay étant arrivé quelques jours après avec de l'artillerie débarquée à Saint-Gilles, la, ville fut obligée de se rendre le 21 octobre ; la garnison, composée de cinquante-trois hommes, fat conduite en l'île de Bouin, où elle avait demandé à se retirer.

 

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PRISE DE NIORT PAR SAINT-GELAIS (28Décembre 1588).
- MAILLEZAIS, SAINT-GERVAIS, THOUARS ET LOUDUN SE RENDENT AUX RÉFORMÉS.
- RÉCONCILIATION DES DEUX ROIS. - SIÈGE DE PARIS.
- EXCOMMUNICATION ET ASSASSINAT DE HENRI III( 1er Août 1589).
- LE ROI DE LA LIGUE, TRANSFÉRÉ A MAILLEZAIS, MEURT A FONTENAY, LE 9 MAI 1590

 

Sur ces entrefaites Saint-Gelais enlevait Niort aux catholiques (28 décembre 1588), et d'Aubigné s'emparait de Maillezais défendu par Saint-Pompoint. - Saint-Gervais, Thouars, Loudun se rendaient également aux réformés qui échouaient devant Parthenay et Vouvent.

Mais la réconciliation de Henri III, abandonné par la Ligue, et du roi de Navarre, qui venait d'avoir lieu à Plessis-les-Tours, par l'intermédiaire de Duplessis-Mornay, allait donner aux hostilités une autre couleur politique. Les armées combinées des deux rois vinrent, à la fin de juillet, camper devant Paris dont étaient maîtres les Ligueurs. Leurs forces royales étaient imposantes, mais les deux souverains avaient à lutter contre les masses populaires, et contre l'esprit de parti qui ne pardonne point.

Henri III venait d'être excommunié à cause de ses relations avec les protestants. Paris retentissait des déclamations que quelques orateurs emportés exhalaient contre lui. De terribles passions fomentaient au fond des cloîtres ; l'idée de l'entrée des huguenots dans Paris y soulevait des paroxysmes de rage. Il était impossible que ces passions n'armassent pas quelques bras de sectaire et que la Ligue n'eut aussi son Poltrot. La tradition classique et la tradition juive, la mémoire de Brutus et celle de

Judith, étaient aussi populaires chez les catholiques que chez les protestants. Elle allait engendrer un de ces fanatiques qui sont la honte de leur époque. Le 1er août 1589, un dominicain, Jacques Clément, frappait à Saint-Cloud, d'un coup de couteau, Henri III, qui expirait le lendemain à quatre heures, en récitant à voix basse le premier verset du psaume LV : Miserere Mei Deus, quoniam conculvavit me homo.

Il avait trente-huit ans.

La mort de Henri III exalta encore les Ligueurs, qui se donnèrent pour souverain, sous le nom de Charles X, le vieux cardinal de Bourbon, alors prisonnier à Chinon.

Mais derrière la soutane royale de son compétiteur, Henri de Navarre, qui venait de se faire reconnaître roi sous le nom de Henri IV, voyait l'ambitieuse famille de Lorraine et les chefs de la Ligue qui, au moyen de quelques idées généreuses, ne visaient qu'à soulever le peuple, à ressusciter la féodalité, à faire de la France une fédération. Mais la cause d'Henri 1V, en 1589, était la cause nationale ; au-dessus, de ces majorités hétérogènes d'un jour, il y avait l'unité permanente de la patrie française qui, aux heures de nos plus grands revers, est toujours demeurée comme un principe tutélaire.

Duplessis-Mornay, qui commandait Saumur, reçut du roi l'ordre d'enlever des mains de Chavigny, gouverneur de Chinon, le cardinal qu'Henri III lui avait donné en garde. Le roi de la Ligue fut conduit à Maillezais et confié à d'Aubigné, mais le climat de notre pays mina rapidement la santé délabrée de ce vieillard qui, transféré quelques mois après à Fontenay, dans une maison de la rue des Loges, y mourut de la gravelle le 9 mai 1590.

 

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RÉCLAMATIONS DES FONTENAISIENS CONTRE LES IMPOTS.
- TALMONT FORTIFIÉ.
- TROUBLES DE CHAVAGNES-EN-PAILLERS.
- ENTRÉE DE HENRI IV A PARIS (22 Mars 1594).
- MASSACRE DE LA BROSSARDIÉRE

 

La mort du roi de la Ligue fut loin de ramener le calme dans les esprits. La Sainte-Union s'agitait toujours, et, sous le couvert de la religion, jetait le trouble partout. Les discussions intestines continuaient à désoler le Bas-Poitou, où le pouvoir royal était de moins en moins reconnu ; le roi, qui se trouvait au camp de Gonesse, près de Paris, crut prudent d'enjoindre au duc de la Trémouille de rester dans le pays avec les forces qu'il devait lui amener.

 

Chavagnes-en-Paillers (Vue prise de la Lagère en 1860). - Cliché Auguste Douillard, de Montaigu.

 

A Fontenay, les catholiques demandaient instamment que Notre-Dame fut rendue au culte, que la ville fut débarrassée des ruines qui l'encombraient, que les impôts fussent diminués, etc., mais la pétition des « chers sujets de la bonne petite ville de Fontenay » n'eut d'autre résultat que de valoir au maire l'honneur de recevoir une lettre autographe du roi, priant les Fontenaisiens d'attendre « qu'il plût à Dieu de lui permettre de les dégrever » et une ordonnance royale donnée à Saint-Denis, au mois d'août 1592, confirmant les privilèges de la ville (1).

Quelques mois auparavant, et pour garantir les côtes d'une incursion possible des Ligueurs, Henri IV avait chargé Giron de Bessay du commandement d'une compagnie de cavalerie, avec mission de fortifier la ville de Talmont, dont son fils Jonas fut nommé gouverneur, le 31 octobre 1596, en remplacement de son oncle Saint-Étienne, décédé.

Des troubles religieux se produisaient aussi en même temps à Chavagnes-en-Paillers, au sujet de l'inhumation de Gilles de Durcot dans l'église paroissiale, et d'un autre côté, au mois de mars 1594, au moment où Henri IV faisait son entrée solennelle à Paris (22 mars 1594), les troupes régulières du Bas-Poitou n'étant point payées, furent sur le point de se débander.

Quelque temps après l'abjuration d'Henri IV, un massacre épouvantable de protestants avait lieu au village de la Brossardière, près de la Châtaigneraie. Le dimanche 13 août 1595, à l'issue du sermon, des sicaires venus de Rochefort en Anjou, tuaient 31 réformés sans défense, en blessaient autant et faisaient 4 prisonniers.

Ce massacre répandit l'effroi parmi les protestants du pays, Duplessis-Mornay envoya le capitaine Bruneau auprès des gouverneurs des places du Poitou pour les engager à prendre les armes contre les bandes de la Ligue et à réprimer leurs excès, mais peu de jours après, Mercœur signa un traité avec les royalistes et le monstrueux assassinat de la Brossardière resta impuni.

 

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NOTES:

(1) Deux ans après, au mois de novembre 1594, une élection ayant été créée aux Sables-d'Olonne, mit de fort mauvaise humeur les élus de Fontenay, dont les intérêts se trouvaient, par ce fait, sérieusement lésés.

 

LA GARNAGHE, TiFFAUGES, POUZAUGES ET LA FLOCELLIÈRE SE RENDENT AU ROI.
- MARIAGE DE LA FILLE DU DUC DE MERCŒUR AVEC LE DUC DE VENDOME

 

Au nord-ouest du Bas-Poitou on guerroyait encore : La Garnache, appartenant comme Beauvoir à la maison de Rohan, avait pour gouverneur Eusèbe du Puy-du-Fou, très attaché à Jean de Beaumanoir de Lavardin, maréchal de France, mais il l'était aussi au duc de Mercœur. Voulant se dégager de cette situation fausse, il profita de l'approche des régiments de Goulaine, de la Perraudière et de Vauvrilles, pour rendre la place au roi (20 mai 1597). Le même jour, la garnison ligueuse de la. Grange-Maronnière, près d'Aizenay, était également taillée en pièces par le capitaine La Ferrière.

Au commencement de l'année 1597, la Ligue était pour ainsi dire éteinte par toute la France, excepté en Bretagne et en Poitou, où Mercœur se maintenait moins par sa propre force que par les circonstances qui retenaient alors le roi ailleurs. De nombreux châteaux que le duc possédait dans le bocage, notamment Tiffauges, étaient autant de repaires de brigands. Le pays était désolé par eux. Ils volaient et pillaient partout, dit un chroniqueur, et « il n'y avait personne assurée de sa maison, ni sur les chemins. » - Au même moment, la Flocellière était prise par un lieutenant de Mercœur, le vicomte de La Guerche, et livrée au sac (30 juillet 1597).

Mais ces exactions ne pouvaient durer plus longtemps. A la suite d'une réunion de la noblesse et de la bourgeoisie catholique convoquée à Fontenay par Malicorne, pour aviser aux moyens de faire cesser les troubles qui agitaient le pays, on se décida à prendre les armes contre les bandes du dernier chef de la Sainte-Union, et le peuple finit par sonner le tocsin à la vue de l'écharpe noire des défenseurs de la foi.

Le 3 août, c'est-à-dire quatre jours après le sac de la Flocellière, le gouverneur du Poitou ordonnait à de Parabère de conduire du canon devant cette place et de s'en emparer. En présence des forces considérables amenées par le lieutenant général, les protestants de la Flocellière mirent bas les armes. Tiffauges fut abandonné par Champigny, et Pouzauges se rendit à Pierre de Chouppes, pendant que Mercœur envoyait sa femme à Angers, pour traiter de son accommodement avec le roi (20 mars 1598).

Le 3 avril suivant, le mariage de sa fille Françoise avec le duc de Vendôme, fils naturel du roi et de Gabrielle d'Estrée, consacrait définitivement la paix.

 

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DIVISION DE LA PROVINCE EN SEPT CANTONS.
- EXPLOITS DU FAMEUX GUILLERI.

- ÉDIT DE NANTES (13 Avril 1598).
-PLACES DE SURETÉ DONNÉES AUX PROTESTANTS.
- ENTRETIEN DES MINISTRES PAR L'ÉTAT.

 

La province fut alors divisée en sept cantons, sous le commandement d'un nombre égal de capitaines. Ces précautions amenèrent la destruction des derniers levains de discordes et l'anéantissement des bandits qui rançonnaient la contrée, à l'exception de la troupe la plus redoutable commandée par un nommé Guilleri, homme d'un courage à toute épreuve et d'une audace incroyable, né aux Landes, paroisse de Boulogne, d'un père maçon de son état. Retranché dans un petit château des environs des Essarts, nommé le Bois-Potuyeau, qu'on désigne comme son quartier général, il mettait à contribution tout le pays, et étendait ses brigandages jusque vers Niort et La Rochelle. Assiégé et pris dans son repaire du Bois-Potuyau, Guilleri fut fait prisonnier et roué vif sur la place de Saintes en 1608.

A Fontenay, les catholiques étaient rentrés en possession de Notre-Dame, et de leur côté les protestants prenaient leurs mesures pour faire édifier un temple dans une ville qui leur était donnée (6 décembre 1597) comme place de sureté, mais cette concession n'était que le prélude de l'Édit de Nantes, publié le 13 avril suivant.

La paix étant faite avec l'Espagne, et Mercœur venant de déposer les armes, Henri IV comprit qu'une ère de pacification devait succéder à trente-cinq années de sanglants déchirements.

Le célèbre Edit fixait irrévocablement l'état civil, politique et religieux des protestants. Appelés comme les catholiques à contribuer aux charges de l'Etat, les réformés étaient déclarés capables de tous les emplois publics et dignités.

C'était une mesure de haute politique, approuvée par les gens sages, blâmée par les fanatiques, un voile jeté sur le passé terrible, qui avait mis la France à deux doigts de sa perte, et une garantie de tranquillité pour l'avenir.

De nombreuses places de sûreté étaient laissées aux mains des protestants, comme garantie de l'exécution de l'Édit. A l'exception de la capitale, toutes les principales villes du Poitou étaient en leur pouvoir et y restèrent.

Dans notre pays, Niort, Fontenay, Maillezais, Marans, Talmont, Beauvoir-sur-Mer, et plus tard la Garnache furent confiés à des garnisons huguenotes soldées par l'Etat. - Une partie de l'entretien des ministres fut aussi mise à la charge du trésor public : douze pasteurs furent chargés de desservir le colloque ou la classe de Fontenay, qui comprenait dans son ressort, Fontenay, Maillezais avec Saint-Hilaire, Luçon, Saint-Benoît avec le Tablier, Talmont, La Chaume, Saint-Gilles-sur-Vie, Le Poiré avec Belleville, Mareuil avec La Bretonnière. Sainte-Hermine avec La Chapelle-Thémer, Le Puybelliard avec Chantonnay, Mouilleron avec Bazoges, La Châtaigneraie avec Pouzauges, Mouchamps avec Les Herbiers et Saint-Fulgent, Vaudoré.

 

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VOYAGE DE SULLY A FONTENAY (1604).
- CONSISTOIRE.

- DES TROUPES DE MALANDRINS INFECTENT LE PAYS.
- ENTREE DE RICHELIEU A FONTENAY (21 décembre 1608)

 

Malgé tout, le Poitou n'était pas sans causer quelques craintes à Henri IV. Depuis qu'il avait abjuré le protestantisme, ses anciens amis se défiaient de lui et gardaient un profond ressentiment de ce qu'ils appelaient son ingratitude. - Il était donc urgent d'empêcher les mécontents de cette province de se joindre à ceux que la conspiration du maréchal Biron avait démasqués. C'est dans l'espoir de ramener à lui les esprits encore hésitants, qu'il envoya Sully faire en Poitou, une tournée qui avait pour prétexte la prise de possession de la province dont il avait été pourvu le 3 décembre 1603, en remplacement de M. de Malicorne, mais qui en réalité fut triomphale, et produisit le résultat qu'on en attendait.
Le 9 juillet 1604, Sully fut reçu en grande pompe à Fontenay, où il demeura pendant plusieurs jours. Il mit à profit son voyage dans cette ville pour régler un différend entre la commune et Zacharie de Pirelle, contrôleur des guerres, étudier la question de la navigabilité de la Vendée et faire visiter toutes les côtes du Bas-Poitou, par Nicolas et Boy.
Grâce à lui, une assemblée composée des députés des consistoires put, l'année suivante, se réunir à Fontenay et y discuter les intérêtes temporels et spitituels, mais par crainte de troubles possibles, le roir s'opposa en 1606 au synode national que les protestants voulaient tenir à La Rochelle.
Malgré une paix apparente dans le bocage surtout, les habitants continuaient à être dévalisées, et pendant de longues années encore, la région de la. Châtaigneraie et Pouzauges était le point de réunion de tous les gens sans aveu de cinquante lieues à la ronde.

Quatre ans après la mort de Guilleri, en 1612, le passage du Lay, entre Chantonnay et Sain t-Philhert-du-Pont-Charrault,était tellement redouté des voyageurs, qu'ils se trouvaient forcés de former des caravanes pour aller de Nantes à La Rochelle. Le 14 septembre de cette année, le porteur des dépêches, trois marchands bretons, deux autres voyageurs et leur domestique furent assaillis dans ce lieu. Deux furent tués, quatre blessés et le courrier ne dut son salut qu'à la vitesse de son cheval.

Dans le domaine religieux, des escarmouches entre protestants et catholiques se succédaient avec des chances presque égales, et souvent les capucins et les ministres, non contents de dogmatiser, faillirent en venir aux mains.

Pendant que ces misérables querelles ravivaient les haines, un évêque qui, quelques années plus tard devait devenir un grand ministre, Richelieu, sacré évêque de Luçon le 17 avril 1607, faisait le 21 décembre 1608 son entrée dans Fontenay au milieu d'une foule nombreuse et enthousiaste.

Le même accueil ne devait pas se produire dans la ville épiscopale, où dès son arrivée, il se heurta à de nombreuses difficultés suscitées par les protestants, et aussi par certains catholiques qui cultivaient sur une vaste échelle le système des confiscations ; mais le grand évêque était de taille à se faire obéir.

 

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ASSASSINAT D'HENRI IV (l4 Mai 1610).
- LE PREMIER ROI EN POITOU. -

LES ÉTATS-GÉNÉRAUX DE 1614.
- ENTRÉE DE CONDÉ EN CAMPAGNE (1615).
- SULLY LUI LIVRE SES PLACES DE SURETÉ DU POITOU

 

 

C'est sur ces entrefaites qu'un criminel, François Ravaillac, frappait lâchement d'un coup de couteau Henri IV, dans la rue de la Ferronerie, à Paris (14 mai 1610).

Un immense cri de douleur s'éleva d'un bout de la France à l'autre, à la nouvelle de la mort du roi qui fut le plus sympathique par les manières et par le cœur, du roi qui s'occupa le plus sérieusement des intérêts du sol et des travailleurs, et en qui les penseurs ne cesseront jamais d'honorer le précurseur d'une Europe nouvelle.

Les conséquences de l'assassinat du roi n'allaient pas se faire attendre longtemps, et les passions, avides et turbulentes, que la fermeté d'Henri IV avait contenues devaient se rallumer. D'un côté, les grands, naguère écrasés avec la Ligue, tentèrent bientôt de ressaisir le pouvoir et de recommencer les luttes épuisées de la féodalité. De l'autre le protestantisme avec sa force militaire, ses places de sûreté, ses assemblées, son organisation militaire, politique et toutes les garanties qui lui étaient assurées par l'Edit de Nantes, essayait de créer dans l'Etat un corps indépendant et ne dissimulait point ses vues menaçantes.

Le duc de Rohan cherchait à se former un parti dans l'Ouest, et dès 1612 aurait pris les armes sans la sage intervention de Mornay. La fameuse assemblée de Saumur, où s'étaient réunis les députés des seize provinces ecclésiastiques de la France protestante, venait d'être dissoute, sans mettre fin à l'agitation qui régnait parmi les réformés.

L'anarchie était partout, et à la cour surtout, où Condé, le 13 février 1614, somme la reine-mère de convoquer les Etats-généraux sous trois mois. - Marie de Médicis, qui savait par ses émissaires qu'une partie de la noblesse du Bas-Poitou était disposée à seconder les projets ambitieux de Condé, se décida à venir dans ce pays, avec le jeune roi. Elle partit de Paris, le 5 juillet 1614 : partout les populations, irritées contre les fauteurs des désordres, saluèrent Louis XIII de leurs acclamations et Fontenay, où ils passèrent paraît-il au mois d'août, fit à ses hôtes un accueil enthousiaste.

Quelques jours après, se réunissaient les Etats-généraux, où devaient se distinguer François Brisson, sénéchal du roi à Fontenay, Jean Besly, avocat au même siège et surtout l'évêque de Luçon, Richelieu, qui pour la première fois, du moins sur un grand théâtre, avait l'occasion d'élever cette voix qui devait un jour maîtriser bien d'autres tempêtes.

Les Etats-généraux s'étant séparés sans rien décider, les mécontents résolurent d'en profiter pour lever à nouveau l'étendard de la révolte. - De toutes parts les protestants couraient aux armes. Le 9 août 1615, Condé lance un manifeste violent contre le clergé catholique, et entre en campagne avec cinq ou six mille hommes, décidés à marcher en Guyenne pour s'opposer au mariage du roi. - A la fin de décembre de cette année, Sully lui livrait ses places du Poitou, notamment Fontenay.

 

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PAIX DE LOUDUN.
- CONDÉ ARRÊTÉ (1616).
- ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE LA ROCHELLE.

-VENTE DU DOIGNON ET DE MAILLEZAIS AU DUC DE ROHAN PAR D'AUBIGNÉ (1619).

 

Le 16 mai suivant était signée la paix de Loudun, qui accordait notamment quinze-cent-mille livres à Condé pour les frais de la guerre ; ce n'était qu'une éclaircie dans un ciel chargé d'orage. Condé, qu'on ne cessait de représenter à la reine-mère comme un futur usurpateur était, le 1er septembre 1616, arrêté par le marquis de Thémines, sénéchal du Quercy. Les autres princes qui avaient pactisé avec lui s'échappèrent et purent se retirer dans les provinces qui leur étaient dévouées.

L'entrée en campagne ne se fit pas attendre : les princes, déclarés criminels de lèse-majesté, furent attaqués dès le mois d'avril 1617 et battus sur tous les points. Il ne leur restait plus d'autre ressource que la clémence du roi.

Le 25 juin de cette année, un arrêt du Conseil ayant ordonné le rétablissement du culte catholique dans toutes les villes, bourgs et villages du Béarn, souleva de virulentes protestations parmi les réformés. Malgré les hommes éclairé du parti, l'Assemblée générale fut transférée à la Rochelle, à la fin de 1618. Malgré aussi une violente déclaration fulminée contre elle au mois de janvier 1619, par le Parlement, elle n'en demeura pas moins le centre d'où partirent toutes les déclarations enflammées de certains orateurs, les libellés des exaltés du parti, d'autant mieux que partout, en Bas-Poitou, se créaient des couvents, notamment dans les contrées où le protestantisme demeurait vivant.

Aux portes de Fontenay, d'Aubigné, gouverneur de Maillezais, s'attachait au parti du duc de Rohan, achetait l'île du Doignon, et y bâtissait une forteresse d'où il exerçait un droit de péage sur les bateaux qui descendaient ou remontaient la Sèvre.

Ces deux places, dont disposait d'Aubigné, inspirèrent des craintes à la cour, et l'on fit offrir au vieux capitaine deux-cent-mille écus pour qu'il s'en dessaisit. Mais d'Aubigné, qui ne voulait pas qu'elles tombassent entre les mains de l'évêque de Maillezais ou du duc d'Épernon, traita avec le duc de Rohan pour la moitié du prix qu'on lui offrait.

 

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PLAN D'UNE RÉPUBLIQUE FÉDÉRATIVE.
- LE ROI MARCHE CONTRE LES RÉVOLTÉS.
- DUPLESSIS PERD SON GOUVERNEMENT DE SAUMUR.

- LOUIS XIII ACCLAMÉ A THOUARS, PARTHENAY, CHATELLERAULT.

 

Les chefs du parti protestant, réunis à la Rochelle, n'avaient rien écouté, et malgré les efforts d'une nombreuse minorité, les résolutions les plus violentes avaient prévalu, notamment celle de faire de la France une vaste république fédérative. Un des principaux personnages de cette organisation devait être le duc de Soubise, à qui on attribuait le second cercle, formé de la Bretagne, de l'Anjou et du Poitou.

La cour, en face de ce rêve anti-national, pressait sans relâche de redoutables préparatifs. Le 29 avril 1621, le roi se mit en route, à la tête de ses troupes, non sans avoir lancé sur l'Assemblée de la Rochelle et ses adhérents, une déclaration de lèse-majesté, qui garantissait toute sécurité civile et religieuse aux réformés paisibles. Cette distinction équitable et politique fut confirmée par un acte significatif : Louis XIII, en passant à Tours, fit pendre cinq des auteurs d'une émeute dans laquelle la populace de cette ville avait récemment saccagé le temple et quelques maisons de réformés.

L'Assemblée de la Rochelle répondit à la déclaration du roi par un manifeste qui justifiait la guerre, et par un règlement qui l'organisait (10 mai). Elle fit faire un sceau sur lequel était figuré un ange tenant d'une main une croix, de l'autre l'Évangile et foulant aux pieds une figure « qu'ils disoient être l'Église romaine (1) ».

Le roi, entré à Saumur ce même jour, en repartit le 17, après avoir enlevé le gouvernement à Duplessis-Mornay, qui le possédait depuis trente-deux ans. Arrivé à Thouars, où Julien Collardeau, maire de Fontenay, lui apporte, le 20 mai, les clefs de la ville, le roi détache le duc de la Trémouille du parti des réformés. Toutes les villes se soumettaient : Parthenay reçut le roi avec enthousiasme, et Châtellerault lui envoya des députés, pour l'assurer de son obéissance. Le 23 mai, Louis XIII se présenta devant Fontenay. La dame de la Boulaye en était gouvernante. En son absence, son lieutenant, Delorière, remit la place au roi, qui y plaça quatre-cents hommes, et le gouvernement au comte de La Rochefoucauld, obligé d'habiter Fontenay.

 

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NOTES:

(1) Mémoires de Richelieu, page 235.

 

MAILLEZAIS ET MARANS SE RENDENT A LUI.
- SIÈGE ET PRISE DE SAINT-JEAN-D'ANGÉLY PAS LOUIS XIII.

- SON RETOUR A PARIS.
- LE CLERGÉ, DE NOUVEAU MOLESTÉ

 

Le lendemain 21 mai, Maillezais se rendit au roi et le même jour, le gouverneur de Marans, frère de La Boulaye, apportait les clefs du château. Saint-Maixent s'étant également rendu, le roi se présenta le 1er juin devant Saint-Jean-d'Angély qui, malgré sa vieille enceinte du moyen âge, ne put tenir longtemps contre une puissante artillerie. Le 25 juin (s1) la ville demanda une capitulation par l'entremise d'un bas-poitevin, Isaie du Mats, seigneur de Montmorin et de Pouzauges. Cette capitulation fut accordée, et Soubise eut, sous promesse de fidélité pour l'avenir, le pardon qu'il sollicitait.

Après avoir maintenu dans la ville soumise la liberté de conscience et du culte, Louis XIII retourna à Paris, non sans avoir préalablement fait mettre par ses lieutenants, Favas, La Noue et Bessay, dans l'impossibilité de continuer la lutte sur le Lay, où ils avaient opéré plusieurs descentes, et dans le Talmondais qu'ils avaient ravagé.

Mais l'engagement de Soubise ne devait pas tarder à être déchiré. Les Rochelais, maîtres de la mer depuis l'automne de 1621, ravagent le pays compris entre la Loire et la Garonne ; les religieux de l'abbaye de l'île-Chauvet sont chassés et remplacés par des soldats calvinistes ; le curé de Mouchamps, Isaac Ringère, ligotté par les protestants, et conduit à la Chaize-leVicomte « en l'armée de Soubise » qui s'apprêtait à mettre le siège devant les Sables-d'Olonne.

 

(1) Deux jours auparavant, Mlle de Rohan avait chassé de la Garnache les protestants, qui s'en étaient emparés, et qui en faisaient une retraite de brigands.

 

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SIÈGE DES SABLES-D'OLONNE ET SAC DE LA VILLE PAR SOUBISE.
- LE COMTE DE LA ROCHEFOUCAULD POURSUIT SOUBISE QUI, LE 31 MARS 1622, PREND LUÇON ET LE LIVRE AU PILLAGE.

- LES ÉCHECS DE SOUBISE A SAINT-GILLES, TALMONT ET NOIRMOUTIER

 

Au mois de février 1622, l'armée protestante vint investir cette ville. Bon nombre de gentilshommes catholiques qui s'y étaient retirés firent, de concert avec les habitants, une vigoureuse résistance. Mais la plupart périrent, et les assiégés, voyant qu'ils ne pouvaient se défendre plus longtemps, adressèrent des propositions à Soubise. Celui-ci leur imposa pour conditions 1° de lui payer vingt-mille écus ; 2° de lui fournir quatre-vingts pièces de canon et trois vaisseaux. Il s'engageait, de son côté, à les préserver du pillage. Les assiégés acceptèrent le traité et l'exécutèrent, mais Soubise ne fut pas plus fidèle à cette promesse qu'à celle qu'il avait faite au roi.

Il permit à ses soldats le pillage pendant deux heures ; ils se livrèrent à tous les désordres imaginables. Ils emportèrent les calices, les vêtements sacerdotaux et les cloches, brisèrent les images, profanèrent ce qu'il y a de plus sacré. Ils firent des drapeaux avec les plus beaux ornements des églises, enlevèrent tout ce qui appartenait aux habitants, et les laissèrent presque nus, exposés à la plus grande misère.

Le comte de la Rochefoucauld réunit la noblesse du pays afin de réprimer ces brigandages. Secondé par des Roches-Baritaud, il poursuit Soubise à La Roche-sur-Yon, aux Clouzeaux, à La Chaise-le-Vicomte, bat son lieutenant Cressonnière à Mareuil. - Mais l'intrépide huguenot demeurait toujours intraitable. Battu à Pouillé et à Thiré, il va, le 31 mars 1622, mettre le siège devant Luçon qui est pris de nouveau et livré au pillage.

Il fallut entreprendre une nouvelle campagne contre le terrible réformé qui venait d'éprouver un échec devant Saint-Gilles et qui avait vainement assiégé Talmont et Noirmoutier. Le roi se décida à aller en personne combattre les rebelles.

 

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ARRIVÉE DE LOUIS XIII EN BAS-POITOU.
- LES FORCES DE SOUBISE. - LA CONCENTRATION DE L'ARMÉE ROYALE.

- PRISE DE VIEILLEVIGNE.
- ARRIVÉE DU CORPS DE LA ROCHEFOUCAULD.
- L'ARMÉE ROYALE A CHALLANS (14 Avril).
- ARRIVÉE DU ROI DEVANT RIEZ.
- IL TRAVERSE LE CANAL DE BESSE

 

Le roi, alors à peine âgé de vingt ans, partit de Paris le dimanche des Rameaux, 22 mars 1622 et arriva à Nantes le 10 avril, avec une nombreuse escorte de princes et seigneurs, de hauts dignitaires de l'Eglise. - Le 9, Soubise, arrêté dans sa marche du côté de la Bretagne, s'était dirigé vers les îles de Riez et de Monts, avec l'intention apparente de s'y loger. Ses forces se composaient de six à sept mille hommes d'infanterie, commandés par le comte de Marenne, La Mothe-St-Surin, Vaudoré, Ballebat et Rollandière, de huit-cents chevaux et de sept pièces de canon.

 

Apremont. - Le Château, l'Eglise et la Vallée de la Vie (Cliché de M. Renaud).

 

Sans attendre les renforts demandés, et malgré l'avis de plusieurs de ses conseillers qui lui faisaient observer que l'armée royale était dépourvue d'artillerie, le roi se décida à marcher immédiatement à la rencontre de Soubise. Le comte de La Rochefoucauld, qui se trouvait alors devant le château de la Chaume, reçut l'ordre de venir à Apremont rejoindre le monarque qui, le 12 Avril, partit de Nantes, se dirigeant sur Vieillevigne, où devait avoir lieu la concentration des troupes. L'armée royale, composée de huit mille hommes d'infanterie aux ordres de Louis de Marillac, Bassompierre et Clérembault, des gendarmes de la garde du roi, des chevau-légers et d'une compagnie de carabiniers, commandée par Schombert, atteignit gaiement le but, sous une pluie battante, en devisant des ennuis de la journée. Le château de Vieillevigne, abandonné par Gabriel de Machecoul, qui était allé rejoindre l'armée calviniste, fut pris par le duc de Vendôme, qui s'empara des armes qui s'y trouvaient.

De son côté, La Rochefoucauld, avec le coup d'œil d'un capitaine consommé, avait admirablement organisé ses forces, composées indépendamment d'un grand nombre de volontaires, de la noblesse poitevine, de trois régiments d'infanterie, dont l'un aux ordres de Châtellier-Barlot, seigneur de Velluire.

Après avoir investi le fort de La Chaume, qui paraissait être le point d'appui des opérations militaires de l'armée calviniste, coupée ainsi de ses relations avec la mer, et malgré la faiblesse numérique de ses forces, il n'hésita pas à harceler Soubise jusque dans l'île de Riez, défendue par un vaillant royaliste du Bois de Kergrois, mais qui devant le nombre des ennemis avait dû abandonner la position.

A la suite d'un conseil de guerre tenu dans la nuit du 13 au 14 avril, il fut décidé sur l'avis de Condé, général en chef, et de Bassompierre de hâter la marche de l'armée royale.

Le 14 au matin, les colonnes se dirigèrent en ordre de bataille vers Challans, où le roi s'installa chez le sieur Massé de Grousseau de la Coursandière, et le prince de Condé chez Mme de Logerie. Après avoir pris des informations, on combina ses mesures en vue d'une attaque qu'on s'attendait à être tellement chaude, que plusieurs d'entre les chefs, notamment le prince de Condé, le comte de Soissons, le duc de Vendôrne, le comte de Saint Paul et leur suite « crurent devoir mettre ordre à leur conscience, en se confessant et en communiant (1). »

Etabli dans l'île de Riez comme dans un fort inexpugnable, protégé d'un côté par la mer, d'un autre par les eaux profondes de la Vie, d'autre part enfin par les canaux et la fange des marais, le chef calviniste s'y était cru en sûreté. Mais le roi ne laissa pas à Soubise le temps de se retrancher dans cette forte position. Le vendredi 15, à trois heures du matin, le roi s'en alla avec sa cornette blanche devant Riez, en suivant la longue et pénible chaussée qui, flanquée de deux larges fossés remplis d'eau, traversait le marais. - La journée entière se passa à attendre des compagnies qui s'étaient égarées et à observer l'ennemi qui se fortifiait au pont d'Orouet.

Après un engagement heureux contre Soubise, La Rochefoucauld ayant opéré sa jonction avec l'armée royale, entre Coumequiers et la commanderie des Habites, le roi passa la revue des troupes, et tout étant prêt pour l'expédition, on se décida à agir.

A minuit, profitant de ce que la mer était basse, le roi, à cheval à la tête de sa gendarmerie, traversa le canal de Besse, distant de la mer de cinquante pas, laissant à cet endroit un nom qu'il porte encore aujourd'hui.

La cavalerie et l'infanterie ayant pu se réunir, le roi fit faire de grands feux pour réchauffer les soldats et distribuer des vivres. Louis mangea au milieu d'eux sur le gazon, prit quelques instants de repos sur une poignée de paille, puis ayant pourvu au besoin de ses troupes, il les disposa au combat. - On était au samedi 16.

 

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NOTES:

(1) Documents consignés sur les registres de la paroisse de Challans par le curé de l'époque, Germain Régaudineau.

 

ATTAQUE DE SOUBISE (16 Avril). SA FUITE. NOMBREUX PRISONNIERS, - HORRIBLE SPECTACLE APRÈS LA BATAILLE

 

Le roi, monté sur un superbe genet d'Espagne blanc, marchait au milieu des troupes avec sa compagnie de gendarmes, et l'on s'avançait en bon ordre vers le bourg de Riez, lorsque le maréchal de Vitry apprit que ce bourg était évacué, et que Soubise

s'était sauvé à la nage, suivi de cent-cinquante cavaliers, abandonnant le gros de son armée à l'ennemi (1). Ses soldats d'infanterie, qui remplissaient les maisons et les bateaux de Saint-Gilles, de Croix-de-Vie et de Riez, faisaient des efforts désespérés pour gagner le large. Condé tomba sur eux comme sur une proie facile, et ils allaient être impitoyablement massacrés, si le roi ne leur avait accordé la vie, à la condition de servir sur ses galères.

Un certain nombre de barques s'étant cependant éloignées de la terre se mirent à tirer sur les troupes royales. On leur répondit par une décharge meurtrière qui leur tua beaucoup de monde. D'autres rebelles, qui essayaient de se sauver à travers les marais, furent assommés par les paysans. La cavalerie ne fut pas plus heureuse, malgré l'énergie de son brave commandant. qui seul au milieu de cette panique universelle ne perdit pas la tête. Il fut fait prisonnier par Baïes, lieutenant de La Rochefoucauld, qui s'était mis à sa poursuite.

Presque tous les chefs de l'armée calviniste tombèrent au pouvoir du roi, notamment : le comte de Marennes, principal lieutenant de Soubise, Louis Regnier de la Planche, fils du célèbre auteur de l'Estat de la France, de la Religion et de la République pendant le règne de François II ; La Morinière, Gabriel de Machecoul, et le sieur de la Rollandière, d'Aizenay, dont la femme, Renée de Rivaudeau, était la nièce du poète poitevin de ce nom.

Le butin fut considérable : les sept canons que possédait l'armée calviniste restèrent au pouvoir du roi. Les drapeaux blancs et bleus, qui n'avaient pas été détruits, furent pris. Le roi les envoya à sa mère et donna les navires au comte de La Rochefoucauld. Le reste du butin fut en partie abandonné aux soldats, à l'exception des ornements d'église, qui furent autant que possible restitués. Plusieurs chariots étaient chargés de cloches enlevées dans les églises.

L'île et les environs de Riez, que le roi visita avec Châtellier-Barlot, présentaient un spectacle horrible après la bataille. Deux-mille-cinq-cents corps inanimés étaient étendus çà et là sur la terre humide du marais, ou noyés dans les canaux et les rivières, tandis que la mer, pour ajouter à l'horreur de cette scène, rejetait cent-vingt cadavres sur le rivage. Le roi n'avait perdu que vingt hommes, et avait arraché sept-cents protestants à la rage de ses troupes. Il envoya les soldats à Nantes et les distribua ensuite sur ses galères. Les gentilshommes, au nombre de neuf-cents, allèrent expier leur faute dans les prisons de Saintes, de Fontenay et de Poitiers.

 

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NOTES:

(1) Poursuivi par La Rochefoucauld, Bayers et Thomas,, de la Pintière, il alla se cacher chez Mme de Saint-Amand, à une lieue de Mauze.

 

LE ROI SE DIRIGE D'APREMONT SUR FONTENAY, PAR AIZENAY, LA ROCHE, LA CHAIZE-LE-VICOMTE, SAINTE-HERMINE.
- SON DÉPART POUR NIORT.
- MARIE DE MÉDICIS SÉJOURNE A FONTENAY-LE-COMTE (16 Mai 1622)

 

Le roi, satisfait d'avoir délivré le pays des brigandages, se rendit à Apremont, où il ordonna la démolition du château d'Apremont, puis se dirigea sur Fontenay, en passant par Aizenay, la Roche-sur-Yon, la Chaize-le-Vicomte et Sainte-Hermine, où il fut reçu avec sa nombreuse escorte, par Madame de la Tabarière, fille de Duplessis-Mornay, et femme de Jacques des Nouhes. En quittant Sainte-Hermine, le roi continua sa marche vers Fontenay, où il arriva, avec toute sa cour, le 22 au soir. Il y séjourna jusqu'au 26 et le lendemain se rendit à Niort. La reine-mère, retenue par une indisposition, n'avait pu arriver que le 12 mai à Fontenay, où elle demeura dans la maison du gouverneur, qui existe encore près de la Grand'Fontaine.

 

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LA ROCHELLE SE RÉVOLTE DE NOUVEAU.
- SOUBISE S'EMPARE DE L'ILE DE RÉ, D'OLÉRON,
ETC.,CAPTURE PLUSIEURS NAVIRES DE LA FLOTTE ROYALE, NOTAMMENT « LA VIERGE ».
- COMBAT NAVAL DES SABLES.

HÉROISME DES MARINS DE LA « VIERGE»  

 

Au milieu d'une ère d'apaisement amenée surtout par la défaite de Soubise, La Rochelle murmurait toujours des mesures qu'on prenait contre elle, et le 20 octobre 1622, elle avait encore livré dans les eaux de l'île de Ré, un combat naval à la flotte royale, commandée par le duc de Guise. Tout annonçait donc le projet d'en finir avec cette cité si jalouse de ses libertés, et aussi avec les protestants, trop souvent aveuglés par l'esprit de parti et l'amertume de leurs défaites passées.

A la suite de certains scandales, arrivés surtout dans diverses églises, où quelques protestants avaient été un peu molestés, La Rochelle venait encore de se soulever et de faire appel à l'étranger. Les deux frères Rohan et Soubise, emportés par un vertige difficile à expliquer, accédèrent au projet des Rochelais, et un rapprochement monstrueux s'opéra secrètement entre ces chefs calvinistes et les agents de l'Espagne, qui avaient menacé Richelieu de rendre aux huguenots l'argent donné par la France aux Hollandais, et qui tinrent parole.

Dans les premiers jours de janvier 1625, Soubise se met en mer avec une douzaine de petits bâtiments et se saisit de l'île de Ré. De là, il fait voile vers les côtes de Bretagne et surprend, dans le port de Blavet, six vaisseaux du roi, dont un, La Vierge, portait quatre-vingts canons « de fonte verte », chose prodigieuse pour ce temps. Puis il s'empare de Saint-Gilles et de l'île d'Oléron, pendant qu'un corps de troupes est envoyé par Richelieu à la limite du Poitou et de l'Aunis, et que des vaisseaux, demandés aux puissances protestantes, s'apprêtent à livrer combat aux huguenots français, qui venaient follement en aide à la maison d'Autriche.

Les armées navales furent bientôt en présence ; les vingt navires promis par la Hollande étaient arrivés sur les côtes de Vendée, et douze d'entre eux avaient reçu des capitaines et des soldats français, condition exigée par Richelieu, qui savait que les marins hollandais ne servaient qu'à regret contre leurs coreligionnaires. Manti, vice-amiral, s'était réuni avec une douzaine de vaisseaux français à Houtsteen, amiral de. Zélandé qui commandait l'escadre auxiliaire, et l'on attendait encore vingt-deux bâtiments qui achevaient de s'équiper aux Sables-d'Olonne, qu'animait une ardente rivalité contre La Rochelle. Soubise voulut prévenir la jonction des Olonnais avec les deux amiraux ; le 16 juillet, il assaillit brusquement, avec trente-neuf voiles, la flotte franco-batave qui se croyait sur la foi d'une suspension d'armes, et lança des brûlots sur les principaux navires. Le vaisseau amiral de Houtsteen fut consumé, et quatre autres navires pris ou coulés. Mais Soubise fut moins heureux devant l'île de Ré ; ses défenseurs furent battus sur mer et sur terre, les marins anglais ne manœuvrèrent que l'épée sous la gorge.

Une dizaine de vaisseaux protestants furent pris. La Vierge, le plus puissant navire qu'on eut vu encore en France, conquis par Soubise devant le port du Blavet, avait touché à la côte ; trois vaisseaux français et un hollandais l'abordèrent : c'était Le Harlem, commandé par le chevalier de Villeneuve ; Le Saint-Louis, commandé par le chevalier de Bazzili ; Le SaintFrançois, capitaine Kergueser et L'Olonnais, capitaine Veillon, des Sables-d'Olonne. Les trois premiers vaisseaux, qui se sont cramponnés à L'Olonnais, en jetant leurs grappins dans ses mâtures entourent La Vierge, et les Sablais s'élancent à l'abordage. Les matelots de La Vierge sont assaillis de toutes parts par les haubans, par la proue, par le tillac. L'un d'eux,

nommé Durand, de l'île de Ré, s'écrie du bas du château de poupe où étaient les poudres : « Donnez la vie ou vous ne tenez

rien. » - « Pas de quartier » lui est-il répondu. L'équipage défend son bâtiment pied à pied, fait sauter le premier, puis le

second pont, puis enfin Durand fait voler en éclats l'énorme navire par l'épouvantable détonation de deux-cent-trente barils de poudre. Les quatre vaisseaux qui assaillaient La Vierge s'abîmèrent dans les flots avec elle. Les Rochelais faisaient payer cher leur défaite. Sept-cent-trente-six royalistes périrent dans les flots. Deux personnes seulement furent sauvées par miracle, le capitaine Kergueser, et un gentilhomme bas-poitevin, nommé Chaligny, habitant près Ste-Pexine.

Guitton regagna La Rochelle dans une barque, sans pourpoint, chausses, manteau ni épée. Il fut accusé de trahison ; il avait été malheureux. Mais le conseil rendit justice à ses efforts. Il devint maire, l'âme de la défense pendant le siège de La Rochelle et mourut, semble-t-il, le 15 mars 1664, seigneur de Mepose-Pucelle, âgé de 69 ans environ.

 

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GUITTON ET SOUBISE SE RETIRENT SUR LES COTES D'ANGLETERRE

 

Soubise et Guitton, après quelques jours passés à La Rochelle, se retirèrent sur les côtes d'Angleterre avec vingt-deux voiles qu'ils avaient ralliées.

Saint-Martin-de-Ré et le château d'Oléron se rendirent, et La Rochelle, étroitement resserrée de toutes parts fut, suivant l'énergique expression de ses adversaires, « rendue sans terres, sans îles, sans mer, sans soldats et sans vaisseaux. »

 

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RICHELIEU OFFRE LA PAIX AUX ROCHELAIS ET AUX RÉFORMÉS

 

Ferme dans le péril, Richelieu ne fut point enivré de la victoire. Il jugea que le siège de La Rochelle était encore prématuré dans la situation générale des affaires, et que l'énergique cité puiserait dans son désespoir des ressources nouvelles. Il lui offrit la paix à la condition, en un mot, que la république de La Rochelle rentrerait dans le droit commun des villes du royaume.

Enfin, le 5 avril 1621, il « donnait » la paix, d'une part aux églises réformées, de l'autre aux Rochelais, par un acte séparé, dont les conditions étaient moins dures que celles qu'avait proposées Richelieu après la bataille de Ré.

 

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DÉMANTÈLEMENT DE NIORT, LES HERBIERS, MORTAGNE, MONTAIGU, TIFFAUGES, PARTHENAY, SAINT-MAIXENT, FONTENAY

 

Ruines du Donjon de Tiffauges (Porte d'entrée). D'après un cliché de M. Arsolier.

 

Le 31 juillet, une ordonnance datée de Nantes, décrétait que les fortifications des villes et châteaux inutiles à la défense des frontières, et propres à servir de retraite aux perturbateurs de la paix publique, seraient dans toute l'étendue de la France, rasées et démolies, ainsi que les fortifications faites depuis trente ans « es châteaux et maisons des particuliers sans permission expresse du roi ». En vertu de cette ordonnance, Niort, Les Herbiers, Mortagne, Tiffauges, Montaigu, Parthenay, Saint-Maixent et Fontenay devaient être démantelés . Mais ces mesures ne furent exécutées que plus tard.

Un immense cri de joie populaire éclata dans toute la Bretagne, puis dans toute la France : depuis Louis le Gros, la monarchie n'avait rien fait de plus grand pour l'unité nationale, contre la tyrannie féodale et contre l'anarchie : tout ce qui subsistait de féodalité politique était frappé au cœur.

 

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MALADIE DU ROI.
- BUCKINGHAM ARRIVE AVEC LA FLOTTE ANGLAISE DEVANT L'ILE DE RÉ.
- SES ÉCHECS. - SUCCÈS DE TOIRAS.

- MESURES ÉNERGIQUES PRISES PAR RICHELIEU POUR LUTTER CONTRE LES ANGLAIS.
- LE ROI ÉTABLIT SON QUARTIER GÉNÉRAL A MARANS.
- ARRIVÉE DE PLUSIEURS GENTILSHOMMES BAS-POITEVINS.
- DÉVOUEMENT DE LA GROSSETIÈRE.
- ÉNERGIE DE CATHERINE DE PARTHENAY ET DE SA FILLE ANNE DE ROHAN

 

Le roi était tombé malade peu de temps après l'ordonnance du 31 juillet, et de toutes parts arrivaient des nouvelles menaçantes. Rohan agitait encore Le Languedoc ; le 20 juillet, la flotte anglaise était, en vue de l'île de Ré, et Buckingham, qui la commandait, lui avait promis, ainsi qu'à ses autres alliés secrets, de jeter trois corps d'armée en France, l'un en Normandie, le second dans l'Aunis et le troisième en Guyenne.

L'anxiété de Richelieu était extrême, mais les succès de Toiras à Saint-Martin-de-Ré, et les débuts malheureux de l'amiral anglais contre l'île de Ré et le Fort-Louis lui rendirent l'espoir.

Une flotte fut formée à la hâte, et les meilleurs navires marchands de Dieppe, du Havre, de Saint-halo et des Sablesd'Olonne équipés en guerre. Dans cette dernière ville, on avait réuni de vastes approvisionnements, ainsi qu'à Brouage, poste important que Richelieu avait fait racheter par le roi à l'ancien gouverneur, et qu'il s'était approprié, ainsi que le Havre, sous le nom de la reine-mère. Il expédie des renforts considérables dans l'île d'Oléron et à Saint-Martin-de-Ré, afin de leur permettre de pouvoir lutter contre les Anglais, maîtres de la mer, bien renseignés par les huguenots des côtes, et ravitaillés par leurs flottes et par les Rochelais.

L'armée française cependant, grossissait à vue d'œil autour de son quartier général de Marans, où arrivaient bon nombre de Fontenaisiens catholiques et de gentilshommes bas-poitevins (1), notamment le fameux Châtellier-Barlot, du Poiré-deVelluire, à la tête de son régiment, tandis que les protestants couraient se renfermer dans La Rochelle, se dévouant ainsi à une entreprise qu'ils regardaient comme un acte méritoire aux yeux de Dieu. De ce nombre était la Grossetière, ancien page des écuries du roi qui, au plus fort de la lutte, ne craignit pas de traverser pendant la nuit les lignes des assiégeants, en vue d'aller à Londres porter lui-même des dépêches.

Pris à son retour et détenu à Marans jusqu'à la reddition de La Rochelle, il fut, d'après Bernard, condamné à avoir la tète tranchée ; ses membres mis en quartiers, furent exposés aux environs de La Rochelle, et sa tête placée sur la tour de la Lanterne.

La Grossetière ne fut pas le seul qui, durant le siège, eut le courage de passer les lignes. « Un, entre autres, dit le Mercure français, p. 667, lequel fut pris et pendu, et lorsqu'on lui donnait la question, avoua qu'il avait avalé une amande d'argent creuse, dans laquelle une lettre était renfermée... car il la rendit par le bas, l'ayant gardée quatre jours dans son corps, nonobstant les lavements qu'on lui donnait (2).

Catherine de Parthenay et Anne de Rohan du Parc Soubise s'étaient jetées dans la place dès le début des hostilités, et par leur mâle énergie, y encouragaient la résistance.

Sur un refus que lui fit Louis XIII de la laisser sortir de la ville avec deux-cents femmes, à qui l'humanité exigeait qu'on épargnât les tortures d'un plus long siège, Catherine et sa fille voulurent dès lors vivre comme les plus misérables. Elles sacrifièrent les chevaux de leur carrosse, et en distribuèrent la viande à la foule affamée.

Lors de la reddition de la ville, Catherine ne voulut pas qu'il fut particulièrement fait mention d'elle dans l'acte de capitulation. Il lui répugnait qu'on put croire un instant qu'elle avait plié sa volonté, et était entrée pour une part dans le consentement du traité de paix. Conduite prisonnière avec sa fille au château de Niort, le 2 novembre 1628, elle mourut au Parc de Mouchamps, le 26 octobre 1631, âgée de près de soixante-dix-sept ans. Fille de Jean Parthenay l'Archevesque et de Antoinette d'Aubeterre, elle fut la mère du duc de Rohan et du prince de Soubise.

 

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NOTES:

(1) Nous croyons être agréable à nos lecteurs en leur donnant ci-après les noms des principaux seigneurs bas-poitevins qui prirent part au siège de la Rochelle en dehors du comte de La Rochefoucauld et du Châtellier-Barlot.

1- Foucher, seigneur des Herbiers, dont nous avons déjà parlé, y assiste en qualité de lieutenant général.

2- De Grimouard, Geoffroy, seigneur du Peré, assista au siège de La Rochelle et perdit tous ses bagages à l'île de Ré, où il courut risque de sa vie, - servait avec quinze chevaux de son train dans le corps d'armée du comte de La Rochefoucauld.

3° De Montalembert, Jean, seigneur des Essarts, fut aide de maréchal de camp et en remplit les fonctions sous les ordres de Bassompierre.

4° De Rechignevoisin, Jean, seigneur de la Roussière et de la Maison-Neuve qui, le 5 octobre 1626, avait obtenu la capitainerie et gouvernement de la ville de Marans, fut, le 9 novembre suivant, chargé par Louis XIII de pourvoir à la translation, dans cette ville, du présidial de La Rochelle. Dans les derniers jours du siège, il lui fut enjoint par Richelieu de faire préparer 50.000 fascines, 6.000 pieux et 1.000 perches, pour les travaux nécessaires à l'investissement. de La Rochelle.

5° De La Trémouille, Henri, fils de Claude de la Trémouille qui, à Coutras, avait combattu dans le parti du roi de Navarre, assista en qualité de maître de camp de la cavalerie légère de France, au siège de La Rochelle, où il abjura le protestantisme entre les mains de Richelieu. - (Documents extraits du Dictionnaire des familles de l'ancien Poitou, par Beauchet-Filleau. - Edition de 1840--1854.)

(2) Arcère. - Histoire de La Rochelle, t. II, page 291

 

DÉCLARATION ROYALE. - INVESTISSEMENT DE LA ROCHELLE. - UNE ESCADRILLE DES SABLES - D'OLONNE TRAVERSE LA FLOTTE ANGLAISE DANS LA NUIT DU 7 OCTOBRE 1627

 

Le 5 août, une déclaration royale avait été lancée contre les rebelles qui se joignaient à l'étranger, et qui, par une aveugle fatalité, ne craignaient pas de solliciter des secours de l'Angleterre, cette éternelle ennemie de la France, que nous verrons à la fin du siècle suivant, toujours perfide, pousser vers la ruine l'héroïque Vendée, et vouer à la mort, pour le triomphe de sa politique égoïste et néfaste, de malheureux français égarés.

Le 15 août 1627, l'armée royale vint asseoir son camp devant La Rochelle, et les hostilités commencèrent dès les premiers jours de septembre entre les troupes royales et les Rochelais. Malgré la flotte de Buckingham qui tenait la mer, une escadrille de trent-cinq barques, à voiles et à rames, partie des Sables-d'Olonne au cri de : Passer ou mourir, avait, dans la nuit du 7 au 8 septembre, traversé la flotte anglaise avec une audace et un bonheur inouïs, forcé une estacade flottante, faite avec des mâts et des cables, devant le port de Saint-Martin et pu apporter aux assiégeants des vivres pour six semaines et quatre-cents hommes de renforts (1). Le roi et le cardinal étaient arrivés quatre jours après au camp, devant La Rochelle.

 

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NOTES:

(1) Un enfant des Sables, Jean Martin, se distingua encore pendant ce siège mémorable, en se faisant mutiler pour couvrir la personne du roi.

 

RICHELIEU DEMANDE DE L'ARGENT AU CLERGÉ.
- ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE FONTENAY (27 Avril-14 Mai 1628).
REDDITION DE LA ROCHELLE (28 Octobre 1628)

 

Mais pour achever ses grands desseins, Richelieu avait besoin d'argent. Il s'adressa, tout naturellement au clergé qui avait le plus activement poussé au siège. Le 3 novembre 1627, il fit signer au roi des lettres de convocation d'une assemblée générale des prélats, qui ouvrit ses séances à Fontenay-le-Comte, le 27 avril, sous la présidence de l'Archevêque de Sens. Cet événement remarquable, auquel prirent part vingt-neuf archevêques, évêques et abbés, fut l'occasion de fêtes et de cérémonies pompeuses. Notre-Dame à peine renaissante fut ornée de peintures et de décorations nouvelles, les dalles du chœur se couvrirent de riches tapis, le trône archiépiscopal surmonté de son dais et de ses crépines d'or, s'éleva au milieu des sièges de velours, et les chappes aux vives couleurs, les étoffes chatoyantes, les vases précieux brillèrent aux yeux de la foule étonnée qui se pressait dans la nef. On décida que les séances se tiendraient à l'Hôtel-de-Ville, et l'on envoya prier le maire, Giles Fradet, et le lieutenant général de faire étayer le plancher de la salle haute pour plus de sûreté. Le maire répondit le 28 qu'il serait fait selon leur désir. Le 2 mai, arrivèrent des députations, ayant en tête le clergé du diocèse de Maillezais. Le Vicaire Général et Jacques Valin, curé de Notre-Dame et grand pénitencier, prononcèrent des discours latins. Le lieutenant général de la sénéchaussée vint ensuite, accompagné de Julien Collardeau, procureur du roi, et de quatre officiers de justice, précédés de leurs huissiers. Le compliment du lieutenant général prononcé, le président remercia. Enfin le maire, Giles Fradet, entouré des échevins et conseillers, de bourgeois et de ses gardes ordinaires, se présenta. Le président l'accueillit d'une manière bienveillante, répondit à son discours, et le fit reconduire jusqu'à l'escalier par les agents.

Les séances, au cours desquelles le clergé vota trois millions de subsides, durèrent jusqu'au 23 mai. Le 24 au matin, une messe solennelle fut célébrée à Notre-Dame par l'archevêque de Sens, et l'Assemblée se sépara après un discours d'adieu prononcé par le sieur de Breteuille, secrétaire de l'Assemblée (1).

Cependant, le siège de La Rochelle avançait lentement. Il fallait fermer à tout prix la mer pour empêcher la ville de se ravitailler et de recevoir des secours des Anglais. Aidé par les conseils de Métezeau, architecte du roi, Richelieu conçut et fit exécuter le projet gigantesque de fermer le port et de couper l'Océan par une digue de plus de sept-cents toises. Ce travail colossal fut achevé sous ses yeux, malgré les tempêtes qui le détruisirent une première fois. Il dirigea les travaux, commanda lui-même les troupes en présence du roi, et réduisit enfin cette ville après un an de siège, malgré la sombre exaltation de ce peuple, si énergiquement personnifié dans le corsaire qu'il s'était donné pour chef, malgré l'énergie du maire Guitton, l'éloquence du ministre Salbert, et le fanastime héroïque qu'il avait su entretenir dans l'âme de ses concitoyens.

Toutes les tragédies des grandes guerres de religion se renouvelèrent, moins le crime, dans la cité dévouée qui, le 28 octobre 1628, n'ayant plus que cent-trente-six hommes, dont soixante-quatorze Français et soixante-deux Anglais en état de porter les armes (2 ) ; ouvrit ses portes au roi et au cardinal qui, le 1er novembre, de général redevenu prêtre, célébra une messe solennelle et chanta un Te Deum dans l'église Sainte-Marguerite de la Rochelle. Son fidèle lieutenant, Henri de Sourdis, qu'il avait fait d'évêque de Maillezais, archevêque de Bordeaux, lui servit de diacre.

Ainsi finit la dernière et la plus vigoureuse lutte de l'esprit municipal contre la monarchie. La Rochelle était la dernière et l'une des plus glorieuses entre cette famille de républiques bourgeoises, qui avaient souvent rappelé, au moyen âge, les vertus des cités antiques, mais dont l'indépendance était devenue incompatible, non pas seulement avec la monarchie, mais avec l'unité nationale.

 

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NOTES:

(1) Nous avons publié, dans notre Histoire des guerres de religion, T. II, un compte-rendu détaillé de cette réunion, pour laquelle il existe, aux Archives de Fontenay, des renseignements du plus haut intérêt.

(2) De 28,000 hommes qui étaient dans les murs de la Rochelle au début du siège, 23,000 étaient morts de faim. (Lièvre. - T.I, page 10).

 

 

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